« Lorsque l’on veut convaincre, la bonne foi et l’imposture vont parfois ensemble » (Éric-Emmanuel Schmitt)

Dimanche 24 avril, les Français ont renouvelé pour une seconde fois leur confiance à Emmanuel Macron, dans un duel qui l’a opposé à Marine Le Pen, cheffe du Rassemblement national. Après 2017 où il y a eu le même cas de figure, c’est donc la deuxième fois qu’Emmanuel Macron passe devant son adversaire dans les urnes.

Comme on pouvait s’y attendre, le dirigeant togolais, Faure Gnassingbé n’a pas voulu se faire conter l’évènement. Il s’est empressé adresser ses chaleureuses félicitations à son homologue français. « J’adresse, en mon nom ainsi qu’au nom du gouvernement et du peuple togolais, mes chaleureuses félicitations à Emmanuel Macron à la suite de sa brillante réélection à la Présidence de la République Française », a posté ce lundi Faure Gnassingbé sur sa page twitter. « Je formule le vœu que ce mandat soit pour lui, celui de nouvelles réussites et, pour la France, une période de cohésion et de grands progrès », a-t-il poursuivi.

C’est assez extraordinaire que Faure Gnassingbé qui a en horreur les valeurs de la démocratie et de l’alternance et qui se maintient au pouvoir à travers des élections frauduleuses et des coups d’état permanents- il bat le record de longévité présidentielle dans la zone ouest-africaine et se fait surnommer à juste le jeune doyen-, se pâme d’admiration devant une élection démocratique en France et frétille de joie pour la victoire d’Emmanuel. Du Togo à la France, il y a un énorme fossé qui différencie les processus électoraux. Parfois, il est difficile de comprendre à quoi répond ce réflexe.

Il est vrai, le message adressé à Emmanuel Macron respecte donc une tradition diplomatique, celle de féliciter le partenaire. Mais au Togo, un pays qui a une longue tradition d’élections émaillées de fraudes et de violences, et un pouvoir qui s’exerce à vie, les félicitations de Faure Gnassingbé frisent la duplicité. Et pour cause, les périodes pré et postélectorales sont des moments de vives tensions au Togo. Idem pour le jour du vote et le lendemain qui sont également des moments de grandes frayeurs.

De plus, au Togo, l’appareil d’Etat est mobilisé dans les campagnes électorales et les deniers publics sont utilisés pour corrompre les électeurs, le candidat du pouvoir cherchant à mettre de son côté toutes les chances de se faire réélire, de gré ou de force.

Les prévisions sont aussi faites, de telle sorte qu’en cas de réticence des électeurs, le moulin à fraudes, la CENI puisse opérer le hold-up électoral en inversant les chiffres issus des bureaux de vote. On peut voir le président de la Cour constitutionnelle effectuer des pas de danse pour célébrer la victoire du président réélu grâce à la manipulation des chiffres, mais aussi le rejet massif des recours formulés par les partis politiques de l’opposition.

Il est bien d’adresser des messages de félicitation au président français, pour espérer en recevoir en retour. Mais en tant que chef de l’Etat, Faure Gnassingbé gagnerait mieux à promouvoir un climat de paix et de transparence surtout lors des élections au Togo. Pas la paix avec des armes braquées sur les populations civiles et les opposants. Mais la paix dans laquelle tous les candidats peuvent battre campagne de façon égale, sans violences sur les militants de l’opposition et surtout avec un vote libre ainsi que le respect de l’urne.

Médard Ametepe

Source : Liberté / libertetogo.info