Koumou_Dodji


En décembre dernier l’Assemblée nationale a voté le budget de la République togolaise qui se chiffre à plus de 122è milliards de F CFA. Ce budget pourra-t-il permettre au gouvernement d’tteindre les objectifs fixés ? Respecte-t-il la loi de convergence communautaire ? Nous avons posé la question à Dodji Koumou, président de Veille économique qui nous répond dans cette interview.
 

  • Quelle analyse faites-vous du budget avec les différents secteurs prioritaires ?

 
Koumou Dodji: Les allocations budgétaires de ces départements sont, de notre point de vue, insuffisantes pour répondre aux défis actuels de notre pays. Globalement, les dotations de la santé (+13,26%), de l’éducation (+6,37%) et de l’économie (+159,97%) sont respectivement passées de 50,72 milliards de FCFA en 2016 à 57,45 milliards de FCFA pour 2017, 130,36 milliards en 2016 à 138,6 milliards de FCFA pour 2017 et 47,25 milliards de FCFA en 2016 à 122,84 milliards de FCFA pour 2017. En revanche, nous constatons avec grand regret la baisse de l’allocation de l’agriculture qui passe de 77,2 milliards de FCFA en 2016 à 51,7 milliards de FCFA pour 2017, soit une baisse de plus de 33%. Rien se saurait expliquer voire justifier la baisse du budget de l’agriculture lorsqu’on sait que c’est l’une des voies par lesquelles le Togo peut relancer sa croissance. Cette hausse vertigineuse du budget de l’économie avec près de 76 milliards de FCFA pour le PUDC, s’explique plutôt par un souci d’une meilleure gestion des ressources qu’une réallocation stratégique.
 
Les enveloppes consacrées à ces secteurs vous semblent judicieuses ?

  • NON

Qu’est-ce qui devrait être fait ?
 
Koumou Dodji : Nous avons toujours expliqué que le Togo ne disposerait de ses ressources dans leur entièreté que si les trous budgétaires sont définitivement fermés. Dans ce cas on peut voter un budget dont la taille n’a absolument rien avoir avec les 1 227 milliards de FCFA. Ainsi, les budgets de la santé, de l’éducation et de l’agriculture devraient respectivement se situer autour de 222, 275 et 246 milliards de FCFA (confère le document : quel budget pour un taux de croissance à deux chiffres publié par Veille Economique). A ce niveau de budget, les problèmes du pays seraient abordés avec plus de sérieux et de sérénité. Je puis vous assurer que ce niveau de budget peut être atteint à l’état actuel des choses.
 
Le gouvernement fait-il assez pour le payement de la dette
 
intérieure ?
 
Komou Dodji : Je crois que nous n’avons pas été pris au sérieux lorsque nous avons fait une conférence sur la problématique de l’endettement public de notre pays, il y a deux ans. Les gouvernants de façon incompréhensible ont continué par endetter le pays sans utiliser cette dette pour opérer des investissements à productivité directe. La pilule sera amère, très amère. Il ne s’agit pas de savoir si le gouvernement fait –il assez ou pas. Il se trouve que nous n’avons pas structuré notre économie afin d’avoir des secteurs génératrices de ressources à même de nous aider à, non seulement rembourser notre dette, mais aussi réduire notre déficit budgétaire qui ne cesse de se creuser et à subvenir comme il se doit aux besoins sociaux de nos compatriotes. Voila le défi. Le Togo a été mis dans une situation où très peu ont la possibilité d’imaginer ce qui nous attend. Après la mission du FMI nous nous prononcerons avec plus de précisions sur les difficultés qui nous attendent. Pour l’instant, je souhaite du courage aux gouvernants. Je leur dis qu’ils vont devoir assumer jusqu’au bout.
 
Les différents secteurs respectent-ils les convergences communautaires ?
 
Komou Dodji : Le Togo se trouve dans une situation où le respect des critères de convergence communautaire serait bientôt un luxe. On verra.
 

  • Quelle est la marge de manœuvre du gouvernement quand il consacre 35% du budget au remboursement de la dette et 15% au salaire ?

 
Komou Dodji : Elle est étroite. Presque la taille d’un papier de cigarette pour emprunter l’expression à un des élites togolais. Les gouvernants sont obligés de demander des efforts supplémentaires aux gouvernés. Mais alors, ont-ils une forte légitimité pour cela ? Sont-ils prêts à rendre compte au peuple ? Sont-ils prêts à punir les détournements massifs de deniers publics ? Vont-ils opérer les réformes demandées à coups de fusil ? On verra.
 

  • Qu’apportent les sociétés d’Etat au budget : Est-ce suffisant ou insuffisant ?

 
Komou Dodji : L’un des principaux canaux des trous budgétaires, c’est les sociétés d’état. Elles sont très mal gérées. Au point qu’on nous impose des privatisations parce que des compatriotes ont décidé de piller nos sociétés d’état. Je suis contre la privatisation des sociétés d’état pour des causes de mauvaise gouvernance notamment celle des banques. On nous claironne à longueur de journée un Togo émergent. Qui pense émerger sans banques d’état ? Les contributions des sociétés d’état sont évidement faibles. La preuve, la part des ressources non fiscales ne représente désormais que 4% du budget. Je ne vois pas comment allons-nous rembourser notre dette dans ces conditions.
 

  • Quelles analyses faites-vous des choix des prévisions ?

 
Komou Dodji : Nous avons les ressources internes du pays. Elles sont constituées de ressources fiscales et non fiscales. Dans le budget 2017, les gouvernants espèrent des ressources fiscales de 625 milliards de FCFA et les ressources non fiscales pour 56 milliards de FCFA.
 
Nous avons les ressources externes. Il y a les dons-projets et les appuis budgétaires. Dans le budget 2017 elles représentent respectivement 90 milliards de FCFA et 34 milliards de FCFA. Ensuite il y a la dette. Elle représente dans le budget 2017 412 milliards de FCFA réparties en emprunts-projets, emprunts et emprunts obligataires dans le budget.
 
Qu’est-ce qu’on aurait dû faire ?
 
Komou Dodji : Ce qui aurait du être fait peut se faire encore aujourd’hui. Il faut que le Togo se repositionne dans le secteur primaire afin de restructurer son agriculture dans une rigueur totale, récupérer son secteur minier en toute intelligence, adosser à ce secteur minier des industries de transformation, opérer un dumping fiscale de façon globale en fermant les trous budgétaires, utiliser les ressources générées pour rembourser prioritairement la dette intérieure afin de redonner vie aux PME et PMI, punir les détourneurs de fonds publics.
 
lomévi (www.togoactualite.com)
 

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