Recensement unilatéral, énormes anomalies techniques, fichier électoral tronqué en perspective… Devant la presse lundi, la Coalition des 14 formations politiques (C14) a, à nouveau, dénoncé la démarche cavalière du pouvoir de Lomé qui, visiblement, rame à contre courant de la feuille de route de la Cedeao. En réponse, le gouvernement martèle que le processus électoral démarré, depuis peu, est irréversible. Dans ce duel à distance, il convient de se questionner sur la pertinence de la date du 20 décembre prochain annoncée pour la tenue des législatives.
La C14 persiste et signe…
La coalition des 14 formations politiques n’a de cesse multiplier les initiatives pour attester la raison qui sous-tend son appel au boycott du recensement électoral. Lundi, pendant que le recensement électoral jouait 24 heures de prolongation, ce regroupement de partis politiques était devant la presse nationale et internationale. Après avoir dénoncé un recensement frauduleux, Brigitte Kafui Adjamagbo et ses compagnons de lutte exigent la désignation d’une personnalité étrangère à la tête de la CENI, la recomposition des Commissions électorales locales indépendantes (CELI), celle des Comités des liste et cartes (CLC) et le redécoupage électoral.
« Nous appelons les populations à rester à l’écart de ce qui se fera aussi dans la zone 2 parce que les évènements de la zone 1 nous donnent raison », a martelé la Coordinatrice de la C14. Et d’expliquer que le régime s’est précipité pour organiser le recensement alors même que la Coalition n’est pas représentée dans les structures qui gèrent l’opération. «L’opérateur technique qui a préparé les kits est un opérateur que nous contestons. Les fais ont démontré qu’encore une fois, le régime croit pouvoir utiliser les mêmes méthodes pour produire un fichier tronqué d’anomalies pour s’en servir et aller à des élections dont les résultats sont connus d’avance », a-t-elle poursuivi.
Pour étayer leur argument, les responsables des 14 partis de l’opposition estiment que le découpage électoral actuel comporte des disparités criardes. Et de l’illustrer par les résultats officiels des législatives de 2007 qui ont permis, avec environ 900.000 voix, au pouvoir de s’octroyé 50 sièges sur les 81. Ceci, pendant que l’opposition, avec ses 880.824 voix n’a eu que 31 sièges avec environ 1.200.000 voix. Pareil en 2013 où, sur 91 sièges, le parti UNIR s’est octroyé 62 sièges avec 880.824 voix pendant que l’opposition, avec plus de 1 million de voix, ne s’est adjugée que 29 sièges. Raisons donc suffisantes pour l’opposition de réclamer que fin soit mise au processus, le temps de repenser, par consensus, le processus dans son ensemble.
Non au rétropédalage
Décidé à jouer au jusqu’au boutiste, le gouvernement togolais ne baisse pas la voix. A travers son porte-parole, Gilbert Bawara, la majorité présidentielle a laissé entendre qu’il n’y aura ni report du recensement, ni un redécoupage électoral. Pour lui, le train est déjà mis sur les rails et continuera son trajet jusqu’au terminus. Car, explique t-il, dans une interview accordée au site d’informations afrikastrategies.fr, la participation ou non de la coalition des 14 partis de l’opposition au processus électoral en cours, n’aura aucun impact sur la qualité des élections. Puisque, soutien Gilbert Bawara, le Togo dispose, à ce jour, de l’un des systèmes électoraux les ‘plus innovants’ qui consacrent des avancées et des garanties solides pour des élections équitables, crédibles et fiables, depuis la composition et le fonctionnement de la CENI à la proclamation des résultats.
Le 20 décembre… en pointillé ?
Voilà un nouvel élément sujette à caution qui relance les débats sur le problématique consensus souhaité par la Cedeao en début de facilitation. Aujourd’hui, tout est clair que pouvoir et opposition sont loin de parler le même langage, encore moins se mettre d’accord sur une même démarche, dans le cadre du processus électoral. D’où la frustration, voire l’énervement de la C14 qui, dans la posture de «l’impuissant» devant le «Faure» qui déroule seul et comme bon lui semble le calendrier, en appelle à l’intervention de la Cedeao pour mettre fin à ce qu’elle appelle la mascarade. Et à cette allure de ping-pong, bien que les membres de la C14 se préparent à rejoindre la Ceni, on se demande encore si la date du 20 décembre reste objectivement tenable, tant les pesanteurs sont énormes.
Heureusement qu’un des représentants des facilitateurs a déjà admis lors de la dernière réunion du comité de suivi qu’on ne saurait faire dans le fétichisme au sujet des dates annoncées pour le processus. La priorité étant d’abord l’efficacité et le réalisme avait-il souligné.
Cyrille Pessewu
Source : Fraternité