« Des élections crédibles, libres et équitables constituent une base solide pour la démocratie » (Healey Potani)
Au Malawi, le leader de l’opposition, Lazarus Chakwera, a remporté la nouvelle élection présidentielle organisée le 23 juin 2020. Avec 58,57% des suffrages exprimés, Lazarus Chakwera coiffe au poteau le président sortant Peter Mutharika qui n’aura pas droit à un second mandat. Ce dernier avait pourtant été déclaré réélu un an plus tôt lors du scrutin présidentiel du 21 mai 2019, mais annulé par la Cour Constitutionnelle pour cause de fraudes électorales massives.
Cette première élection avait été fortement contestée par l’opposition qui avait dénoncé de nombreuses irrégularités, notamment un nombre anormalement élevé de procès-verbaux de dépouillement corrigés avec du « Tipp-Ex », fluide correcteur blanc. Pendant plusieurs mois, Lilongwe, la capitale du Malawi vivra au rythme des manifestations de l’opposition qui exigeait de nouvelles élections et la démission de la présidente de la Commission électorale, Jane Ansah.
La Cour Constitutionnelle confirme, à la surprise générale, les fraudes électorales, estimant que les votes ont été falsifiés et que seulement un quart des procès-verbaux du vote avaient été vérifiés, ce qui aux yeux des juges, constitue un sérieux manquement portant atteinte aux élections. « Des élections crédibles, libres et équitables constituent une base solide pour la démocratie », a déclaré Healey Potani, président-juge du panel de cinq magistrats qui a présidé l’affaire.
Les juges ont également accablé la commission électorale estimant qu’elle a bafoué un certain nombre de procédures électorales telles qu’elles sont édictées dans la Loi sur les élections présidentielle et parlementaire et la Constitution du Malawi. La Commission électorale a été d’ailleurs contrainte de payer les frais judiciaires de l’opposition. Fait inédit au Malawi.
La victoire de l’opposition confirme la maturité démocratique du Malawi. Le nouveau président élu, Lazarus Chakwera a laissé entendre que c’est une victoire pour la démocratie et la justice. Bien que dénonçant des fraudes, le président sortant Peter Mutharika a appelé à l’unité et au calme et demandé à ses concitoyens de respecter le nouveau président.
Ç’aurait été dans d’autres pays à l’instar du Togo que la Cour Constitutionnelle aurait balayé d’un revers de la main les nombreux recours déposés par l’opposition et confirmé à la virgule près les résultats proclamés par la Commission électorale. Ça a toujours été ainsi au Togo. Les institutions impliquées dans l’organisation des élections dans notre pays sont toutes sous les bottes du régime en place. La Commission électorale nationale indépendante qualifiée de « machine à fraudes » et la Cour Constitutionnelle sont assujetties au pouvoir. Sans oublier le ministère de l’Administration territoriale et les autorités locales et coutumières qui sont tout autant impartiaux. Du coup, les scrutins sont toujours biaisés, frauduleux.
Lors de la dernière élection présidentielle du 22 février au Togo, on a assisté à un improbable exercice de gymnastique institutionnelle où la Cour Constitutionnelle avait rendu publique deux décisions : la première, en modifiant sans autre forme d’explication les chiffres fabriqués par la CENI (les nombres d’inscrits et de votants ont été gonflés et le nombre de suffrage réduit) ; la seconde, en validant les chiffres provisoires de la CENI.
Un étonnant jeu de bonneteau et de désordre qui confirme le caractère factice et fantaisiste des élections dans notre pays.
Médard AMETEPE / Liberté Togo