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Si le dieu de la manipulation, des montages grossiers et grotesques n’existait pas, le système RPT régenté par les Gnassingbé l’aurait inventé pour légitimer ses dérives autoritaires. Nous sommes au cœur d’un système qui fabrique des mentalités de crétin et chosifie l’homme. Dans un pays où les premiers responsables au sommet de l’Etat s’entendent pour falsifier le rapport d’une institution constitutionnelle comme la CNDH dans les locaux de la Présidence en vue de protéger des tortionnaires, donc des criminels, il faut alors s’attendre à tout, et rien de ce qui arrivera dans ce pays n’étonnera plus personne. Après 46 ans de règne, d’obscurantisme, de dérives autocratiques et autoritaires, le système RPT dans son état comateux, déliquescent et évanescent s’enfonce dans les profondeurs abyssales de la pourriture, faisant de tous ceux qui sont à son service de vils individus capables de se muer en n’importe quel personnage hideux pour soutenir et défendre l’indéfendable. Plus de repère, plus de lucidité, évidement plus de bon sens, le mensonge est désormais l’unique moyen pour préserver le système.
 
Le vendredi 25 janvier, le ministre de la Sécurité et de la Protection civile a fait dans les locaux de son ministère une conférence de presse nauséabonde au cours de laquelle il a cru devoir livrer les premiers éléments de l’enquête sur les incendies. Ceux qui ont suivi sa prestation sur les écrans de la TVT au JT de 20h n’avaient d’autres choix que de verser des larmes. Une victime des incendies face à l’incongruité des arguments, a fini par faire une crise d’hypertension. Au sein du système, ceux qui ont encore un grain de lucidité ont aussi crié au scandale. Même au temps des années noires de l’URSS avec le KGB et la PRAVDA, on n’a pas eu recours aux montages aussi saugrenus, aberrants pour envoyer les opposants de Staline au goulag. Faure Gnassingbé, c’est du Eyadema en pire, et Yark venait de le prouver en exhibant comme preuve de son enquête un bidon de 5 litres, trois paquets d’allumettes et quelques bouteilles de cocktails Molotov (sic) qui auraient servi, selon lui, à mettre le feu au grand marché de Lomé. Cette sortie scandaleuse du ministre au lendemain d’un point de presse du Procureur de la République n’est pas sans susciter une série de questions légitimes.
 

Qui du Procureur de la République ou du ministre a autorité sur l’enquête ?

 
Cette question a tout son sens au vu de la comédie d’enquête qui se joue actuellement autour de ce drame qui frappe l’ensemble des Togolais. Selon l’article 11 du Code de Procédure Pénale : « La police judiciaire est exercée sous la direction du Procureur de la République et des juges agissant comme membres du Ministère public, par les officiers et agents de Police Judiciaire et par les fonctionnaires et agents auxquels sont attribuées par la loi certaines fonctions de police judiciaire ». L’article 15 du même code précise de façon claire ceux qui ont la qualité d’officier de police judiciaire, à savoir « Le Procureur de la République et ses substituts, les juges chargés du Ministère public, les juges d’instruction, les officiers de gendarmerie, les commandants de brigade ,et les chefs de poste de gendarmerie, le Directeur de la sureté nationale et son adjoint, les préfets et sous-préfets, les maires, les commissaires de police et chefs de poste de police et enfin les sous-officiers de gendarmerie, les officiers de police et les officiers de police judiciaire ». Plus loin, l’article 18 précise : « Les officiers de police judiciaire sont tenus d’informer sans délai le Procureur de la République ou le juge chargé du ministère public des crimes et délits dont ils ont connaissance. Dès la clôture de leurs opérations, ils doivent lui faire parvenir directement l’original ainsi qu’une copie certifiée conforme des procès-verbaux qu’ils ont dressés ; les objets saisis sont mis à sa disposition ». Dans le cas des incendies qui ont frappé les marchés, l’enquête est conduite par le Parquet et un juge d’instruction devait être désigné. En d’autres termes, si l’on devait faire le point sur l’évolution de l’enquête à l’opinion, seul le Procureur de la République est habilité à le faire.
 
Le 24 janvier, le Procureur de la République a organisé un point de presse au cours duquel il a juste déclaré que dans le cadre de l’enquête en cours, 17 personnes avaient été interpellées. Il a continué en disant que l’enquête se poursuit, mais n’a présenté aux journalistes aucun objet faisant partie du corps du délit. Au lendemain de cette sortie, c’est autour du ministre de la Sécurité et de la Protection civile d’improviser une conférence de presse pour faire à son tour, en lieu et place du Procureur de la République, le point de l’enquête et les prétendues pièces à conviction. Que comprendre alors de cette sortie médiatique du colonel Yark alors que c’est au Procureur de la République qu’il revenait de le faire ? De deux choses l’une; soit le Procureur de la République n’a aucune autorité sur l’enquête, soit le montage avec les fameuses pièces à conviction était tellement grotesque qu’il a refusé d’endosser la responsabilité, laissant ainsi le soin à ceux qui ont l’habitude de fabriquer ces genres de choses de le faire. Dans les deux cas, cette enquête souffre de crédibilité et ses prétendus résultats sont d’une grande légèreté.
 

Le Colonel Yark, ses fameuses pièces à conviction et ses mouchards

 
Dès l’arrestation du Vice-président de l’OBUTS le dimanche 13 janvier, juste au lendemain de l’incendie du grand marché de Lomé, on s’attendait plus ou moins que le pouvoir de Faure Gnassingbé tente de coller ces actes aux responsables du CST qui avaient organisé dans la même période trois jours de manifestations baptisées les «derniers tours de Jéricho». Mais on ne pouvait pas imaginer un seul instant que le colonel Yark Damehame, officier supérieur de la Gendarmerie nationale, ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le colombo gondwanais pouvait descendre aussi bas dans ses montages. Si le ridicule pouvait tuer, il y a longtemps que ces gens auraient disparu.
 
Pendant que l’on espérait une investigation sérieuse, méthodique et scientifique pour démasquer les auteurs et commanditaires de ces actes criminels, voilà notre cher Yark qui ressuscite les méthodes du passé au temps fort d’Eyadéma. Une histoire à faire dormir debout, avec pour pièces à conviction trois bouteilles présentées comme des cocktails Molotov, deux paquets d’allumettes et un bidon bleu de 5 litres. Pour lui, ce sont ces armes qui ont servi à perpétrer le crime au grand marché de Lomé, après une réunion au siège de l’ANC et une cérémonie mystique au cimetière de Kamalodo. Et le colonel Yark continue dans ses fanfaronnades et contradictions en déclarant dans un premier temps qu’après la cérémonie mystique, les jeunes se sont retrouvés devant la cathédrale et se sont éparpillés pour rentrer de façon mystique à l’intérieur de l’immeuble. Quelques minutes après, il affirme que ces mêmes jeunes y sont rentrés avec la complicité des vigiles pour ensuite répandre la poudre et positionner les bombes artisanales ( cocktails Molotov) avant de déclencher le feu. Assez saugrenu et surréaliste comme raisonnement.
 
Si ces jeunes avaient ces pouvoirs pour s’introduire de façon mystique dans l’immeuble du grand marché, au lieu d’aller brûler ce centre commercial, il y a longtemps qu’ils se seraient introduits directement chez Faure Gnassingbé à son domicile ou à la Présidence et en auraient fini avec lui. « De grâce, épargnez-nous de ces niaiseries », a plaidé un compatriote. Et puis, pourquoi jusqu’à ce jour, aucun des vigiles complices des jeunes arrêtés, selon les déclarations de Yark, n’a été présenté à la presse ? Concernant les trois bouteilles de cocktail Molotov présentées à la presse et les tessons de bouteilles exhumées au siège de l’ANC, il y a quand même un curieux amalgame qu’on tente de faire. Partout dans le monde où il y a des mouvements sociaux suivis de répression, les jeunes ont toujours recours aux cocktails Molotov pour se défendre. Que des jeunes de l’opposition fabriquent des cocktails Molotov dans la perspective des trois jours de manifestions baptisées les derniers tours de Jéricho pour faire face aux répressions aveugles des forces de l’ordre peut être un fait. De là à conclure maladroitement que c’est ce matériel qui a servi à incendier les marchés, comme le font les fameux officiers gondwanais est une déduction trisomique qui ne convainc personne. De plus, le cocktail Molotov pour ceux qui ne connaissent pas sa composition et son usage, est un matériel qui explose instantanément dès qu’il est allumé. En d’autres termes, si c’est réellement ce matériel qui a servi à déclencher le feu à l’intérieur de l’immeuble, la plupart des jeunes n’auraient pas eu le temps d’en sortir ; ils auraient péri et les riverains devaient entendre des explosions avant l’incendie. Ce qui n’a pas été le cas.
 
Quant aux mouchards présentés à la presse dans les locaux de la Gendarmerie, aucun d’eux dans leurs déclarations n’a reconnu avoir brulé un marché. Le plus compromettant pour la bande à Yark Damehame est l’usurpation d’identité et de nationalité faite par l’un de ces jeunes. Le fameux mouchard qui s’est fait passer pour un Sénégalais du nom de Mohammed Loum se nomme en réalité Tométy Toussaint. Outré par les propos mensongers de son neveu, Ayité Tomety, l’oncle du jeune homme a rompu le silence pour apporter son témoignage en public. « Nous étions tous à la maison ce jour-là quand l’une de nos cousines lui a téléphoné pour l’informer de l’incendie, puisqu’elle est revendeuse au grand marché. Il m’a ensuite réveillé en m’informant à mon tour. C’est de là que je l’ai remorqué sur ma moto et tous les deux, on s’est rendu au grand marché pour constater les faits. Je suis peiné de l’entendre dire qu’il était sur les lieux avant l’incendie », a déclaré ce dernier avant d’ajouter qu’il ne comprend pas ce qui arrive à son neveu.
 
Fait encore plus troublant, parmi ces mouchards présentés à la Télévision nationale, se trouve un jeune qui est un indicateur pour ne pas dire un agent de renseignement au service d’un officier supérieur de la Gendarmerie. Ce dernier se reconnaîtra certainement.
 
Ce jeune qui ne voulait pas se faire filmer le visage et qui a refusé de parler se nomme Beaugard. c’est un chargeur de bois qui habite le quartier Agoè dans le secteur communément appelé «Koffi Panou». Quatre jours avant les incendies, il aurait réveillé un matin sa famille et leur a distribué de l’argent. Il leur a ensuite dit que des choses vont se passer et si on le voyait à la télévision, de ne pas s’inquiéter. Et ce qui devrait arriver, arriva. L’un des membres du réseau de ce jeune qui travaille pour cet officier se trouve actuellement au Ghana sur la piste de certains militants de l’ANC. Comment se fait-il que des individus connus dans leur milieu comme agents de renseignement se retrouvent parmi les jeunes appréhendés dans le cadre des enquêtes sur les incendies des marchés? Pour qui roulent ces jeunes?
 
Que dire de tout ça, sinon que le Togo des Gnassingbé reste et demeure une République atypique, unique en son genre, une curiosité ? Un pays où la loi de la force prime sur la force de la loi, où les bourreaux se font passer pour les victimes. Le montage nauséeux que nous a servi en fin de semaine dernière la bande à Yark Damehame vient nous rappeler le côté obscur d’un régime autocratique et vampirique qui a réduit certains Togolais à des espèces en voie de disparition. En usurpant des prérogatives du Procureur de la République pour faire le point de l’enquête, le colonel Yark Damehame a certainement voulu démontrer à Faure Gnassingbé qu’il reste toujours un fidèle serviteur du système en place. Ce montage grossier suffira-t-il à lui épargner le sort de Pascal Bodjona que lui réserve le Prince ? Rien n’est moins sûr.
 
Ferdi-Nando
 
source : lalternative-togo
 

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