Dans une intervention lors d’une rencontre avec ses frères et sœurs de la région des savanes le week-end dernier, le ministre des pistes rurales Kanfitine Tchédé–Issa a tenu des propos malheureux qui ont provoqué la colère des ressortissants de la région de la savane, présenté comme les moins méritants sur le plan scolaire. Levant un coin de voile sur des démarches menées par des cadres lors des concours de recrutement à la fonction publique au profit des candidats de la région, le ministre a fustigé la baisse de niveau dans la localité. Face à l’ampleur de la colère suscitée çà et là par ses propos, le ministre a dû présenter ses excuses aux populations qui ne décolèrent toujours pas encore.

Selon l’ex directeur général des travaux publics, le niveau d’étude des élèves de la région des savanes a tellement baissé que lors des concours de recrutement dans la fonction publique, ces derniers finissent bons derniers. « Quand on fait les concours, la région des Savanes, on n’a pas beaucoup de réussites. On s’est retrouvé, le Général est là, le ministre Tiem est là, moi je suis là, on part ensemble, voir soit le ministre de l’Education, soit le ministre de la Santé, soit le ministre de la Fonction publique, on dit on ne comprend pas pourquoi c’est la Savane ? Ils nous disent, parce que c’est au plus méritant. On dit non, prouvez-nous ça. Il va, il apporte les résultats, quand vous regardez, tous ceux qui sont derniers là, viennent des Savanes. », relève le ministre. Ce dernier va plus loin en affirmant que pour les besoins de la cause, lui et ses collègues (mentionnés dans la citation), se trouvent dans l’obligation de négocier des traitements de faveur pour faire admettre des candidats originaires de la région des savanes. « Et qu’est-ce que nous sommes obligés de faire ? S’il vous plait, c’est la réalité, je ne peux pas vous trompez, vous êtes mes petits-frères. Si je ne vous dis pas la vérité, qui peut vous dire encore la vérité ? Nous sommes obligés de passer par d’autres moyens pour qu’on essaye de repêcher certains de vous pour qu’ils puissent devenir enseignants, devenir personnel de santé et ainsi de suite. Ça c’est notre rôle d’aîné, et nous jouons ce rôle-là parfaitement. Donc c’est pour vous dire que c’est doucement, doucement … . La situation, aujourd’hui, du point de vue intellectuel, c’est la concurrence », a déclaré le ministre. Ce faisant le ministre ne fait que confirmer officiellement les insinuations qui jettent la suspicion sur les concours de recrutement à la fonction publique au Togo. Pour autant, doiton lui jeter la pierre ? Comme on doit s’y attendre, de tels propos, venant d’un fils de la région des savanes ont tôt fait de déclencher la colère au sein des ressortissants de cette région.

D’abord ils se demandent sur quoi se fonde le ministre pour tenir de tels propos qui sont contraires à la réalité. Pour eux, que ce soit, aux cours primaires, secondaires et dans le supérieur, contrairement aux allégations du ministre, les ressortissants de la région des savanes se battent pour obtenir des résultats honorables. Prétendre le contraire comme le fait le ministre, revient à indexer sa région d’origine, de la main gauche. Ce qui, en pays Moba, Tchokossi, Mossi et autres… est plus qu’un sacrilège. « Nous mettons au défi le ministre de nous prouver que nos frères et sœurs de la région des savanes ne figurent pas parmi les meilleurs au cepd, au bepc et au bac 2 au Togo. S’il veut plaire au régime, ce n’est pas en dénigrant ses frères et sœurs de la région qu’il parviendra. Nous ne lui offriront pas cette opportunité », déclare tout indigné, un ressortissant de la région des savanes. Partout, à travers le pays, les réactions sont vives qui fustigent les propos du ministre qui mettent en cause également, la compétence des cadres de la région des savanes, au postes de responsabilité dans le pays. Comment peut-on affirmer que la région des savanes ne regorget-elle pas d’élèves et d’étudiants brillants et méritants ? Selon nos recoupements, la majorité des étudiants inscrits à l’université de Kara provient de la région des savanes. Dans ces conditions, quel crédit accorder aux allégations du ministre ? Les allégations du ministre ne reflètent pas la réalité sur le terrain. Peut-être, voudrait-il dénoncer la baisse du niveau scolaire dans la région des savanes qui n’est pas propre à cette seule région mais qu’il n’a pas trouvé les mots justes pour le faire ? Puisque plus loin il affirme : « Les premiers intellectuels en littérature venaient de la région des savanes ». « Le grand frère, l’aîné Barthélémy Lamboni en est une illustration. Et il est d’où ? Il est de Tandouaré. Renseignezvous auprès des parents qui ne savent pas. Il a été le premier Directeur de cabinet du feu papa Général Gnassingbé Eyadéma ». Et de s’interroger : « Donc nous devons nous poser la question, pourquoi aujourd’hui, le niveau a baissé dans toute la région des Savanes ? Et comment nous avons su ça ? ».

Face aux réactions de plus en plus enflammées provoquées par ses propos, le ministre a cru devoir monter au créneau pour présenter de façon maladroite ses excuses à tous ceux qui se seraient sentis blessés. « Fils des savanes, si donc certains de mes frères sont écœurés par ce que certains de mes propos les ont blessés, donc je suis désolé que mes propos ne soient pas bien compris et placés dans un contexte qui n’est pas le mien. Mais qu’à cela ne tienne. Si celui à qui mes propos ont blessé, je lui présente mes excuses. Donc, l’essentiel pour nous en tant que fils des savanes et membre du gouvernement, c’est d’abord la paix… ». Sous d’autres cieux, la suite à donner à cet écart de langage venant d’un membre du gouvernement serait automatique et sans appel.

La Lanterne N°483 du 07 Avril 2022

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