Vendredi 12 février 2021, Me Eric Sossah, avocat de la famille Adjakly, laquelle famille est en procès contre le journal « L’Alternative » et son Directeur de publication, Ferdinand Ayité a tenu une conférence de presse à Lomé. Et au cours de la rencontre, le défenseur de la famille Adjakly s’est épanché sur le litige opposant ses clients au journal, suite à la publication d’articles relatifs au scandale dans la commande de produits pétroliers par le Comité de suivi des fluctuations des prix des produits pétroliers (CSFPPP). Mais l’avocat en avait-il le droit ?
Nous avons fouillé le recueil des Textes régissant la Profession d’avocat issus de la Conférence des barreaux de l’espace UEMOA, édition 2019. En son article 47, plus précisément au dernier paragraphe, à la page 120, il est stipulé : « Toute déclaration publique relative à un procès en cours est interdite à l’avocat sous réserve de l’autorisation du bâtonnier ».
Me Eric Sossaha-t-il connaissance de cet article ? Dans l’affirmative, a-t-il obtenu l’autorisation du bâtonnier de l’ordre des avocats du Togo ? Pour nous en assurer, nous avons tenté à maintes reprises de joindre l’avocat en vain. Nous lui avons laissé un message auquel il n’a pas non plus répondu. Quand nous avons demandé l’avis d’un autre avocat, sa gêne était telle que nous n’avons pu rien tirer de lui. « Je n’ai pas à juger ce que fait un collègue », s’est-il contenté de nous répondre.
Au cours de cette conférence de presse, Me Sossah a dit beaucoup de choses. Par exemple, il laissé entendre que « dans la mesure où au sein du ministère, on est convaincu qu’il n’y a pas de malversation, mes clients sont toujours à leurs postes… ». Comment peut-il en être autrement, on ne scie pas la branche sur laquelle on est assis. Seulement, c’est toujours au sein de ce ministère qu’il a été découvert que plus du demi-milliard FCFA a été versé à une ministre sans aucun justificatif ; c’est aussi au sein dudit ministère qu’on a trouvé que les fonds d’entretien routier annuellement prélevés dépassent de loin ce qui est déclaré. C’est toujours au sein de ce ministère que les fonds du mécanisme d’ajustement sont gérés en toute dérogation des textes du trésor public. Et donc quand l’avocat prend à témoin le ministère, c’est de bonne guerre. Une enquête indépendante aurait été plus crédible.
L’ordre des avocats a-t-il eu connaissance de la sortie médiatique de leur collègue par rapport aux textes qui régissent la profession d’avocat ? Y a-t-il des dispositions à prendre en cas d’inobservation d’un des articles ? Il revient à l’ensemble du barreau de juger de la légalité de l’acte.
Il nous souvient que sous l’ancien bureau, un autre avocat, avec l’aide de la Cour suprême, avait défié l’autorité et la décision du barreau togolais. Cet avocat s’est basé sur un sursis à lui accordé pour continuer à travailler, bien qu’il ait été suspendu pour une période donnée. Avec cet autre épisode, tout a l’air comme si l’existence du barreau n’a aucune prise sur les faits et gestes des avocats au Togo. Doit-on emprunter ce slogan d’un parti politique et dire dans ce cas : « Allons-y seulement » ?
Godson K. / Liberté N°3327 du 15-02-21