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Les réformes politiques seront-elles opérées avant la prochaine présidentielle ? Telle est la question sur les lèvres de bon nombre de togolais, au regard des débats politiques en cours dans le pays depuis quelques mois. Les discussions en commission à l’Assemblée nationale sur une proposition de loi portant réformes politiques, sont bloquées.

 

Le parti au pouvoir (Union pour la République/ UNIR) et l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC, principal de l’opposition) étant à couteaux tirés sur la disposition relative à la limitation de mandat présidentiel (10 ans au plus) et les deux camps se rejettent la responsabilité. Dans l’actuelle constitution, le mandat présidentiel n’est pas limité.

 

Pour les députés de l’ANC, le texte prendra immédiatement effet, une fois adoptée. Exigence qui vise le président Faure Gnassingbé élu en 2005 et réélu en 2010. En terme clair, les députés de l’ANC tentent de bloquer la route à Faure Gnassingbé pour une nouvelle candidature au prochain scrutin. Attitude qui n’est pas du goût de leurs collègues du parti au pouvoir pour qui, le compteur doit être remis à zéro, après le vote du texte.

 

Approchée par l’Agence Savoir News Me Isabelle Améganvi (deuxième vice-présidente de l’ANC) revient largement sur le sujet. Elle n’a pas manqué de placer quelques mots, suite aux récentes sorties du président du MRC (Mouvement des Républicains Centristes) Abass Kaboua.

 

Savoir News : Sans rentrer dans le rappel de tout ce qui s’est passé lors des discussions à l’Assemblée nationale, quelle porte de sortie aujourd’hui pour que la proposition de loi portant réformes politiques, soit adoptée ?


 

Me Isabelle Améganvi : C’est trop facile pour UNIR qui est pouvoir depuis plus de 50 ans, de rejeter la responsabilité de la non effectivité des réformes sur l’ANC qui est un parti d’opposition créé en 2010. Je crois que dans notre pays, il faut que nous soyons responsables et que nous prenions chacun en ce qui nous concerne, des actes que nous posons.

 

De 2006 à 2015, le Chef de l’Etat a joué au dilatoire pour que ces réformes ne soient pas réalisées.

 

Nous sommes conscients qu’il s’agit d’une mise en scène, c’est pour cela que nous avons pris la responsabilité d’introduire une proposition de loi ensemble avec les collègues de l’opposition parlementaire notamment le CAR et l’ADDI, et de la même manière les artifices ont été trouvées encore pour bloquer les choses.

 

En fin de compte, ce que veut UNIR aujourd’hui, c’est de mettre dans le plateau d’une balance les réformes sur lequel le consensus a été trouvé — puisque nous avons tous signé l’APG en 2006 —et de mettre le prétendu problème de la candidature de M.Faure Gnassingbé sur l’autre balance et faire en sorte que les deux balances soient équitables. Or quand nous signions l’APG en 2006, nous n’avions pas dit que nous devrions assortir la réalisation des réformes avec le règlement de la candidature de qui que ce soit.

 

Et donc nous notre position à l’ANC, est simple : c’est l’APG qui demande à ce que les réformes se fassent puisque vous savez bien qu’en 1992 lorsque nous avions adopté la constitution togolaise à plus de 98% de la population togolaise, la limitation de mandat qui est l’un des problèmes lié à ces réformes et le mode de scrutin à deux tours y figuraient.

 

C’est lorsque les députés du RPT (actuelle UNIR) se sont retrouvés tout seuls à l’Assemblée nationale qu’ils ont pu devoir sauter le verrou de la limitation de mandat et changé le mode de scrutin à un seul tour, pour permettre à l’époque à Eyadéma Gnassingbé, de rempiler comme le font habituellement les dictateurs africains.

 

Donc il est clair que l’ANC ne porte aucunement la responsabilité de l’échec des discussions. Il faut se poser la question de savoir à qui profite le crime : la non-réalisation des réformes.

 

C’est UNIR qui n’a pas intérêt à ce que ces réformes se réalisent pour que le Chef de l’Etat actuel (qui est le responsable de ce parti) puisse se maintenir à vie au pouvoir. Donc lorsque vous aurez à répondre à la question à qui profite le crime, vous aurez compris que l’ANC ne peut pas être responsable de l’échec de la réalisation des réformes. Nous, nous sommes légalistes en disant que les réformes doivent être réalisées. En ce qui concerne la candidature de M.Faure Gnassingbé, il y a une institution qui s’en occupe : c’est la Cour Constitutionnelle. Et c’est comme cela que le problème s’est posé au Sénégal, et les sénégalais l’ont réussi.

 

Q : L’ANC accepterait-elle l’intervention des « canaux extérieurs » en vue des concessions notamment sur le point qui fait bloquer les choses : la candidature de Faure Gnassingbé ?


 

R  : Je crois que ce que vous appelez les « canaux extérieurs » ou +la communauté internationale+ je suppose est déjà intervenue dans ces débats. Après le rejet par la majorité UNIR du projet de la loi envoyé par le gouvernement, le +Groupe des 5+ (composé des Ambassadeurs de l’Allemagne, des Etats Unis, de la France, de l’Union Européenne et le représentant Résident du PNUD au Togo) est intervenu pour que ces réformes soient réalisées.

 

Ils nous avaient dit avant l’organisation des législatives de 2007 d’aller à ces élections et qu’ils interviendraient pour que ces réformes soient réalisées après. Et donc la surprise a été générale lorsque le projet de loi a été rejeté en juin.

 

Donc, ils ont sorti un communiqué à la suite de celui publié par les églises notamment l’église catholique, évangélique presbytérienne et méthodiste sur l’importance de la réalisation des réformes constitutionnelles avant la présidentielle de 2015.

 

Il en est de même pour la société civile qui s’est battue pour que ces réformes puissent se réaliser. Donc la communauté internationale est intervenue et intervient dans ce débat. Elle fait son possible dans les crises dans les pays. Au niveau de l’ANC et de CAP 2015, nous ne nous trompons pas, les togolais doivent se battre comme l’ont fait les autres peuples notamment les sénégalais et les burkinabè pour que ces réformes puissent se réaliser.

 

Il revient maintenant au peule togolais de prendre ses responsabilités face à l’intransigeance du régime au pouvoir UNIR pour que ces réformes puissent être réalisées.

 

Q : M. Abass Kaboua (membre du CAP 2015) est monté au créneau à plusieurs reprises ces derniers. Il a traité Fabre de « cafard ambitieux », de « rancunier », qu’il « n’est pas rassembleur » et qu’il « ne peut pas être Chef d’Etat » etc… Que répondez-vous ?


 

R : Vous savez d’où nous venons. On était à l’UFC (Union des Forces de Changement) avant et aujourd’hui compte des problèmes, nous avons pris sur nous de créer l’ANC et de nous battre aux côtés du peuple togolais. Dans nos statuts et dans notre règlement intérieur, nous faisons de la morale, le socle essentiel du combat que nous menons. Nous estimons également que les insultes et les injures en matière politique constituent l’arme des faibles. Et donc, nous ne nous lançons pas dans ce débat.

 

Nous savons que les populations togolaises ne sont pas dupes. M. Abass Kaboua n’a pas seulement traité M. Jean Pierre Fabre d’ambitieux, de rancunier etc… Il a dit d’autres choses sur lesquels, je ne veux pas revenir.

 

Moi mon problème, c’est que le peuple togolais puisse se mobiliser pour reprendre sa destiné en main et faire en sorte que le joug de la dictature dans lequel il se débatte depuis des années, puisse arriver à sa fin.

 

Si certains estiment qu’ils peuvent régler les problèmes par les insultes, c’est leur choix. Moi je ne veux pas rentrer dans ce débat, parce que je n’ai pas de temps à perdre. Beaucoup de chantiers sont sur la place et les ouvriers pour pouvoir les réaliser, on les compte sur le bout des doigts. Je n’ai pas vraiment le temps de répondre à ces insultes, il faut passer outre et continuer de se battre.

 

Je ne pense pas que les injures et les insultes vont régler quoi que ce soit. L’ANC adoptera la position sans commentaire. FIN

 

Propos recueillis par Ahmed MAESTRO

 

source : Savoir News

 

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