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Des grenades lacrymogènes lancées depuis des vedettes de la Marine postées sur la mer, des tirs de gaz et de balles blanches à bout portant sur les journalistes…


Certains croiront à une fiction ; mais c’est ce qui s’est passé hier sur le Boulevard du Mono. En effet à l’appel de huit (08) organisations de la presse, notamment le Syndicat des journalistes indépendants du Togo (Synjit), l’association Journalistes pour les droits de l’homme (Jdho), le Réseau africain des journalistes sur la sécurité humaine et la paix (Rajosep), le Syndicat des agents de l’information, techniciens et journalistes des organes publics (Saintjop), SOS Journaliste en danger, l’Observatoire des médias pour la démocratie et la bonne gouvernance (Omdg), l’Association des journalistes sportifs du Togo (Ajst) et l’Association des médias pour le progrès (Mediaction), les journalistes devraient observer un sit-in sur le Boulevard du Mono, en face de la Présidence de la République. Pour réclamer la relecture ou le retrait pur et simple de la nouvelle loi liberticide et inconstitutionnelle de la Haute autorité de l’audiovisuel et de la communication (Haac) votée le 19 février dernier par les députés Rpt/Unir-Ufc. Mais la manifestation n’a pu avoir lieu comme prévue. Mieux, elle a été réprimée avec une rare violence qui laisse pantois.


Comme il fallait s’y attendre, très tôt le matin, une horde de policiers et de gendarmes a été détachée pour empêcher le sit-in, brandissant un courrier du Président de la délégation spéciale de la Commune de Lomé, le Contre-amiral Fogan Adegnon, interdisant la tenue de la manifestation en face du Palais de la présidence de la République. Les discussions n’aboutissant pas, les journalistes décidèrent alors de se replier vers la plage. Mais à peine ont-ils commencé à s’asseoir que les agents de répression ont ouvert les hostilités. Les grenades lacrymogènes et les balles en caoutchouc étaient tirées sans ménagement dans le tas, les manifestants poursuivis dans le sable à la plage par les agents qui escaladaient les cordes des pêcheurs en train de tirer leurs filets. On déplore trois (03) blessés, dont un cas grave, celui du confrère Younglove Egbeboua Amavi, ancien journaliste à la Tvt et Secrétaire général du Saintjop, sérieusement atteint à la mâchoire. Conduit au CHU Sylvanus Olympio, les médecins traitants ont diagnostiqué une « fracture de la mandibule et de graves lésions dans la bouche». Son état nécessitait une opération chirurgicale, mais elle n’a pu se faire, faute de scanner !


Même dans la débandade, « certains éléments formellement identifiés ont tiré à bout portant sur les journalistes », déplore dans une déclaration rendue publique hier dans la soirée au cours d’une conférence de presse à la Maison de la Presse, la Synergie des organisations de presse qui exige des « sanctions disciplinaires exemplaires » à leur encontre. Interdit même de porter assistance aux blessés. Une journaliste qui tentait de secourir sa consœur de la Rtds, Yolande Lovi, tombée en syncope sous l’effet du gaz lacrymogène, a été bousculée par les agents. C’est à croire qu’ils avaient reçu des consignes fermes d’en finir avec les journalistes. La Synchronie y voit justement une « intention manifeste de porter atteinte à l’intégrité physique des journalistes ». Et on ne peut pas moins s’en convaincre lorsqu’on sait que la marine a été aussi engagée dans la répression.


En effet – cela va sans doute ahurir certains -, deux vedettes de la marine togolaise ont été déployées et lançaient depuis la mer des grenades lacrymogènes sur les journalistes qui fuyaient les tirs des gendarmes et policiers positionnés sur le Boulevard du Mono vers l’océan. L’une de ces grenades serait même tombée dans l’enceinte de l’Hôtel Ibis où se trouveraient à cet instant précis des élèves du Lycée français de Lomé. Les journalistes étaient donc pris entre deux feux. La Synergie parle d’« opération terre-mer ». « Incroyable», « extrêmement grave », s’est écrié le président de SOS Journaliste en danger, Ferdinand Ayité, qui explique cette violence inouïe par la réussite de l’opération « journée sans presse » de mardi et « Togo en rouge » du lendemain. Ce succès, le pouvoir l’a vécu comme un affront, vu que les grands moyens ont été déployés pour saboter le mouvement – des confrères auraient reçu 100 000 FCFA pour paraitre exceptionnellement ce mardi.


Un simple sit-in de journalistes réprimé avec autant de violence et de moyens ?! Il faut avouer que c’est un palier qui a été franchi dans la répression des manifestations publiques au Togo. Voilà qui apporte de l’eau au moulin du Parti socialiste français qui parlait dans un communiqué du 13 février dernier, de « démocratie bafouée » au Togo. Une sortie qui avait causé des démangeaisons intellectuelles au sein du sérail. Malgré la violence de ce jeudi, la détermination des journalistes à continuer la lutte pour la relecture du texte ou le retrait pur et simple de la loi liberticide votée le 19 février dernier, reste intacte. Ils sont conviés à une assemblée générale cet après-midi à partir de 14 heures pour décider des actions ultérieures à mener.


Tino Kossi


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