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_Par Gnimdewa Atakpama, auteur de La nuit est longue, mais la révolution vient._ *1er.12.2025*
Le 2 mars 1955, une lycéenne de 15 ans nommée Claudette Colvin refuse de céder sa place à Montgomery.
Elle est expulsée du bus, menottée, emmenée en prison.
E.D. Nixon, responsable local de la NAACP, apprend qu’elle est enceinte. Il décide que son cas ne convient pas.
Neuf mois plus tard, le 1er décembre 1955, Rosa Parks, 42 ans, couturière et membre active de la NAACP, refuse à son tour.
Cette fois, le boycott démarre.
Tu te demandes peut-être pourquoi j’insiste sur ce détail.
Voici ce que les leaders cherchaient depuis des années. Dès mai 1954, Jo Ann Robinson du Women’s Political Council avait averti le maire qu’un boycott se préparait si les conditions ne changeaient pas.
L’infrastructure était prête.
Le 2 décembre, Robinson imprime et distribue 50 000 tracts de protestation à travers la ville. En une nuit.
Quand Colvin est arrêtée en mars, les militants hésitent. Ils négocient plutôt avec les autorités. Sans succès.
Alors pourquoi Parks et pas Colvin?
Les stratèges considèrent que Colvin, jeune et enceinte, ne constitue pas un symbole convenable. La presse ségrégationniste pourrait exploiter sa situation pour discréditer le mouvement.
Parks, au contraire, incarne ce qu’ils cherchent. Elle est une des femmes les plus respectées de la communauté noire, son caractère est irréprochable, son engagement profondément enraciné. Elle dirige la section jeunesse de la NAACP à Montgomery et dira plus tard que sa colère face au lynchage d’Emmett Till, 14 ans, et l’impunité de ses meurtriers l’ont poussée
à prendre position.Environ 40 000 usagers noirs, soit la majorité des utilisateurs de bus, boycottent le système le 5 décembre. Le boycott durera 381 jours, jusqu’à ce que la Cour Suprême statue le 20 décembre 1956 que la ségrégation dans les bus est inconstitutionnelle.
Dans mon livre *La nuit est longue, mais la révolution vient*, j’explique que le bon stratège n’est pas celui qui crée des occasions extraordinaires.
Le bon stratège reconnaît quand l’ordinaire devient exploitable.
Des femmes noires se faisaient expulser des bus depuis des années à Montgomery. Plusieurs cas ont été étudiés puis rejetés par les leaders.
Ils attendaient trois choses simultanées. Un symbole inattaquable. Une infrastructure prête. Un moment de tension maximale.
Quand ces trois éléments convergent le 1er décembre, la révolution commence.
Tu vois l’enseignement?
Dans notre contexte togolais, on a probablement déjà tous les ingrédients. Des injustices répétées. Une population fatiguée. Des organisations qui existent.
Ce qui manque, c’est peut-être la discipline d’attendre le bon moment et la bonne personne. De préparer l’infrastructure en silence, comme le WPC l’a fait pendant des années.
De refuser de se précipiter sur chaque incident, mais de choisir celui qui maximise les chances de victoire.
*La nuit est longue, mais la révolution vient* détaille ces stratégies gagnantes que les mouvements de libération ont appliquées à travers l’histoire. Des tactiques concrètes que nous pouvons adapter à notre lutte.
Parce que comprendre pourquoi Parks et pas Colvin, c’est comprendre la différence entre s’agiter et gagner.
*Gnimdewa Atakpama*, auteur de *La nuit est longue, mais la révolution vient*.