Misères dans l’affaire Bertin Agba, défense du coup de force électoral en préparation…
 
. Un observateur : « Monsieur Bodjona a trop vite oublié ses misères récentes ! »
 
Il était ce qu’il convenait d’appeler le Jassinto du jeune monarque (allusion à cet homme de main de Mario Liberato dans le feuilleton « Cercle de feu »), c’est-à-dire son tout premier sbire, son homme à tout faire. Très prolixe et dans tous les coups fourrés (politiquement parlant), il resplendissait la vie. Mais entre-temps il a connu une traversée du désert. Celui qui était énorme dans tous les sens du terme, ce qui lui avait valu la belle caricature de ministre « grand format », s’invitait dans tous les débats, est le premier envoyé au front quand il s’agit de défendre Faure Gnassingbé et force l’admiration même dans les rangs de ses détracteurs parce qu’il ne manquait pas d’argument – en tout cas il le faisait mieux que l’autre avocaillon caricaturé par un confrère de « la vache qui rit » -, a dû perdre son latin, mais aussi l’appétit, le sommeil, la forme. Mais aujourd’hui il semble retrouver des couleurs. Et surtout son zèle habituel qui le voit défendre Faure Gnassingbé avec toutes ses tripes, narguant proprement ses adversaires politiques et les populations. Lui, c’est Pascal Akoussoulélou Bodjona, ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales, porte-parole du gouvernement.
 
« Grand format » retrouve des couleurs
 
L’homme s’illustre aujourd’hui comme le Jacques Verges du coup de force électoral conduit par le pouvoir en place dans la perspective des prochaines législatives et locales. C’est un secret de polichinelle, ces élections sont déjà verrouillées, au regard des manœuvres du gouvernement. Le processus est conduit dans un unilatéralisme provocateur, contrairement à l’esprit recommandé par l’Accord politique global (Apg), et c’est manifeste qu’on fonce tout droit dans le mur. Mais Pascal Bodjona trouve les moyens de faire croire le contraire.
 
Prenant la parole au nom du gouvernement lors de la réception offerte par le Chef de la Délégation de l’Union Européenne au Togo, Patrick Spirlet à l’occasion de la journée de l’Europe célébrée le mercredi 9 mai dernier, le ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales n’a eu aucun pincement au coeur à déclarer à ses interlocuteurs que les prochains scrutins seront transparents, justes et équitables, comme les élections organisées ces dernières années au Togo – hum…-. La réussite des prochains scrutins « viendrait confirmer pour toujours l’option qui est désormais celle du Togo de faire des compétitions électorales une occasion d’échanges d’idées dans la convivialité et la fraternité retrouvées », a-t-il indiqué.
 
A quelques mois de ces échéances très attendues, c’est manifeste qu’il y a une crise de confiance entre les acteurs politiques, et le processus est dans l’impasse. En cause, la volonté du pouvoir en place de conduire les réformes et les préparatifs de façon unilatérale. Les différents dialogues ouverts avec l’opposition crédible ne sont que des trompe-l’œil. Le CPDC dit rénové n’est qu’une chambre d’enregistrement des désidérata du pouvoir. Le dialogue avec l’opposition parlementaire a fait long feu. Deux projets de Code électoral et de découpage ont été élaborés de façon unilatérale, des kits électoraux convoyés de la RD Congo et en train d’être conditionnés pour la fraude…la mauvaise foi des gouvernants est palpable, et tout est manifestement fait pour pousser l’opposition au boycott. Mais Pascal Bodjona trouve que ce sont leurs adversaires politiques qui manquent de bonne foi. C’est ainsi qu’au sortir de la rencontre de lundi improvisée à la Primature pour discuter du cadre électoral et mendier la caution de l’opposition crédible au coup de force en préparation, l’homme a proprement chargé les boycotteurs de l’Alliance nationale pour le changement (Anc), de l’Organisation pour bâtir dans l’union un Togo solidaire (Obuts), et dans une moindre mesure, du Comité d’action pour le renouveau (Car) et du Parti du renouveau et de la rédemption (Prr). Ils doivent répondre à l’appel et faire des propositions (même si nous avons déjà pipé les dés), a-t-il pesté, l’air très sérieux. Une telle sortie devrait séduire les esprits naïfs, qui verraient en les dirigeants de ces partis les véritables problèmes. Et pourtant les arguments évoqués par ces derniers pour justifier leur bouderie ne manquent pas de légitimité ; et en son âme et conscience, Pascal Bodjona le sait. On doit mettre à leur disposition les copies des projets de code électoral et de découpage afin qu’ils l’étudient et préparent leur argumentation. Et c’est aussi simple que ça ! Ne pas le faire et peindre les autres comme manquant de bonne volonté, c’est plutôt révéler sa mauvaise foi.
 
« Qu’il se trouve des gens à défendre ce forcing du pouvoir en place, ce n’est pas une surprise ; mais que ce soit un certain Pascal Bodjona qui a récemment traversé une zone de turbulence et manqué de peu l’enfer qui s’y emploie, avec autant de zèle, je ne m’y attendais pas…Ce monsieur a trop vite oublié ses misères récentes ! ». C’est la réaction qu’a eue un compatriote devant les dernières sorties de l’homme. Et ils doivent être nombreux, les Togolais à avoir la même réaction, au vu des misères qui lui ont été récemment faits par ceux qu’il s’est remis à défendre.
 
L’enfer évité de justesse
 
Jusqu’à ce jour, difficile de savoir le péché qu’il a au juste commis. Mais toujours est-il qu’il a été pris en aversion « présidentielle » par son employeur, et il a voulu se défaire de lui par le biais de l’affaire Sow Bertin Agba, le richissime homme d’affaires togolais arrêté depuis le 7 mars 2011 pour une histoire d’escroquerie présumée sur l’Emirati Abass Al Youssef que ce dernier n’arrive pas à prouver. Torture, menaces, intimidations, tout a été mis en œuvre pour obliger le Directeur général d’OPS Securité à impliquer son frère Pascal Bodjona, mais il a résisté et l’a même innocenté. Mais ses détracteurs n’en sont pas restés là. Cette formule ne marchant pas, les médias locaux sont mis à contribution pour diaboliser le ministre « grand format » et le soumettre à un lynchage médiatique. Certains ne s’étaient pas retenus de le désigner ouvertement d’escroc. Un pseudo magazine béninois du nom de « Managers » dont on ignorait jusque-là l’existence y est allé de sa touche, impliquant formellement l’homme dans l’affaire. Les manœuvres étaient arrivées à un point où il devait même être entendu par le juge d’instruction.
 
A l’époque Pascal Bodjona était seul au monde. En tout cas ceux qu’il défendait avec ses couilles l’ont abandonné, un euphémisme pour ne pas dire que ce sont eux-mêmes qui lui en voulaient. Le ministre « grand format » calligraphe 300 pages est devenu « petit format » 32 pages. L’embonpoint, le sourire, le sommeil, son latin, ces traits qui le caractérisaient, il les avait tous perdus. Lors des rares manifestations officielles auxquelles il était invité, il restait recroquevillé sur son siège, droit dans ses souliers, le regard absent. Ce n’était tout simplement pas du Pascal Bodjona. Ses services n’étaient plus requis pour présenter sur la TVT les comptes rendus des conseils des ministres, il n’était plus envoyé au front…Etait-ce juste pour sa pseudo implication dans l’affaire Agba Bertin ? Ou bien avait-il cocufié son employeur ? Plein de questions trituraient nos méninges, car à un moment donné il était même pris en aversion par celui-là même qui ne pouvait pas aller aux chiottes sans son aide. On se rappelle cette image de Faure Gnassingbé snober proprement Pascal Bodjona et éviter de lui serrer la main le 21 juillet 2011 lors des Evala dans le canton de Pya, devant les caméras. A un moment donné, il était même question de le virer du gouvernement.
 
On ne pouvait pas comprendre qu’un tel sort soit réservé par Faure Gnassingbé quelle qu’en fût la raison, à un homme qui était tout pour lui. Nous étions de ceux qui compatissaient à son sort et relayaient ses différents aspects dans nos colonnes au point de donner l’impression de le défendre. Et au sein de l’opinion, beaucoup de Togolais s’étaient aussi apitoyés sur son sort. Au cours de cette traversée du désert, ses seuls amis se trouvaient au sein de la population. Et quand un tel homme retrouve des couleurs et se met à narguer ceux qui s’apitoyaient sur son sort en défendant le coup de force électoral en préparation par le pouvoir, il y a de quoi regretter la compassion à lui vouée à l’époque. Un scénario qui rappelle fort bien l’histoire du lion tombé dans un trou qui a supplié la chèvre qui passait fortuitement dans les parages de l’en sortir, mais qui une fois hors du trou, sauta sur la chèvre et la dévora.
 
Cet article va certainement susciter une riposte de la part de certains confrères inconditionnels du ministre à cause de sa magnanimité à l’égard de la presse et spécialistes en la matière. Mais, de grâce, qu’on évite des raisonnements de fosse septique et épargne les lecteurs des écrits du genre « Qui en veut au ministre Pascal Bodjona ? » et de voir derrière cet article la main de ses détracteurs. Ce serait une façon pour eux de rendre gloire au Créateur de les avoir dotés de tout le kit nécessaire pour mener un raisonnement équilibré. On y reviendra sans doute.
 
Tino Kossi
 
liberte-togo.com
 

LAISSER UNE RÉPONSE

Please enter your comment!
Please enter your name here