Des manifestants font face à un groupe de militaires à Sokodé, le 7 novembre 2017. Photo transmise par notre Observateur


L’opposition togolaise avait organisé une nouvelle manifestation mardi 7 novembre, dans la ville de Sokodé. Une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux montre plusieurs militaires tirer à balles réelles vers la foule, dans laquelle se trouvait notre Observateur. Un manifestant, blessé par balles, est entre la vie et la mort.
 
Au moins dix-huit personnes ont été blessées lors de heurts entre manifestants et militaires dans la deuxième ville du Togo, ce mardi 7 novembre 2017. Le Togo connait depuis le mois d’aout un vaste mouvement d’opposition au gouvernement, qui demande le retour à la constitution de 1992, prévoyant de limiter à deux le nombre de mandat d’un président de la République.
 
Les manifestations étaient interdites mardi, mais plusieurs groupes d’opposants politiques au président Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 12 ans, se sont formés dans la ville.
 
Sur la route qui mène à Tchamba (sud-est), un groupe de manifestants a essuyé plusieurs tirs provenant de militaires, comme le montre cette vidéo dans laquelle plusieurs coups de feu sont bien audibles
 
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Les militaires ont versé de l’huile de vidange sur un manifestant
 

Deux photos transmises par notre Observateur, recadrées par la rédaction des Observateurs de France 24.
 
Notre Observateur Pierre G. a manifesté mardi à Sokodé. Il a depuis quitté la ville, inquiet pour sa sécurité. Il a accepté de témoigner à condition de rester anonyme.
 
« Ça s’est passé le matin, vers 8-9h. Les affrontements ont duré une trentaine de minutes avec les militaires, qui étaient environ une dizaine à cet endroit. Les manifestants n’ont pas lancé de pierres ni de quelconque projectiles, mais les manifestations étant interdites, les militaires les ont dispersés en utilisant du gaz lacrymogène et en tirant des balles réelles.
 
Un habitant, qui était à moto et ne manifestait pas, a été humilié par les militaires. Les militaires lui ont versé de l’huile de vidange sur le corps.
 
Après ce nouvel épisode de violences, beaucoup d’habitants ont fui la ville, vers des villages voisins ou d’autres grandes villes. Moi aussi je suis parti. Mes amis restés sur place me racontent que la ville est déserte et qu’il y a beaucoup de militaires en patrouille »
 
Un employé du Centre hospitalier régional de Sokodé, sous couvert d’anonymat, a expliqué à l’un de nos Observateurs : « Nous avons reçu 18 personnes blessées mardi matin lors des affrontements avec les militaires. Parmi elles, 14 ont été rouées de coups et sont toujours en soin aujourd’hui et un homme grièvement blessé par balles est actuellement en réanimation ». Selon notre Observateur, un habitant qui a lui aussi souhaité garder l’anonymat, plusieurs blessés ne se sont pas rendus à l’hôpital par peur d’être arrêtés.
 
« Mon quartier est bloqué »
 
Notre troisième Observateur, Paul C., lui aussi anonyme, est resté à Sokodé malgré cette éruption de violence. Il n’a pas pu manifester mardi, son quartier étant bouclé par les militaires.

Des militaires patrouillent à Sokodé. Photo prise par notre Observateur.
 
« Les militaires étaient positionnés un peu partout dans la ville, notamment au niveau des carrefours. Malgré cette forte présence des forces de l’ordre, les habitants de certains quartiers ont décidé de se rassembler. Ils ont été tabassés et ont reçu des coups de feu. L’ambulance a circulé partout dans la ville. Aujourd’hui, tout est fermé. Mon quartier est bloqué et le dispositif sécuritaire est imposant.»
 
Les autorités togolaises ont tenté d’expliquer l’inexplicable sans convaincre dans la presse que l’interdiction de manifester à Sokodé était justifiée, sans commenter les coups portés aux manifestants par les forces de l’ordre. « Des armes circulent dans la ville. Les deux militaires qui ont été tués [le 16 octobre, NDLR] ont vu leurs armements emportés. Nous ne savons toujours pas qui les détient. Des commissariats ont été saccagés et plus de 80 cartouches sont dans la nature. Est-ce raisonnable de laisser les gens manifester dans cette situation ? », a déclaré Yark Damehane, ministre de la Sécurité et de la Protection civile. « La responsabilité de toute la population est entre nos mains et nous pensons qu’il est prudent d’éviter toute manifestation dans ces conditions », a-t-il conclu.
 
Sokodé est aujourd’hui un des centres névralgiques du mouvement d’opposition au gouvernement, qui organise régulièrement des manifestations depuis le début du mois d’août.
 
Cette coalition qui regroupe une grande partie de l’opposition togolaise (cinq partis Cap 2015, le Groupe des six et le Parti national panafricain, PNP) réclame une limitation du nombre de mandats possibles pour le président de la République, ainsi que la démission de Faure Gnassinbgé, à ce poste depuis 12 ans. Le gouvernement a annoncé vouloir organiser un référendum, qui proposerait une réforme constitutionnelle limitant à deux le nombre de mandat du chef de l’Etat mais de façon non-rétroactive, ce qui permettrait à Faure Gnassingbé de prétendre à sa réélection en 2020 et 2025.
 
Source : [08/11/2017] Les Observateurs / France 24
 

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