C’est pour la seconde fois en 20 ans que Gnassingbé Eyadema subit une telle déconvenue. En effet, la stèle de feu Gnassingbé Eyadema qui était au centre d’une polémique en début de semaine, a été déboulonnée hier par le pouvoir en place, qui visiblement revient à de meilleurs sentiments en décidant de mettre fin à la forfaiture qui était en train d’être commise contre la mémoire du peuple togolais.
 
La polémique a éclaté en fin de semaine dernière, lorsque les populations de Lomé ont découvert avec stupéfaction que le régime de Faure Gnassingbé, le fils de feu général Gnassingbé Eyadema, érigeait à la Place de l’Indépendance, à quelques mètres seulement du lieu où trônait fièrement la géante statue  d’Eyadema avant d’être déboulonnée en 1991, un buste à l’honneur de son père défunt. Quel pouvait en être le motif ? Sans attendre, l’Alliance nationale pour le changement (Anc) de Jean-Pierre Fabre a dénoncé ce projet et exigé le retrait des lieux, du buste de feu Gnassingbé Eyadema.
 
Les Togolais n’oublient pas que le régime RPT a toujours manifesté la volonté de gommer les attributs de la souveraineté internationale chèrement acquise le 27 avril 1960 par les pères fondateurs de la nation togolaise, a dit le parti de Jean-Pierre Fabre. Les Togolais ont encore en mémoire les décisions iniques du parti unique visant à supprimer le 27 avril et à détruire le monument de l’indépendance, le drapeau national, les armoiries, l’hymne national ainsi que la devise de notre pays, poursuit le communiqué de l’Anc. « Le régime RPT a vainement essayé en particulier, de démanteler le monument de l’indépendance, au prétexte fallacieux de sa disharmonie dans le paysage, dès la construction de la « maison du RPT », du CASEF et de l’hôtel 2 Février. Aujourd’hui, le régime tente d’assouvir ses desseins jadis rejetés par la résistance du peuple togolais, en érigeant la statue du dictateur Gnassingbé Eyadéma à la Place de l’indépendance. Cette tentative de réécrire l’histoire de notre pays en faisant entrer Eyadema au panthéon de la lutte pour l’indépendance est une imposture. En effet, pendant que le peuple togolais livrait au prix du sang, le combat pour sa libération, Etienne Eyadéma trucidait les Fellaghas, combattants de l’indépendance, dans les Aurès en Afrique du Nord. Il n’a pas pris part à la lutte pour l’indépendance du Togo et n’a apporté aucune contribution à l’émancipation du peuple togolais, pour figurer sur un quelconque piédestal national », précise ce communiqué.
 
Selon les témoins qui ont assisté à la scène hier, ce sont les mêmes ouvriers qui avaient travaillé à ériger les stèles qui les ont démontées une à une sans rien laisser à la place. Outre les bustes de Sylvanus Olympio, Kléber Dadjo et Nicolas Grunitzky, le buste qui a le plus soulevé de tollé, celui de feu Gnassingbé Eyadema a été lui aussi démonté et caché sous une bâche  puis emporté dans la nuit vers une destination inconnue.
 
Y aurait-il un lien entre cette décision du pouvoir togolais et une lettre envoyée par l’Union des forces de changement (Ufc) à Faure Gnassingbé, lettre par laquelle l’Ufc annonce sa décision de ne pas prendre part aux festivités officielles du 27 avril ? « Par lettre en date du 12 avril 2011 adressée au Chef de l’Etat, annonce une déclaration publique de l’Ufc, le Président National de l’UFC, M. Gilchrist OLYMPIO a attiré sa haute attention (Faure Gnassingbé, ndlr) sur le caractère inapproprié et historiquement injustifiable de l’érection des statues de tous les Chefs d’Etat ayant dirigé le Togo depuis 1960 à la place de l’indépendance. Il a suggéré qu’un autre lieu puisse être aménagé pour accueillir les statues de tous ceux qui ont dirigé le pays depuis son accession à la souveraineté internationale. Cette lettre a été suivie de plusieurs entretiens avec le Chef de l’Etat lui-même, et certains de ses plus proches collaborateurs, au cours desquels M. Gilchrist OLYMPIO a réitéré la position ferme et sans nuance de l’Union des Forces de Changement. Toutes les démarches effectuées pour annihiler ce projet furent vaines, aux motifs inacceptables que les travaux étaient déjà trop avancés, alors qu’il s’agit en l’espèce de prendre une décision politique conforme à la vérité historique, et allant dans le sens de la Réconciliation nationale. Le Monument de l’Indépendance est un symbole sacré pour le Peuple togolais. En conséquence, le Bureau directeur de l’UFC demande solennellement au Chef de l’Etat de jouer son rôle d’arbitre en revenant sur ce projet, et de faire aménager d’autres endroits dans la capitale pour accueillir les statues indûment érigées à la Place de l’Indépendance. Pour toutes ces raisons et compte tenu du symbole que représente cette place pour notre peuple, l’UFC ne pourra pas participer aux manifestations officielles de cette fête de l’indépendance », souligne la déclaration de l’UFC.
 
Mais voilà, lesdites statues viennent d’être démontées par le régime en place. L’Ufc décidera-t-elle de prendre sa place aux côtés de Faure Gnassingbé au podium du défilé de l’indépendance ? Wait and see.
 
Olivier A.
 
source: liberté hebdo