. Absence de communication de l’opposition sur le processus…

Le processus d’organisation des élections locales est manifestement irréversible. Les choses semblent s’accélérer ces derniers temps et l’on connaît désormais les dates clé du processus, à savoir celle de la révision des listes électorales et celle du vote proprement dit. Mais une chose est à déplorer, l’absence de communication de la part des forces démocratiques autour du processus, notamment la révision des listes électorales…

Révision le 16 mai et élection le 30 juin

Le pouvoir avait entouré la question d’un certain secret d’Etat, sans doute pour empêcher l’opposition et l’ensemble des forces démocratiques pour l’alternance de s’y  apprêter, pendant que le RPT/UNIR lui-même avait déjà déployé sur le terrain ses cadres pour préparer la base et les populations en général à ce scrutin. Le dessein caché, c’était de prendre de l’avance sur ces forces contestataires. Mais les choses semblent évoluer et la date du scrutin ne relève plus du mystère.

En attendant sa validation par le Conseil des ministres à travers un décret, comme l’exige la loi électorale, la Commission électorale nationale indépendante (CENI) présidée par Ayassor Tchambakou a retenu le 30 juin 2019 comme la date du scrutin. Ainsi, sauf cataclysme, c’est à cette date que les Togolais seront appelés aux urnes pour élire les conseillers municipaux, mille cinq cent vingt-sept (1527) au total pour les trente-huit (38) circonscriptions électorales lors des prochaines communales. Voilà qui devrait donc situer l’opposition, la société civile et tous les candidats à ce scrutin et les aider à mieux s’organiser, mais aussi les électeurs à s’y préparer.

Autre date importante, celle de la révision des listes électorales. L’opération est prévue par la CENI au 16 mai prochain, dans exactement deux semaines donc. Et elle est censée avoir lieu durant trois jours. Manifestement, il faut voir en l’organisation de cette révision des listes électorales une magnanimité de Faure Gnassingbé, car selon les sources, c’est la suite de la demande formulée par la Coalition de l’opposition lors de leurs échanges le 20 mars dernier. Soit. Faut-il le rappeler, le ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales Payadowa Boukpessi avait dardé que cette opération ne serait pas prévue par le Code électoral, sous prétexte que les locales sont une nouveauté…

Par ailleurs, en prélude à cette révision des listes électorales, la CENI a procédé le dimanche 28 avril dernier, à la nomination des présidents des Commissions électorales locales indépendantes (CELI). Ils sont au total trente-huit (38), correspondant au nombre de CELI existantes sur le territoire national.

Participera, ou participera pas ?

C’est à n’en point douter la dernière ligne droite pour les locales qui est amorcée, avec ces dernières annonces de la CENI, la machine électorale est plus que jamais lancée. C’est la première fois que le Togo organisera ce scrutin depuis 1989, trois décennies donc, particulièrement depuis la prise des 22 engagements par le pouvoir Eyadema le 14 avril 2004 à Bruxelles où l’organisation des locales y a été inscrite. Ce scrutin historique est crucial pour l’enracinement de la démocratie à la base et a toujours été réclamé par l’opposition. Mais  difficile d’affirmer si elle y participera dans sa globalité.

En effet, l’opposition représentée par la Coalition, tout en se déclarant au sortir de ses journées de réflexion polémiques prête à concourir aux locales après avoir (légitimement) boycotté les législatives « kadangaises » du 20 décembre 2018, avait tout de même conditionné sa participation à la mise en œuvre des réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales prescrites par l’Accord politique global (APG), même si elles  n’auraient pas grand lien direct avec les locales. Le régime a au forceps enclenché le processus à l’Assemblée nationale depuis début avril ; mais il n’est pas évident qu’il soit conduit à terme avant le 30 juin retenu pour le scrutin local. Déjà il y a une polémique sur le texte soumis à étude de la Commission des lois. Le pouvoir y a introduit son propre projet taillé sur mesure pour Faure Gnassingbé alors que la Coalition de l’opposition et d’autres voix autorisées réclament la proposition de l’expert de la CEDEAO manifestement plus respectueuse des aspirations du peuple togolais à l’alternance.

Certains observateurs se trouvant dans les secrets des dieux croient dur comme fer que le pouvoir fera trainer les choses et ne mettra pas en œuvre ces réformes avant le 30 juin, histoire de pousser l’opposition une fois encore au boycott des locales, même si certaines de ses composantes y prendront part forcément. Ce que ne veut pas entendre de cette oreille une frange non négligeable des forces démocratiques. « Il n’est pas question de boycotter ces locales pour quelque raison que ce soit. On ne peut pas laisser et la Présidence de la République, et le Gouvernement, et l’Assemblée nationale, puis aujourd’hui les Communes entre les mains du régime et ses accompagnateurs (…) », dit catégorique un acteur de la société civile. A l’analyse, le seul véritable enjeu de ces locales attendues, ce n’est pas tant la victoire des forces démocratiques, mais l’urgence de ne pas laisser le RPT/UNIR et ses béquilles se partager les 1527 sièges de conseillers municipaux et accaparer encore la gestion des collectivités locales…

Pas de communication de l’opposition sur la révision des listes

Ce serait peut-être naïf de croire que l’opposition véritable va remporter la mise à ce scrutin. Il n’y a pas plus de transparence ou d’équité dans l’organisation que lors des précédentes élections. Mais au vu de l’enjeu crucial de ces locales, il faut déplorer l’absence de communication, du moins sa faiblesse dans les rangs de l’opposition.

Il y a une évidence depuis quelque temps, la démobilisation des populations des élections. Les Togolais ont été en effet découragés par les conditions d’organisation des législatives et n’ont pas jugé utile d’y participer. Beaucoup ont opté pour l’indifférence à toutes les élections depuis plusieurs années. Il va donc falloir les convaincre de participer aux locales attendues. Mais en plus, par rapport à la révision des listes électorales, il y a un travail sérieux de sensibilisation à mener.

Ils sont nombreux, les Togolais à n’avoir pas pris part à l’opération organisée en prélude aux législatives du 20 décembre 2018, sur appel de la Coalition de l’opposition, mais aussi de la société civile responsable. Et pour la plupart, ce sont les militants des partis membres de la C14, mais aussi en général les populations acquises à la cause de l’alternance et qui l’ont manifesté durant le mouvement de contestation.  En l’état actuel des choses, ils ne sont pas électeurs, et lorsqu’on voit la proportion du boycott des législatives, c’est assez inquiétant. Les observateurs avisés s’étaient accordés à dire que le taux de participation réel tournait autour de 15 %, mais le pouvoir avait usé de jonglages pour le porter à 59%. «En l’état actuel du fichier électoral disponible, ce sont a priori les militants et sympathisants du pouvoir qui le remplissent. Ce sont eux qui ont participé au recensement en novembre dernier (…) L’opposition doit absolument sensibiliser ses militants et les populations afin qu’ils aillent massivement s’inscrire sur les listes au cours de la révision annoncée. Il faut les y préparer maintenant. Mais je ne vois pas les leaders se magner pour ça, c’est trop calme », regrette un observateur.

La Coalition de l’opposition est annoncée en conférence de presse ce jeudi, et le Front citoyen Togo Debout en meeting samedi prochain sur le terrain d’Akassimé ; certaines sources croient savoir que leurs responsables aborderont le sujet et appelleront les populations à aller s’inscrire sur les listes lors de l’opération censée avoir lieu les 16, 17 et 18 mai prochains. Vivement que l’opposition et les forces démocratiques corrigent cette anomalie…

 

Tino Kossi
 
source : Liberté
 

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