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Qui ne sent pas la bombe cuite et le vertige comprimé n’est pas digne d’être vivant », prévient Antonin ARTAUD dans Van Gogh, le suicide de la société. Tous ceux qui brûlent les espérances collectives, leurs honneurs pour cuir un œuf creusent leurs propres tombes et s’exposent aux peuples, prêts à les y accompagner. Les faux- actes politiques qui flétrissent la destinée commune ouvrent à leurs auteurs grandement les portes de l’enfer. L’intelligence politique se double de prudence et, si possible, de renonciation. Le sommeil dogmatique, les choix sectaires des falots en politique dévalent des larves incandescentes sur tous ceux qui mènent le jeu des intérêts sordides au nom de la communauté.

 

Ce qui édifie la confiance entre les leaders politiques et la masse populaire, ce sont les fondements moraux, éthiques et humains des actes qu’ils posent. Ces leaders, de leurs choix, distillent une pédagogie par l’exemple. Dans les négociations, il est impensable qu’ils deviennent des moutons qui obéissent à des chiens ordonnés par des bergers qui, eux, s’orientent par des astres que personne ne voit. Pour se prémunir contre le précipice, la vigilance et la clairvoyance politiques commandent la responsabilité d’une suspension des négociations. Tous ceux qui se croient rusés pour passer outre l’alerte du gouffre politique donnée par des intelligences politiques de premier ordre doivent s’attendre à la foudre populaire parce que toutes les négociations politiques se déroulent au nom du peuple.
Il n’y a aucune faute politique, ni morale, ni éthique à s’ouvrir au dialogue lorsqu’une crise sévit dans une République en ce que le cœur du politique est tapissé de dialogue, de négociation. Toutefois, s’autoriser un assujettissement politique sans condition, sans lendemain au nom de la négociation est d’une gravité aux conséquences dévastatrices qui font perdre la représentativité populaire et les objectifs du combat politique. Le franc-jeu, la justice, l’équité, la garantie d’exécution des clauses de consensus sont les points cardinaux qui tiennent les négociations. Quand ils viennent à manquer dans les discussions, la supercherie est cathédrale et il vaut mieux choisir de quitter la chapelle obscure de la foi abîmée avant qu’elle ne soit hantée par des forces maléfiques et bêtes.
Ceux qui reprochent aux leaders actuels de l’ANC d’avoir participé aux négociations entre l’UFC et le RPT avant de se rebiffer pour fonder un nouveau parti sont étonnamment d’une platitude conceptuelle à confondre négociation et subordination. En matière de justice commutative quand les termes des échanges sont fort déséquilibrés, le bon sens ordonne les esprits mûrs de refuser l’escroquerie planifiée qu’une partie veut imposer à tout prix dans un contrat de dupes.

 

La raison est dans l’histoire et ce sont les peuples qui la font. Aujourd’hui, le capital humain de l’UFC, transfiguré et drastiquement séché, est dans une migration salutaire pour constituer une nouvelle force politique qu’animent ceux qui ont réfugié l’esclavagisme politique et la raide subordination à un « gourou politique » en mal d’inspiration. Les grandes erreurs politiques ne sont jamais pardonnables. Il vaut mieux de les assumer et entreprendre de les dépasser au lieu d’organiser une guérilla politique entre les grandes réussites des illuminés de l’histoire. Sans la reconnaissance de ses propres fautes, sans l’humilité, il n’y a pas de cerveau politique. Quand le cœur d’un peuple est blessé, les coupables doivent trouver des ressources morales pour l’apaiser au lieu d’organiser des représailles puériles contre des coupables imaginaires.

 

Au nom de quel principe on n’exige rien des clauses d’un contrat dûment signé qu’on laisse épuiser dans la durée avant de se réveiller pour culpabiliser de trahison ceux qui ont eu l’intelligence de refuser la caution à la supercherie contractuelle ?
Peut-on être extrémiste en refusant la compromission, l’indignité, la récitation de perroquet d’un chef de parti ?

 
1) Des héros malgré eux
 

Toutes les grandes ambitions collectives dont les leaders ont un mandat s’assument dans la droiture, l’honnêteté intellectuelle, la rigueur logique et dans l’humanité. Personne ne peut jouer avec la foi d’un peuple sans en payer le prix. La tragédie de la légèreté habite ceux qui s’improvisent dans une farce immonde combattants de la liberté. Ils sont plutôt dans la soif des jouissances et s’engouffrent à corps perdu dans toutes les brèches d’opportunisme. Ces personnages obscurs ont toujours hâte de grandir et sont prêts à tous les détours hasardeux, y compris la trahison pour se hisser au sommet de leurs ambitions éphémères dont la chute avec fracas est pourtant certaine. Car, l’appartenance à l’histoire est vite avortée lorsqu’elle perd les fondements moraux, éthiques et la vertu. Le précipice de l’histoire est au bout des chemins étroits d’emprunt et sans honneur parce que la sentence populaire est implacable entre les gribouilleurs contractuels et politiques.

 

L’esprit pointilleux, la clairvoyance et la dignité préservent tous les politiques qui s’en accommodent. Le dessèchement moral implique des avaries politiques. L’UFC en lambeaux paie ses imprudences, son avidité à prendre le pouvoir dans un partenariat peu orthodoxe et franchement irréaliste avec le monstrueux de l’intelligence, de la compromission sans l’audace d’un mécanisme de suivi encore moins, de rappel à l’ordre du contrat.

 

Comme « l’enfer, c’est l’absence des autres », selon les mots de Roger GARAUDY, l’UFC s’est précipitée dans le gouffre du désastre humain. Elle s’est effondrée dans une hémorragie humaine pour se déverser dans le prévisionnel d’un réceptable où les déçus font peau neuve avec une indépendance d’esprit, une originalité, une créativité, un nouveau cadrage de la lutte aux adhésions en cascades. L’ingéniosité de la grande dissidence tourne au triomphe majestueux de l’ANC (Alliance Nouvelle pour le Changement). L’esclavagisme politique ne fait pas de recettes parce que la conquête de la liberté demeure le socle du combat politique dans notre pays.

 

L’horizon politique de l’Opposition s’est vite recomposé de façon claire et nette avec une ascendance de la dissidence de l’Ufc. Les héros de la liberté remorquent avec eux la confiance du peuple qui n’a aucun prétexte à désirer l’esclavage politique d’un contrat faux et sans objet. L’UFC apprend à ses dépens que « L’histoire est composée de ce que les hommes font contre leur propre génie » comme l’écrit ALAIN dans sa Correspondance avec Romain ROLLAND. L’ostracisme immédiat qui s’est emparé de Gilchrist OLYMPIO prête à ce peuple une grande maturité. Il suit les principes, les valeurs et non les hommes. Il n’a aucune velléité de s’aliéner à des prête-noms. La gravité d’un choix est dans le supplice de la subordination. Les promesses de liberté de « Fo Gil » aux Togolais ont fondu dans le secret de la nuit et des rencontres isolées. L’ambition maladive d’un illusionniste s’est révélée au grand jour. L’homme de toutes les tempêtes politiques avant la dissidence à l’UFC s’est pendu dans la délinquance politique et n’a daigné réclamer un bout de morceau d’exécution des clauses de son partenariat. Cet homme est un fanfaron et son résidu de parti entreprend de se maintenir dans la ligne de la tempête dans un verre d’eau. Après avoir épuisé dans la durée un accompagnement piteux qui a aggravé la situation sociale, l’apparentement avec le pouvoir sans la moindre possibilité de réclamation des termes du partenariat n’a pas inspiré l’UFC à un examen responsable de conscience.

 

Le bouc-émissaire de l’échec de l’accord avec le RPT serait l’ANC, le groupe de dissidents qui a participé aux négociations, à qui on avait fait des promesses et qui a choisi de renoncer à tous les privilèges. Il faut être des honnêtes gens pour refuser de juteux postes de responsabilité par devoir de fidélité à un peuple, à une lutte. Le triomphe populaire de l’ANC fait très mal non seulement au pouvoir qui avait penser museler l’Opposition frondeuse dans un piège à cons, mais davantage à l’UFC qui n’a de ressource que dans la nuisance revancharde et le tapage médiatique contre les leaders de l’ANC après avoir essuyé une décrépitude négociée par naïveté.

 

Gilchrist OLYMPIO et l’UFC résiduelle vivent l’énergie du désespoir et se jettent dans une course écervelée sans jamais se rapprocher du podium de leur popularité d’antan. La grande campagne de mobilisation du parti a échoué et ses deux députés au Parlement nous démontrent l’extinction évidente du parti. La campagne de délation fait le relais d’une mobilisation impossible. Ce que Gilchrist OLYMPIO a oublié, c’est que personne ne parvient à tuer les héros de la liberté. Ce sont eux-mêmes qui se suicident dans le cœur des citoyens lorsqu’ils changent brutalement l’orientation des objectifs populaires dont ils sont porteurs. L’énormité du mémorandum de l’UFC résiduelle est comique en ce qu’il s’agit d’une véritable bassesse qu’approuve un homme de soixante- quinze ans. Prosper MERIMEE, homme politique et intellectuel français a vu juste dans sa Lettre à Mme MONTIJO en octobre 1847 lorsqu’il s’écria : « Il n’y a rien de si laid que la bassesse dans un vieillard ».

 
2) Les grandes absurdités d’un mémorandum
 

L’UFC résiduelle reconnaît à travers ce mémorandum que le contrat de mariage avec le RPT/UNIR est un échec indigeste, une courte vue, un apparentement bête qui expose à la face du monde l’esprit de supercherie qui a présidé aux négociations.
S’évertuer à trouver des coupables d’un accord aux mille échecs à travers une dénonciation calomnieuse de ceux qui ont refusé l’orchestration de la sottise à faire danser les couillons est encore une gravité de malhonnêteté.

 

Djovi GALLY qui a représenté l’UFC à la signature de cet accord a été le premier à reconnaître que le montage était absolument faux et que la plaisanterie étouffante de l’apparentement valait une dénonciation voire une rupture. Sa démission de la direction du parti annonçait le requiem d’un esclavagisme politique, une escroquerie contractuelle, une avarie d’intelligence qui ne pouvait nourrir aucune espérance collective. Le mémorandum a passé sous silence l’acte politique majeur de rupture de Djovi GALLY avec l’UFC sur la base d’un accord sans objet ou plutôt dont l’objet a tôt fait d’être en péremption. La nuisance politique de la démission de celui qui a représenté l’UFC et qui a signé l’accord pour le compte du parti est plus évidente que ceux qui ont refusé de s’y associer dans une liberté de conscience.

 

Le mémorandum de l’UFC résiduelle marque la fin de ses illusions parce qu’il survient après une lourde défaite électorale. Deux députés à l’Assemblée nationale avec un partenariat de gouvernance crié à tue-tête comme la paix des braves aux accents de MANDELA et de De KLERK a achevé de convaincre tout le monde que la faillite politique est le principal gain de Gilchrist OLYMPIO et ses suiveurs. Le vertige de l’échec se révèle dans un traumatisme perceptible dans les justifications oiseuses qui décrètent des culpabilités dans les rangs de la dissidence qui a refusé, dès le départ les fondements vaseux d’un péril d’accord qui visait à frapper la tête de proue de l’Opposition togolaise.

 

La vacuité du mémorandum est saillante en ce qu’il tient pour traîtres ceux qui ont été prudents au nom de l’éthique politique et de la morale pour refuser l’esclavagisme, la délinquance participative d’un bidule de contrat qui rompt avec toutes les réclamations sociales, la volonté générale d’une alternance politique. Si les dirigeants actuels de l’ANC avaient participé à toutes les discussions pour finaliser un accord et faire sortir ce pays de la crise, il est puéril de leur reprocher leur bonne foi. Mais, s’ils ont refusé de se fourvoyer dans la compromission pour travestir les objectifs du combat populaire, cette responsabilité ne souffre d’aucune faute politique, éthique, morale et humaine.

 

En réalité, l’objectif de ce mémorandum est manifestement une volonté de détruire l’ANC, ses leaders qui ont imposé à Gilchrist Olympio la dialectique du maître et de l’esclave. Comment peut-on accuser ceux qui ne sont pas comptables d’un accord politique de n’avoir rien fait pour en exiger les différences clauses ou de l’avoir noyé ? Il n’existe pas de délit de renonciation au supplice de la subordination pour proclamer les leaders de la dissidence comme des traîtres qui ont œuvré à faire échec à cet accord. Ceux que l’accord a engagé dans la co-gestion du pouvoir pratiquement en deux mandats du « petit » ont-ils réalisé les promesses proclamées, les objectifs déclarés ?

 

Le mémorandum de l’UFC exprime essentiellement une vérité : l’esprit revanchard d’un leader ahistorique qui tient à régler ses propres comptes au lieu d’appliquer la bonne raison à défendre les intérêts de notre peuple. Il n’a aucune connaissance de la psychologie des Togolais et manque, à travers la longue absence d’une assise sociale pour mesurer la puissance de la conscience collective qui sait lire les œuvres de grandeur. Le mythe longtemps véhiculé par la descendance de Gilchrist OLYMPIO s’est déjà brisé, consumé. Ce mémorandum vient disperser et faire disparaître les cendres. Il n’est d’aucun effet sur les Togolais. Bien au contraire, il vient salir davantage un homme profondément creux qui est déjà mort avant sa propre mort. Nous l’avons vu avec le pouvoir et il a oublié l’APG, les réformes qu’il nous a promises faire mettre en route dans six mois. Il est sous nos yeux dans Une autre vie de Joë BOUSQUET pour qui : « Celui qui a vu son semblable au plus bas de la déchéance n’a plus les mêmes yeux : il a détruit sans le savoir le mur qui séparait l’homme et son image ».

 

L’esclavagisme politique et le suivisme de mouton ne sont ni acceptables, ni tolérés pour ceux qui veulent grandir. Le discernement et la responsabilité élèvent les hommes à la maturité. Rien n’oblige un homme politique à flétrir son honneur et celui de son peuple dans un accord ou un traité politique sombre sans visibilité d’intérêt public. L’intelligence politique se distingue de la loyauté aveugle qui bénit toutes les dérives. Tous ceux qui sont lucides et indépendants d’esprit ont la force morale et le principe éthique de ne jamais succomber à l’autorité de délinquance qui tient à contraindre au lieu de persuader.

 

Le mémorandum éclaire les Togolais sur deux axes : le mal de vivre qui sévit à l’UFC résiduelle dans un traitement de consolation du pouvoir qui la met en situation de faiblesse et l’élévation politique des dissidents qui ont beaucoup de réussite en mobilisation, en résultats électoraux fort enviables. Ils sont célébrés dans leur ouverture d’esprit, dans leur capacité à négocier sans inféoder aux forces de l’assujettissement parce qu’ils ont une dignité à faire valoir et un peuple à défendre. Ceux qui trépassent leur imprudence et ceux qui ont refusé l’esclavage politique sont au triomphe populaire. CORNEILLE avait bien vu dans Le Cid que « Qui peut vivre infâme est indigne du jour ».

 

Didier Amah DOSSAVI
Chronique politique
L’Alternative N°306 du 25 février 2014

 

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