Le sommet sur la sécurité et la sûreté maritimes et le développement en Afrique a refermé ses portes ce samedi 15 octobre, avec la signature de la Charte tant attendue, à la grande satisfaction de Faure Gnassingbé qui en rêvait depuis des mois. La joie aurait pu être complète ; mais elle est remise en cause par la prestation diaboliquement pitoyable de Komi Selom Klassou sur la chaine de télévision Vox Africa, au cours d’une émission débat initiée en marge du sommet. Le Premier ministre n’était pas du tout à la hauteur, maîtrisait à peine les sujets et faisait la honte de bien de téléspectateurs qui n’arrivaient pas à contenir leur dépit, surtout que l’on se trouvait sur une chaine câblée, et avec des journalistes internationaux à l’animation.
Français terre à terre, divagation, non maîtrise des sujets…
On le connait très professionnel en lecture de motions dans sa jeunesse, et aussi très griot dans ses discours à ses rares sorties des locaux de la Primature, avec des « sur instructions personnelles du Chef de l’Etat », « grâce à la magnanimité du Président de la République » à n’en point finir. Mais ses qualités s’arrêtent là. Komi Selom Klassou n’est du moins pas fait pour un débat. Cela au moins, le sommet sur la sécurité maritime l’aura mis en exergue. Quand il « ouvre sa bouche », les dégâts sont énormes.
C’est le cœur lourd que les Togolais ont suivi le jeudi 13 octobre dernier, leur Premier ministre sur le plateau de la chaine télé panafricaine Vox Africa, au cours d’une émission débat spéciale initiée et animée par Alain Foka de RFI, entouré d’Amobe Mevegue d’Ubinews, Jules Admoche de Vox Africa et Séverin Tchounkeu, d’Equinoxe Télévision. Que ce soit le sujet de la sécurité maritime ou les questions relevant de la gouvernance locale, le Premier ministre aura fait preuve d’une incroyable vacuité, se fourvoyant dans des approximations et des réponses génériques, divagant énormément, faisant de la phraséologie. Ballotté par les animateurs qui se sont visiblement documentés beaucoup sur le Togo, il ne se réfugiait que dans des propos du genre « ce sont des statistiques erronées », ignorant que les données reprises par les confrères étaient celles produites par la Banque africaine de développement (BAD), un des partenaires financiers de premier plan du Togo. Le plus cocasse, il n’est jamais parvenu à donner des chiffres officiels et vrais pour confondre ses interlocuteurs. Le Premier ministre n’arrivait pas à définir le HCRRUN et autres sigles, se contentant de les lancer.
Son Excellence Komi Selom Klassou a presté comme le commun des Togolais, on ne dirait pas le Premier des ministres et Chef du gouvernement censé maitriser les choses. Tout donnait l’air d’un martien qui parle du Togo. Il est peut-être détestable pour sa condescendance, son manque retentissant de respect pour ses interlocuteurs – même les éminents docteurs – et les citoyens, mais un Arthème Ahoomey-Zunu ferait une bien meilleure prestation que le natif de Notsè. Lorsqu’on descend à un niveau inférieur, Gilbert Bawara fait souvent l’unanimité contre sa personne pour son goût pour les propos à la limite de l’incivilité, mais il se serait démené sur ce plateau que Son Excellence Monsieur le Premier ministre et aurait même embobiné ses interlocuteurs. Que dirait-on d’un certain Pascal Bodjona, l’ex-mégaphone du pouvoir ? Mais perdu dans des réponses génériques, Komi Klassou se rappelait tout de même de planter des « sous l’impulsion du Président de la République » et quelques louanges à l’endroit de son bienfaiteur.
« L’agonie de Selom Klassou sur Vox Africa », voilà un titre d’un confrère qui résume la prestation du Premier ministre, qui a fait preuve d’un amateurisme affligeant sur bien des questions. Certains de ses propos amusaient même les animateurs qui, visiblement, se délectaient de ses perles. C’était manifeste dans les sourires chez les uns, le renfrognement de la mine chez d’autres en signe d’insatisfaction. L’un des animateurs est allé jusqu’à dire à Son Excellence Monsieur le Premier qu’il les mène en bateau. « Monsieur le Premier ministre, vous semblez faire la diversion… », lui a flanqué un autre. Beaucoup de téléspectateurs se sont sentis humiliés, vu qu’il prestait sur une chaine panafricaine câblée. En plus de divaguer et raconter des devinettes, le Premier ministre aura été d’un niveau de la langue de Molière assez élémentaire, pour une personnalité (sic) de son rang, qui plus est professeur aux universités du Togo, parlant de bic en lieu et place de stylo que lui recommanderait le langage courant ou même d’écritoire ou de plume (niveau moyennement soutenu), et d’« ouvrir sa bouche », pour dire parler. Ce n’est vraiment pas agréable quand Klassou « ouvre sa bouche »…
Un fond d’une pauvreté éblouissante
Alain Foka – parfois même on entendait le PM dire Fokar quand il s’oblige à prononcer le nom du confrère – et les siens devraient certainement regretter d’avoir eu pour ce débat Komi Klassou, pour la pauvreté éclatante de sa prestation. Cela fera sans doute dresser des cheveux sur des têtes, mais pour être franc, la mention médiocre ne suffirait pas pour l’apprécier. Les plus sévères le disent mériter un « moins 10 » !!! Qu’à cela ne tienne, Son Excellence Monsieur le Premier ministre aura séduit (sic) les Togolais par la tristesse du débat fourni. Sur la plupart des sujets abordés, il n’a apporté que des réponses génériques, manquant de profondeur, et certaines fois ridicules.
En tant que chef du gouvernement, il était au centre de l’organisation du sommet et on devrait le croire bien outillé sur la problématique de la sécurité et de la sûreté maritimes. Mais le Komi Klassou a suffisamment montré qu’il a un niveau de connaissance à peine au-dessus de celle du commun des citoyens. Aucune maitrise de la question, et c’était écœurant, vu que le Togo était le pays hôte et ses dirigeants ont pratiquement harcelé les présidents des pays du continent pour être au rendez-vous de Lomé.
Sur les questions éminemment togolaises, pas de maîtrise non plus. A en croire Komi Selom Klassou, toutes les dispositions déclinées (dans l’APG, Ndlr) à ce jour ont été respectées. Etait-ce l’effet d’un trou de mémoire ? C’était à croire que depuis le 20 août 2006, l’homme était en expédition sur la Lune et n’a pas eu la chance de s’informer de ce qui se passe sur la Terre et notamment au Togo. Il faut le dire, même à Kpedomé, une localité proche de Notsè, on sait que l’essentiel de cet accord, à savoir la mise en œuvre des réformes constitutionnelles et institutionnelles, se fait toujours désirer. « Il y aura une commission », s’est contenté de dire le PM, faisant allusion à l’atelier du HCRRUN qu’il a eu tout le mal du monde à définir. Aidé par Alain Foka, il lui suggère tout simplement de prendre la nationalité togolaise pour sa maitrise des sujets d’ordre togolais. Les Togolais ne le savent peut-être pas ; dans la conception de Komi Klassou, la société civile accompagne le gouvernement et mérite qu’on lui « jette la fleur ».
Sur le plan économique, le Premier ministre a bien évidemment chanté le refrain d’amélioration du climat des affaires, évoquant à l’appui le rapport Doing Business, nom de la structure de la Banque Mondiale dont il n’est pas arrivé à se souvenir – il a fallu que l’un des animateurs le lui souffle. Interrogé sur la politique développée par son gouvernement pour promouvoir les investisseurs locaux, Selom Klassou fait une fixation sur Gervais Djondo, la tête pensante de la compagnie panafricaine Asky, ne disant rien qui puisse ressembler à une bribe de réponse à la question à lui posée. En termes d’appui financier aux jeunes pour booster les initiatives privées, notre Premier ministre a brandi le fameux FNFI (Fonds national de la finance inclusive) de Dame Victoire Dogbé comme un fonds de garantie. Le summum de la pitrerie aura été enregistré lorsqu’interpellé sur la construction des grands marchés de Lomé et de Kara brûlés en janvier 2013, il a laissé entendre que le gouvernement compte sur les retombées de l’économie bleue pour ce faire.
Il ne fait pas bien d’interroger Klassou sur le Wacemgate, du nom du scandale de l’évasion fiscale dont se rendent coupables les responsables de la société de cimenterie Wacem. Monsieur le Premier ministre, détenez-vous des actions au sein de la société ? Telle était la question simple et intelligible à lui posée par l’un des journalistes ; mais la réponse était des plus cocasses. « Certaines presses à sensation ont voulu tout simplement propager, je ne sais à quelle fin…Mais sur cette question et pour le moment, j’ai préféré ne rien dire. Le jour où Klassou va ouvrir sa bouche sur cette question, vous comprendrez que comme je l’ai dit, on peut ne pas aimer une personne, mais il faut voir ce qu’elle fait. Je suis un citoyen comme tout le monde, mais je vous assure que ceux-là mêmes qui ont pris leur bic pour écrire, lorsqu’on parlera de moi, celui que je suis, je suis plus propre qu’eux », a-t-il bredouillé. C’était à croire que Monsieur le Premier ministre et les journalistes qui ont révélé le scandale se sont connus dans le monde des affaires louches et il aurait expérimenté leur impureté et leur malhonnêteté, victime d’escroquerie de leur part comme on accuse Bertin Agba de l’avoir fait à l’Emirati Abbas al Youssef dans la fameuse affaire qui a servi à coincer Pascal Bodjona, ou partagé avec les journalistes en question les dividendes et autres gestes intéressés qu’il aurait perçus dans Wacem…On n’avait pas besoin de toute cette dissertation en réalité. Un oui ou un non aurait suffi. Même s’il s’est fait violence pour ne pas répondre à cette question simple, on l’a tout de même compris. Mais, quand Klassou sera décidé à parler, le monde va-t-il trembler ?
Ils étaient très nombreux, les Togolais à croire que ces journalistes internationaux convoyés à Lomé y étaient pour vanter le sommet et faire la promotion du pouvoir en place. Mais bien de spectateurs ont été agréablement surpris par la maitrise des sujets abordés et la perspicacité d’Alain Foka et les siens. Au-delà de la question principale, l’émission était une sorte de bilan de son action à la tête du gouvernement. Certains observateurs avertis voient justement dans la maltraitance (sic) faite au Premier ministre par les journalistes, avec les questions pointues à lui posées, une sorte de mission secrète à eux confiée par qui on peut deviner, pour mettre en exergue ses limites et offrir le prétexte idéal pour le catapulter de la Primature. Ceci pourrait expliquer cela…En tout cas, les jours, semaines ou mois à venir nous situeront, surtout que les indiscrétions annoncent un grand ménage post-sommet au gouvernement. En attendant, sa prestation aura été rachitique, au point que même les JMP (journalistes en mission pour le pouvoir) manquent de mots et d’arguments pour le défendre, et il est la risée des internautes sur la toile et dans bien de plateformes Whatsapp. Mais certains de ses rares admirateurs expliquent sa prestation écœurante et avilissante par…l’émotion.
Source : Tino Kossi, Liberté / 27avril.com