Depuis le samedi 23 novembre, avec la sortie cocasse du ministre de la Sécurité et de la Protection civile faisant état de l’insurrection armée du siècle avec machettes et gourdins, les populations d’Agoènyivé, de Sokodé et environs vivent un véritable enfer. Au nom de la recherche des quatre (04) AK47 prétendument arrachés aux gendarmes par les insurgés d’un courage herculéen, c’est un déluge qui s’abat sur leurs habitants, violentés sans distinction. Mais tout se passe dans l’indifférence générale, même des organisations de défense des droits de l’homme…

Déluge de violences sur les populations

Depuis la sortie de Yark Damehame, on s’attendait à ce scénario, au nom de la recherche des quatre (04) armes prétendument arrachées aux gendarmes par des individus habillés en noir (sic) armés de machettes et de gourdins. Il ne fait tout simplement pas bon d’habiter Sokodé et Agoènyivé depuis le samedi 23 novembre. C’est un sale temps que vivent les populations de ces localités où les faits se seraient passés. Faut-il le rappeler, selon la « yarkerie », c’est une arme qui aurait été arrachée à Sokodé, contre quatre (04) à Lomé dont une (01) retrouvée. Au nom de la recherche des quatre (04) AK47, c’est une pluie diluvienne de violences qui s’abat sur les populations. Les témoignages sont glaçants.

On évoquait déjà dans la parution du lundi 25 novembre dernier la terreur et les violences exercées sur les populations de Sokodé et de ses environs, là où seule une arme aurait été arrachée. Toute la ville est transformée en camp militaire, ses artères occupées par des chars et autres véhicules de guerre, des militaires patrouillant, de jour comme de nuit. Les agents fracassent les portails et pénètrent dans les maisons, frappent les habitants sur toutes les parties du corps, fouillent sans ménagement les chambres qu’ils mettent presque à sac. Tout cela, sans aucun mandat de perquisition. Les victimes s’en sortent avec le dos, les fesses et autres parties du corps endoloris et gorgés de sang. Des images publiées sur les réseaux sociaux montrent l’ampleur de la chose. A cause de la terreur imposée, il nous revient que déjà à 18 heures, les rues sont désertes à Sokodé, les habitants se terrant chez eux  pour échapper aux maltraitantes. Certains auraient même fui de nouveau pour se cacher dans la brousse, comme au temps de la répression des récentes manifestations en août 2017.

A quelques exceptions près, ce sont les faits similaires qui se passent à Agoènyivé et ses environs. Ici aussi, les patrouilles sont permanentes. La présentation de la carte d’identité ne sauve pas. Mêmes violations de domiciles, mêmes violences sur les habitants, au nom de la recherche des armes dites perdues.

Dieu seul sait jusqu’à quand ce sale temps va finir et les habitants de ces localités connaitront la paix, avec ce curseur posé sur eux. Lorsqu’on se rappelle les misères auxquelles étaient soumises  les populations de Sokodé et environs, suite à la révolte d’octobre 2017 consécutivement à l’arrestation de l’imam de Sokodé Mollah Hassane, au nom de la recherche des armes prétendument arrachées aux deux militaires tués et décapités, il faut redouter que la fin ne soit pas pour si tôt.

Indifférence généralisée

Les ODDH muettes. C’est une constante que dans des cas pareils où des armes de l’armée sont emportées, des fouilles sont souvent organiséespour les retrouver.Mais tout se passe dans la légalité et le respect des droits des citoyens. Cela s’entend que le Procureur de la République est saisi et il délivre des mandats de perquisition en bonne et due forme que les agents montrent aux maisonnées avant de commencer à opérer. Mais les présentes perquisitions se font sans aucun mandat. Et il ne fait pas bon de le requérir. Ceux qui osent le faire sont plus violentés par les militaires. Le Togo est-il en Etat d’urgence ? Officiellement non. Mais c’est un déluge de violations des droits des citoyens et de violences qui s’abat sur les habitants de ces localités. Ce qui est déplorable lorsqu’on considère les propres aveux de Yark Damehame. Les auteurs sont connus, avait-il crié le samedi 23 novembre dernier lors de sa sortie rocambolesque. Si c’en est aussi, le bon sens voudrait que les militaires aillent fouiller dans les mains de ces gens seuls, les arrêter et poursuivre en justice. Mais ce sont tous les habitants de ces localités qui sont châtiés. C’est une question de droits de l’Homme qui se pose, et c’est leur matière. Mais aussi curieux que cela puisse paraitre, les organisations de défense des droits de l’Homme sont muettes.  Malheureusement lorsqu’il s’agit de donner des leçons de stratégie politique à l’opposition, leurs responsables ne se font aucunement prier, s’illustrant en parangons premiers de vertus…

Le langue de bois de la CNDH. Au sein de l’opinion, c’est une constante, la Commission nationale des droits de l’Homme (CNDH) a une image d’aile marchante du pouvoir en place, du moins fait partie de ces institutions étatiques qui l’accompagnent dans ses dérives et ne rompent le silence que pour voler à son secours. Et dans le cas  de ces voies de fait sur les populations d’Agoènyivé, Sokodé et environs, elle n’a rien fait pour démentir cette image. L’institution a même fait preuve de discrimination et de parti pris ostentatoire en faveur de ces violations des droits de l’Homme et violences, plutôt que de défendre les droits des citoyens. La preuve, avec le communiqué rendu public le 25 novembre relativement à cette fable (sic) d’insurrection armée. La CNDH, croyant en l’évangile selon Yark Damehame sur le scénario de la fameuse insurrection armée selon lequel des individués armés de machettes et de gourdins ont arraché aux corps habillés leurs armes, n’a pas hésité à  condamner (sic) ces actes, rappelant « le caractère sacré de la vie de la personne humaine, tel que consacré par l’article 21 de la Constitution togolaise » et exhortant tous les Togolais à œuvrer à préserver la paix et la sécurité au cours de la période électorale, une chanson du pouvoir en place. Mais sur les violations massives des droits des citoyens et les violences no limit exercées sur les pauvres populations, celles de Sokodé et environs notamment, elle a fait dans la langue de bois. La CNDH a juste exhorté les forces de l’ordre et de sécurité à « agir dans le respect des procédures légales dans la recherche des présumés auteurs de ces actes ». Nakpa Kpolo et les siens ne savent-ils pas que cette recherche se fait sans mandat et dans la violation des droits des citoyens et les violences tous azimuts, pour les condamner ouvertement aussi ? Hypocrisie, quand tu nous tiens !

Où sont les fameux cadres de Sokodé ? Lorsqu’on jette un regard attentif sur les localités qui enregistrent ces voies de fait, on se rend à l’évidence que ce sont celles où vivent majoritairement les militants du Parti national panafricain (PNP) et/ou proches qui sont visées. Autre illustration, le fait que Kparatao soit aussi pris d’assaut par les militaires, au nom de la même recherche des armes perdues, alors que la localité n’a pas abrité les tentatives d’insurrection. Parce qu’il s’agit du village de Tikpi Atchadam, il faut terrifier les populations. Au-delà des militants du PNP, on est en face d’un acharnement qui ne dit pas son nom sur les populations Tem. Il y a, à travers cette croisade contre les populations, une connotation ethnique tacite. Le ton a été donné par le Préfet de Tchaoudjo, le Col Mateindou Monpiom, à travers son courrier envoyé au Président du PNP Tchaoudjo et dans lequel il accusait les militants de cette formation politique, majoritairement Tem, de vouloir s’en prendre aux ressortissants kabyès dans la localité. Ne demandez pas de quelle ethnie seraient aussi majoritairement les militaires envoyés en expédition à Sokodé et environs, pour corriger (sic) leurs habitants… Il y a plein de cadres de Sokodé et de la région Centrale en général au sein du pouvoir, dans le cercle immédiat  de Faure Gnassingbé et comptant parmi ses collabos de premier rang. Mais tout ce beau monde laisse martyriser ses frères et sœurs, sans mot dire. Bien plus, il cautionne ces actes. Au nom des intérêts personnels !

On peut élargir le champ à la classe politique aussi. Même si des responsables de certains partis traditionnels de l’opposition ne se sont pas fait prier pour fustiger la « yarkerie » et sa suite d’événements, on ne voit tout de même pas la classe politique dans son ensemble se bousculer pour condamner ouvertement ces agissements du pouvoir. Bien plus, le RPT/UNIR, lui, au cours d’une sortie mercredi dernier, a ouvertement pris le parti  du régime en place. Pas de condamnation des sévices et de compassion à l’égard des populations de ces localités où le parti cinquantenaire est souvent majoritaire en termes de suffrages lors des élections, a plus de députés et de maires. Quid du Groupe des 5 ambassades occidentales au Togo ? Ces représentants du monde « civilisé » dans notre pays, qui jouent souvent les parangons de vertus, n’ont que faire de ces mauvais traitements infligés aux habitants de Sokodé, Kparatao, Agoènyivé et environs. Bref tout le monde est indifférent. « Non-assistance à populations martyrisées », ainsi caricature un concitoyen…

Tino Kossi

source : Liberté

LAISSER UNE RÉPONSE

Please enter your comment!
Please enter your name here