« Il y a deux sortes de députés: les mauvais qui ne valent rien, et les bons qui ne valent pas grand-chose» (Anonyme)

De tout temps, les Togolais se sont plaints des disparités criardes dans l’élection des députés, des disparités liées au découpage électoral. Dans certaines circonscriptions électorales, il fallait 10.000 voix pour devenir député alors que dans d’autres, les députés doivent être élus avec plus de 100.000 voix. Un découpage biaisé que d’aucuns qualifient d’«atteinte grave à l’équité et à la régularité des élections ».

Ce n’est pas tant le problème de la surreprésentation d’une région par rapport à une autre où certains députés sont élus avec dix fois moins d’électeurs, qui nous intéresse ici. Il faut relever que jusqu’aux élections législatives de 2013, il fallait au minimum 10.000 voix pour se faire élire député. En 2007 et 2013, en moyenne, un député représentait entre 18.000 et 38.000 voix.

Mais aujourd’hui, le député est si « kpayo » (dévalorisé, déprécié) dans notre pays, surtout depuis les législatives du 20 décembre 2018, qu’avec moins de cent (100) voix, oui 100 comme nombre entier naturel équivalant à dix fois dix, certains sont, par extraordinaire, « élus députés à l’Assemblée nationale.  C’était un secret de polichinelle, les Togolais avaient exprimé un rejet massif pour le scrutin législatif boudé par l’opposition, notamment la coalition des 14 partis. Ce fut un véritable fiasco électoral. Une mascarade qui ne dit pas son nom. A peine 10% de Togolais s’étaient rendus aux urnes. Et ce chiffre même est élevé au regard de ce que nous avons tous vu ce jour-là. Lors du dépouillement public, dans la plupart des bureaux de vote autant à Lomé que dans les villes de l’intérieur du pays, le nombre de votants ne dépassait guère 100 sur 300 à 500 inscrits. Sans oublier un nombre incroyablement élevé de bulletins nuls. Pour un Waterloo électoral, c’en était vraiment un.

N’empêche, le très partisan Kodjona Kadanga, président de la CENI d’alors et le non moins partial Aboudou Assouma de la Cour Constitutionnelle se sont arrangés pour inventer un taux de participation improbable de 59,9%. Cela n’a trompé personne. On se rappelle encore de l’ironie du reporter de RFI qui disait que les observateurs électoraux et les responsables de la CENI dans les bureaux de vote étaient plus nombreux que les électeurs.

Suite à la proclamation des résultats dont à ce jour on n’a jamais eu de détails, l’ancien président de l’Assemblée nationale, Abass Bonfoh était monté au créneau pour contester vigoureusement un siège attribué par indulgence au parti Nouvel Engagement Togolais (NET) à Bassar alors que le parti UNIR avait mené une razzia et raflé les 3 sièges en jeu. « Pourquoi ce mariage forcé ? Un mariage forcé avec quelqu’un qu’on ne connaît pas et qui ne vous a jamais courtisée ni demandé votre main. Quel mépris ! (…) Je me refuse à cet arrangement », s’est-il indigné.

Les mêmes arrangements ont été faits au profit du PDP, du MPDD, etc. Aujourd’hui, quatre mois après, les langues se délient et on en sait un peu plus sur les dessous de cette parodie d’élection. On apprend par exemple que certains leaders et cadres de partis politiques, candidats aux élections législatives ont eu 70 voix, d’autres 32 voix, d’autres encore 18 voix pour devenir « Députés de la République » avec tous les honneurs dus à leur rang. Les « vrais députés », ceux qui ont été brillamment élus, ont engrangé 1800 voix.

En tout cas, ce sont les sous-députés nommés eux-mêmes, à cause des bisbilles, qui livrent les secrets sur la place publique. Au grand bonheur…

 

Médard AMETEPE
 
source : Liberté
 

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