Lorsque l’exécution d’un projet financé par la Banque Mondiale révèle des tonnes de pesanteurs, il est presque certain que les objectifs ne seront pas atteints à l’heure du bilan. D’un montant de 15 millions USD, soit près de 8 milliards FCFA, le PDGM, Projet de développement et de gouvernance minière a été signé le 29 janvier 2016, mis en vigueur le 3 mars de la même année et lancé officiellement le 9 août 2016. Il a une durée de 5 ans et prendra fin le 31 Décembre 2020, sauf prorogation. Mais si prorogation il devrait y avoir, ce ne sera pas au-delà de mars 2021. Seulement, et même dans ce cas, il semble certain que le Togo sera facturé à 0,75% du décaissement qui ne sera pas effectué à la fin du projet. A quatre mois de la date butoir, l’Etat togolais a-t-il fait sa part en versant sa quotité de 20 millions annuel durant la durée du projet ? Le pays est à la recherche de financements, mais lorsque des structures sont incapables de consommer le budget alloué, il arrivera un moment où les bailleurs ne prendront plus au sérieux les besoins exprimés du pays. La démarche participative adoptée par les bailleurs ne souffre d’aucune critique ; par contre, la lenteur des décaissements de l’Etat relevée dans le rapport est inexplicable et rien ne garantit qu’un autre rapport de fin de projet sortira pour situer les responsabilités. Comme toujours, malheureusement.
Rappelons d’abord que le PDGM est scindé en trois composantes :Composante A : Gouvernance, transparence, suivi et efficience du secteur minier qui se décline en 6 sous-composantes ; Composante B : Développement environnemental, social et économique durable découlant des activités du secteur minier dont les sous-composantes ; Composante C : Gestion et coordination de Projet. Un Fonds de contrepartie d’un montant de US$ 200 000 soit FCFA 100 000 000 devrait être mis en place par le Gouvernement à raison de FCFA 20 millions par an pour couvrir les indemnités des séances de travail et visites de site, les frais de transport et les autres dépenses des divers Comités mis en place.
Au 30 Octobre 2018, le taux global de décaissement du Crédit est de 20,70% après 2,7 ans d’exécution.Il a été relevé un non-décaissement régulier des fonds de contrepartie par la partie togolaise. En effet, les engagements du gouvernement de verser un montant de 200 mille USD, soit 100 millions FCFA, à raison de 20 millions par an pour couvrir les indemnités des séances de travail et visites de site, les frais de transport et les autres dépenses des divers Comités mis en place, n’ont pas été tenus. Seuls 20 millions FCFA ont été déboursés depuis le début du projet jusqu’à ce jour au point que depuis mars 2018, les indemnités des membres de ces divers Comités n’ont plus été honorées engendrant une démotivation qui accentue les retards des livrables aux conséquences néfastes pour le projet.Dans l’accord de financement, l’Etat togolais doit s’acquitter de 0,75% sur les fonds non consommés.
Il y a lieu de noter qu’à la validation du Rapport Provisoire en Janvier 2019, le taux global de décaissement a connu un accroissement encourageant s’élevant à 27,07%.
A l’issue de l’évaluation à mi-parcours, nous pouvons résumer les forces et faiblesses du PDGM comme suit :
Points Faibles du PDGM
▪ Simplicité complexifiée dans la conception du Projet entraînant confusions, difficultés d’interprétation et retard dans sa mise en œuvre ;
▪ Activités des sous-composantes non clairement définies offrant un champs ouvert à toute interprétation des activités à mener ayant pour corollaire des arbitrages difficiles et des frustrations des bénéficiaires ;
▪ Multiplicité des acteurs en déphasage avec le nombre et les compétences en ressources humaines au sein de l’UEP ;
▪ Caractère transversal du Financement du PDGM ayant émoussé quelque peu le degré d’appropriation et d’adhésion du MME au projet en ce sens que certaines priorités du département n’ont pas pu être prises en compte dans le PDGM ;
▪ Ancrage institutionnel présentant une caractéristique hybride peu orthodoxe entraînant un leadership équivoque du projet ayant pour corollaire la lenteur dans les prises de décision et une faible marge de manœuvre de l’UEP ;
▪ Chronique déficit du MME en personnel affectant négativement les chances de succès du Projet. Selon la Banque mondiale, « L’insuffisance de personnel au niveau du MME et particulièrement à la DGMG a contribué au faible progrès de la mise en œuvre des activités. De même, ce problème constitue un risque pour la pérennisation du projet» ;
▪ Longs délais d’obtention des avis de non-objection -ANO- de la Banque mondiale pouvant aller jusqu’à 48 jours calendaires alors que la norme admise est de 15 jours calendaires ;
▪ Faible taux de décaissement (20,70%) dû essentiellement aux importants retards dans toutes les étapes d’exécution du projet et la complexité de sa mise en œuvre ;
▪ Non-décaissement régulier des fonds de contrepartie qui devient une véritable menace pour la motivation des membres des Comités de Pilotage ayant pour conséquence des retards dans les livrables des sous-composantes y relatives ;
▪ Problème de disponibilité et de mobilité de certains membres du Comité de Pilotage ;
▪ Longs délais dans le processus de passation des marchés. Pour le recrutement des Consultants (sélection fondée sur la qualité des coûts) exigeant l’accord préalable de la Banque mondiale, la durée a été pour le marché « EESS » jusqu’à 659 jours de l’approbation du PTBA jusqu`à la signature du contrat par le Ministre de l’Economie et des Finances. Il en est de même pour la sélection du Consultant Individuel (sans contrôle préalable de la Banque mondiale) où la durée est allée jusqu’à 393 jours pour le marché «Enquête de perception des acteurs locaux sur l’amélioration des impacts environnementaux »;
▪ Longs délais d’approbation des contrats par le ministère de l’économie et des finances-MEF-
▪ Problème de disponibilité de crédit (attestation de disponibilité de crédit) ;
▪ Menace de pérennisation des sous-composantes A1(Cadastre minier et base de données géologiques nationales), A2(Services de conseil sur les transactions), A6 (Gestion de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle) et B2 (Gestion environnementale et sociale des opérations minières) en raison des problèmes institutionnels et organisationnels du MME ;
▪ Menace de pérennité de la sous-composante A3 en particulier « la modélisation fiscale » en ce sens qu’elle est paramétrée seulement sur l’or dont la production pour l’heure, est vraiment marginale au Togo. Le modèle n’a pas pu s’adapter ni aux phosphates ni aux autre minerais et est à l’heure actuelle non opérationnelle ;
▪ Redondance de la sous-composante A5 (Renforcement des structures de gouvernance des Entreprises Publiques (EP) du secteur minier) avec les sous-composantes A4 (Développement organisationnel du MME) et B2 (Gestion environnementale et sociale des opérations minières et soutien des plateformes de développement communautaire). Elle devrait donc être supprimée et la fondre dans la sous-composante B2 pour toute question socio-environnementale et dans la sous-composante A4 pour les questions structurelles et financières dont pourrait bénéficier la SNPT en tant qu’entreprise publique ;
▪ Redondance de la sous-composante B3 (Retombées économiques en matière d’infrastructures du secteur minier) avec la sous-composante A2 (Services de conseil sur les transactions). La pertinence étant faible, cette sous-composante n’a connu aucune activité depuis la mise en vigueur du projet. En réalité, les activités qui y sont prévues relèvent beaucoup plus de conseils et peut par conséquent, s’intégrer dans la sous-composante A2 (Services de conseil sur les transactions).
source : Liberté Togo