Des discussions sans l’ANC, l’OBUTS, le CAR…puis la CDPA
 
Plus que cinq (05) mois, et les Togolais seront appelés aux urnes pour élire les députés et les les maires. Mais bien inspiré qui pourra présager les conditions dans lesquelles ces élections législatives et locales seront organisées. S’il est vrai que les préparatifs des scrutins sont une prérogative régalienne du gouvernement, il n’en demeure pas moins que la préparation des élections à venir souffre de légitimité. Elle est faite de façon unilatérale par le pouvoir, et les discussions ouvertes à la pelle se soldent toujours par des échecs. A cause de la mauvaise foi des gouvernants. Celles ouvertes depuis le début de cette semaine ressemblent plutôt à une comédie, avec pour chef d’orchestre un certain Pascal Bodjona, la bouche et le bras de Faure Gnassingbé, qui revient de loin.
 
En effet depuis lundi dernier se tiennent à la Primature des discussions politiques, à l’initiative du gouvernement. Le énième cadre de dialogue créé en l’espace de quelques mois dans la perspective des prochaines échéances électorales. Pour ses initiateurs, peut-être embêtés par les dispositions du protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance qui stipulent au point 1 de son article 2 qu’« aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques », ces discussions visent à obtenir le maximum de consensus autour des projets de code électoral et de découpage unilatéralement élaborés par le pouvoir et qui suscitent de la réprobation générale. Pour les partis majeurs de l’opposition, ces deux projets n’apportent pas grande amélioration. Certains y voient même les premiers dispositifs de la fraude électorale et des scrutins verrouillés et demandent tout simplement leur retrait, comme le Collectif « Sauvons le Togo ». Les deux textes étaient prévus pour être votés le vendredi 11 mai dernier, mais les contestations tous azimuts et les pressions des milieux diplomatiques ont eu raison de la détermination de Faure Gnassingbé et les siens, qui ont dû improviser le nième dialogue. La caution manquant au pouvoir doit-elle être fournie par les partis satellites ou par ceux qui sont véritablement représentatifs de l’opposition et du peuple ? Question d’autant plus légitime que ce qui se passe depuis lundi à la Primature ressemble beaucoup plus à de la comédie.
 
En effet, se sont retrouvés autour de la table avec le pouvoir représenté par le RPT nouveau, c’est-à-dire l’Union pour la République (UNIR), l’alliée de l’Union des forces de changement (Ufc), la Convergence patriotique panafricaine (Cpp) d’Edem Kodjo, le Parti démocratique panafricain (Pdp) de Bassabi Kagbara, le Parti pour la démocratie et le renouveau (PDR) de Zarifou Ayéva. On dirait une rencontre pouvoir-Cpdc rénové, car il faut le constater, ce sont pratiquement ses membres qui se sont à nouveau retrouvés autour de la table. Les poids lourds de l’opposition, à savoir l’Alliance nationale pour le changement (Anc) de Jean-Pierre Fabre, l’Organisation pour bâtir dans l’union un Togo solidaire (Obuts) d’Agbeyome Kodjo, mais aussi le Comité d’action pour le renouveau (Car) boudent les pourparlers, non sans raison. Ces partis ne voient aucune bonne volonté de la part du pouvoir de faire le consensus autour des réformes et de la préparation du processus et n’entendent pas lui servir de caution. Ils estiment avoir fait des propositions et demandent juste qu’elles soient prises en compte dans les projets de code électoral et de découpage électoral.
 
La présence de poids lourds (sic) dont pouvait s’enorgueillir le pouvoir était celle de la Convention démocratique des peuples africains (Cdpa), qui a répondu à l’appel. Mais depuis mardi, le parti du Prof Léopold Gnininvi a claqué la porte, dégoûté par la mauvaise foi du pouvoir. « La salle semblait vouloir ne discuter que des modifications liées aux recommandations de l’UE. Nous n’avons pas été écoutés (…) La Cdpa ne veut pas se prêter à un jeu qui aboutirait à faire des réformes bancales comme nous avons eu à le faire dans le passé ; des réformes qui ne rendent pas service à notre peuple. Nous sommes toujours disposés à dialoguer si la raison revient et si on nous invite, on reviendra », a déclaré Brigitte Adjamagbo-Johnson, la Secrétaire nationale à l’implantation du parti. « Nous ne sommes pas parvenus à nous entendre…Les observations de la Cdpa vont au-delà du code électoral et concernent le mode de scrutin pour les élections législatives et présidentielles (…) La Cdpa a eu à faire des observations d’ordre général, car le document qui nous est remis, ne répond pas aux questions essentielles liées au processus électoral telles que le mode de scrutin des élections présidentielles et législatives. Nous avons fait observer aussi que nous étions mal à l’aise pour discuter de réformes électorales sans une clarification sur les questions relatives au découpage électoral et la liste électorale », a-t-elle expliqué, et d’ajouter : « La réforme du code électoral doit s’inscrire dans une démarche globale qui consisterait à réformer la constitution, à réformer les institutions qui doivent aussi gérer les élections. Les discussions ne doivent pas se focaliser uniquement sur les recommandations de l’Union européenne (UE) ».
 
C’était là un affront de plus pour Faure Gnassingbé. Cette défection de la Cdpa est la énième preuve de la mauvaise foi du pouvoir en place qui, visiblement, s’isole davantage. Ne sachant plus où donner de la tête, le gouvernement a fait un clin d’œil au Comité d’action pour le renouveau (Car) en l’invitant aux discussions. Une délégation du parti à la tête de laquelle se trouvait Me Dodji Apévon, est allée prendre langue mercredi avec le Premier ministre Gilbert Houngbo. Mais là aussi, pas sûr que Faure Gnassingbé et les siens obtiennent la caution recherchée, puisque ce parti est resté inflexible. Le Premier ministre a avoué son impuissance et promis verser leurs propositions au conseil des ministres.
 
Malgré ce boycott des poids lourds de l’opposition, le dialogue se poursuit à la Primature, avec l’UNIR, l’Ufc, la Cpp, le Pdr, bref, les membres du Cpdc dit rénové et des partis qui ne représentent plus rien. Si c’est avec ces partis qui se résument à de simples sigles que le consensus peut être trouvé autour des réformes, pourquoi faille-t-il ouvrir un autre cadre de discussions que le Cpdc pour ce faire ? On joue simplement la comédie à la Primature, pour paraphraser le titre de l’ouvrage du compatriote Senouvo Agbota Zinsou.
 
 
Tino Kossi
 
 
liberte-togo.com
 

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