Il est de notoriété publique que la Justice togolaise est devenue un paillasson sur lequel Faure Gnassingbé essuie régulièrement ses sautes d’humeur et ses désidérata. Les acteurs de la Justice, particulièrement les magistrats sont des marionnettes qu’on manipule à volonté pour prendre des décisions curieuses à la limite du scandale. L’affaire dite d’atteinte à la sûreté intérieure de l’Etat qui a vu Kpatcha Gnassingbé et certains de ses co-accusés écoper de 20 ans de prison a montré à la face du monde comment la Justice de ce pays est réduite à un instrument de règlement de compte par le Prince. Si l’affaire Kpatcha Gnassingbé a montré la face hideuse de cette justice, celle dite d’escroquerie internationale vient illustrer la descente aux enfers d’une institution, par la volonté d’un seul homme, Faure Gnassingbé, mais avec la complicité de certains magistrats qui soit ont peur de perdre leurs fonctions soit sont arrosés de billets de banque, comme le pouvoir sait bien le faire.
Depuis l’arrestation de Sow Agba Bertin le 7 mars 2011, son passage mouvementé à l’ANR avec les séances de torture, le pouvoir de Faure Gnassingbé évolue d’instrumentalisation en gangstérisme juridique dont le summum a été l’arrestation rocambolesque de Pascal Bodjona à la suite d’une curieuse plainte additionnelle de l’Emirati Abbas Al Youssef. Le dernier acte de cette saga judiciaire rocambolesque est l’ordonnance de rejet de la demande de mise en liberté provisoire de Sow Agba Bertin rendue par le juge d’instruction du 4è cabinet, Mataké Kélouwani, le 28 septembre dernier. Ce document dont la Rédaction de L’Alternative s’est procuré une copie, ressemble à tout sauf un acte venant de la part d’un magistrat qui d’abord a étudié le droit et ensuite la magistrature.
Sur la forme, l’ordonnance de rejet est truffée de fautes grammaticales que ne saurait commettre un élève de la classe de Première. Sur le fond, ce sont juste des contorsions juridiques qui ont été alignées pour déduire au bout du compte le maintien illégal d’un citoyen togolais en prison, pour le plaisir d’un Prince en plein délire au sommet de l’Etat. Morceaux choisis : « Agba Sow Bertin, agé de 45 ans, né le 05 juillet 1967 à Lomé (P/Golfe), de Agba Suitina et de Pissang Awidina ; togolais, marié et père de trois enfants ; Président Directeur Général de société demeurant à Lomé quartier Tokoin-Hôpital ; se disant jamais condamné. » « Se disant jamais condamné », c’est tout de même extraordinaire de la part d’un juge d’instruction.
Si le sieur Agba Sow Bertin a été une fois condamné ou non dans sa vie, il revenait à la Justice de l’établir et de le signifier dans l’ordonnance. Ceux qui ont pondu cette ordonnance ridicule et l’ont peut-être fait endosser au juge d’instruction savent pertinemment que l’homme d’affaires n’a jamais été condamné dans sa vie, et que dans le cas d’espèce, il bénéficie d’un statut de délinquant primaire, et de ce point de vue, l’article 113 alinéa 2 du code de procédure pénale évoqué par les avocats de la défense pour exiger la libération de droit de leur client était valable. « Attendu qu’à la suite de la demande de mise en liberté provisoire introduite par l’inculpé Agba Sow Bertin, le juge d’Instruction l’avait purement et simplement rejeté au motif qu’il y avait encore beaucoup d’actes à accomplir en vu de la manifestation de la vérité ; que la Chambre d’Accusation ayant crue devoir ordonner sa mise en liberté provisoire sous caution ». Un juge d’instruction qui apprécie avec autant de mépris la décision d’une juridiction et même de la Cour Suprême, la plus haute instance en matière judiciaire en faisant usage de l’expression « crue devoir », il faut s’en attrister. Avec un tel magistrat, la Justice de notre pays est vraiment au fond du gouffre. Nous vous épargnons des commentaires sur toutes les autres incongruités contenues dans cette ordonnance qui, manifestement, attestent du degré de pourriture de la Justice togolaise.
Pour permettre à nos lecteurs d’apprécier eux-mêmes les fautes inimaginables et les incongruités de l’ordonnance du juge d’instruction, nous la passons en fac-similé. De toute évidence, ce pays est dans une dérive indescriptible.
Ferdi-Nando
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