« On va loin quand on ne sait pas où l’on va, et qui ne voit le but le passe ». Dans ses Fantaisies et légendes, Charles NODIER retrace les écarts et les perversions de sens de ceux qui ont fait le pacte avec le travestissement sans aucun principe d’éthique, aucune norme de convenance civique et morale et sans âme de grandeur. Ils prennent résidence dans le moule de la brutalité et renversent tout de leur bon-vouloir pour assouvir leurs ambitions morbides et sont prêts à allumer le cratère dont ils savent qu’il peut se transformer en un brasier pourvu qu’ils y tirent les dividendes.
Mais, il n’y a aucune assurance qu’une cité en flamme soit au profit des pyromanes. C’est toujours une si triste chose que toute une République soit aux mains de ceux qui, de leurs options inconséquentes, la font péricliter dans les ravins de l’histoire. Les aventuriers aux ambitions démesurées en mal de volonté de puissance qui forment des miliciens et les entretiennent n’ont qu’une vue étriquée pour penser le bien commun. C’est pourquoi ils sont bornés à ériger des institutions à leur propre dimension avec des hommes chétifs qui trouvent leur aise dans les pourritures terrestres.
Au Togo, nous sommes les champions des institutions postiches et l’état du pays traduit éloquemment leur faillite. Nos institutions n’ont que le rôle d’enfumer la cité, d’ordonner le paraître, de tenir le rang du remplissage.
Le paravent d’existence d’une CENI pour l’organisation des consultations populaires en toute indépendance et dans la transparence s’observe dans ses calculs de suffrages exprimés dont les totaux ne tombent jamais. Aujourd’hui encore, la CENI des transgressions agressives et de l’imposture se donne des ailes dans des manquements graves de sa fonctionnalité. C’est elle la première responsable des tragédies électorales que connaît le Togo. Le gribouillis électoral est absolument à éviter à notre pays qui en sort avec des crimes de masse.
Jusqu’où la CENI, dans sa folie électorale, peut-elle encore aller pour une opposition frontale avec nos populations, la Coalition des quatorze partis politiques, la C14 ?
Quelle confiance devons-nous accorder à la CEDEAO dont la feuille de route pour une sortie définitive de crise est outrageusement chiffonnée par la « minorité-majoritaire » ?
A quand la fin de l’expertise électorale de la CEDEAO pour assister notre pays malade de ses fausses élections ?
1) Les institutions et les personnalités
Une institution n’a d’efficacité et de visibilité qu’à travers la qualité de la personnalité qui l’incarne. C’est le doigté des hommes qui libère le rayonnement des institutions. Le mal absolu des institutions au Togo réside dans les compétences tronquées, plaquées à la tête de nos institutions où le scandale de fonctionnalité se multiplie pour renverser notre cité au fond des âges. Pour peu que l’on veuille soupeser les œuvres de nos institutions, on s’étonne de la vacuité qu’elles brassent sur le dos du contribuable. Le gâchis est vite certifié par la pacotille administrative des résultats que nos institutions accouchent. De la justice au développement à la base en passant par la santé, l’éducation et les innovations annexes du fanfaronnade politique, l’inertie est la règle, et au meilleur des cas, une fonctionnalité absurde.
L’extraordinaire régularité insolite de la faillite de ceux qui sont pompeusement appelés « Professeurs » parachutés pour le service public à la tête de nos institutions nous frappe de froideur morne. Le virus de l’aplasie du jugement a exceptionnellement échappé à noyer Kako NUBUKPO qui prenait le pli d’un simulacre de suicide. Les erreurs les plus courtes sont toujours les meilleures pour de vrais intellectuels. Un homme bien instruit ou un vrai universitaire a toujours un cran de dignité à préserver et ne peut s’aliéner à la bassesse, aux transgressions mortelles, aux crimes pour survivre. Il a un devoir d’exemplarité et une dignité à assumer. Ce sont les diplômés sans notoriété à défendre pour la postérité qui s’aliènent vite aux pestiférés pour des échelons dans des aventures-hécatombes, pourvu qu’ils y trouvent leur part dans les ruines de leur esprit.
Quand le « Professeur » KADANGA a été propulsé à la tête de la CENI, les réseaux sociaux ont vite flambé sur sa personnalité pour lui coller (sic) souillures éthiques. Nous étions fort réservés, parce qu’il fallait le voir à l’œuvre et ne le juger que sur les faits de service public.
Aujourd’hui, les prérogatives qu’il affiche dans une «convocation» du corps électoral pour une suite de scrutins témoignent d’une propension à l’effraction qu’on ne peut plus lui accorder un soupçon d’intégrité à conduire un processus électoral. Il est dans les manœuvres lassantes de l’imposture et se dispense des armes de l’éthique, du civisme et de la morale. Son niveau de conscience n’est pas à même de défendre son honneur et celui de notre peuple. Quand on prétend appartenir au monde universitaire, le minimum exigible, c’est de lire et de comprendre les textes qui régissent une fonction à laquelle on est appelé.
La déception est sans commune mesure dans le rôle que KADANGA joue sous le couvert d’une étiquette de professeur et ses annonces confirment la droiture tondue d’une personne controversée. Il n’y a rien à espérer de ceux qui travaillent pour eux-mêmes sans le moindre jugement sur l’avenir de leur société. L’autonomie de la raison est la puissance d’autorité de ceux qui ont de la valeur et qui savent en créer.
KADANGA n’a que le goût du scandale. La «convocation» du corps électoral dont il s’autorise est une aberration, un présage du crime électoral pour lequel il se positionne. Il a tôt fait de nous avertir sur ses intentions réelles et il appartient à la communauté nationale de se liguer contre lui pour le dessaisir au plus tôt de ses intentions réelles.
De plus, le canevas d’expertise électorale tracé par la CEDEAO ne peut être ignoré par le sieur KADANGA. La défiance à l’endroit de la communauté sous- régionale et de la communauté nationale est une licence comportementale qui nous appelle à une action massive de résistance. KADANGA apporte de l’eau au moulin de la C14 qui exige la recomposition de la CENI, parce qu’ « il y a des gens qui n’ont rien à y faire ».
Nos élections doivent cesser de rimer avec des horreurs, des tragédies. C’est pourquoi l’intégrité intellectuelle et morale de ceux qui conduisent nos élections sont des références à conquérir avant de nouvelles élections. Ce que nous voulons faire de notre pays dépend largement de la qualité de nos élections. Nous ne voulons plus donner raison à René DUMONT, dans L’Afrique noire est mal partie, qui écrivait il y a déjà cinquante ans : « Quand un nègre détient une parcelle de responsabilité, il devient dangereux pour ses semblables ».
2)Confiance et fiabilité électorales
Le Togo ne peut pas continuer à apparaître comme une République d’exception soumise au bon-vouloir d’une famille. Le clan GNASSINGBE est à une étape de l’histoire de ce pays où l’asile de la transgression et de la rapine a désormais ses limites. L’implication de la CEDEAO dans la résolution de la crise électorale vient d’un long parcours et de multiples épisodes tragiques pour notre peuple que la Communauté sous-régionale a conscience qu’elle joue sa crédibilité, et surtout qu’elle ne peut plus se permettre des collusions pour un aval au statu quo qui renverserait l’ordre de la sous-région.
De plus, la conscience nationale est d’un rebond sur l’avenir du pays au point qu’elle ne supportera choir de ses aspirations les plus intimes, les plus ferventes. La puissance insurrectionnelle de la conscience nationale a obligé Faure à solliciter le secours de la CEDEAO pour un règlement pacifique et propre de la crise. La CEDEAO au chevet du Togo a un devoir de résultat. Si elle venait à manquer à ce devoir, des débordements insoupçonnés de la crise seront inévitables.
C’est pourquoi l’interprétation sélective et biaisée de la feuille de route dont abuse le RPT/UNIR appelle à une intervention vigoureuse de la CEDEAO pour anticiper sur l’embrasement du feu de provocation que la pyromanie électorale du régime tente pour survivre à la consultation populaire. La déraison est toujours dans l’interprétation des accords et des recommandations auxquels adhère le clan GNASSINGBE qui croit encore que le feu suffit à faire taire un peuple. Le hold-up électoral est le principe de sa défense et il n’entend pas y renoncer quelles que soient les restrictions du Comité de suivi pour un scrutin équitable, juste et transparent. « Le malheur des gens qui n’ont jamais tort ; ils n’ont jamais raison », comme l’écrivait Prince Charles-Joseph de LIGNE dans Mes Ecarts.
Toute la dimension de la pensée de LIGNE s’éprouve, se vit dans le jeu de Kodjona KADANGA et la couverture que lui apporte un conseil des ministres qui avalise une forfaiture du président de la CENI. Il aurait pu lui adresser aussi ses félicitations pour usurpation de pouvoir. Ni le pouvoir, ni sa CENI ne s’imaginent que nous sommes à une étape autre en nos élections de la tragédie.
La tempête populaire mise en dégradation volontaire par l’entremise de la facilitation est encouragée à se réformer si la moquerie du pouvoir à l’endroit du peuple du Togo ne cesse pas immédiatement. Aussi, l’œil de la CEDEAO ne doit-il plus s’éloigner des manœuvres de Faure qui tient à être le garant testamentaire de son père dont il avoue lui avoir laissé un legs à ne jamais abandonner sous aucun prétexte. Rien n’est statique et la dynamique sociale, régionale se liguent contre ce qui est révélé comme la « volonté testamentaire » du « Timonier » togolais. Faure, son père et le régime RPT/UNIR savent mieux que quiconque que la rapine électorale tient le souffle de leur règne.
Aujourd’hui, ni le peuple du Togo, ni la CEDEAO ne sont prêts à s’accommoder au forcing électoral d’un « Le chien aboie, la caravane passe ». Si la CEDEAO se montre incapable d’élever le volume de sa vigilance, le peuple togolais, de sa pleine conscience de responsabilité et de son cran d’engagement, a le devoir de mettre fin à une nouvelle forfaiture
 
source : L’Alternative