« C’est être naïf que d’attendre encore des représentations du monde civilisé quelque pression sur le pouvoir de Faure Gnassingbé. Faure semble les avoir tous apprivoisés et ils ont désarmé. S’ils ne se taisent simplement pas devant les événements, ils feignent d’être préoccupés, ou font de la diversion lorsqu’ils consentent à agir… ». C’est la religion que s’est faite un compatriote sur la communauté internationale. De la diversion justement, le Haut commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme (Hcdh) et sa patronne Mme Olatokunbo Ige en font avec la problématique de l’application des recommandations de la Commission Vérité, Justice et Réconciliation (Cvjr).
 
Lomé devra être aujourd’hui et demain, le cadre d’un atelier organisé par le Haut commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme (Hcdh), à l’endroit des Ong et des médias de Lomé Commune et de la Préfecture du Golfe. Selon les sources, il s’agit d’une rencontre de vulgarisation des recommandations de la Commission Vérité, Justice et Réconciliation (Cvjr) rendues publiques le 3 avril 2012, et la rencontre s’inscrit dans la droite ligne d’une campagne de sensibilisation lancée par le Bureau Togo du Hcdh en vue d’assurer une « large diffusion » du rapport et des recommandations. « L’objectif à terme de cette campagne est de former, à l’échelle nationale, 150 membres de la société civile et des médias sur le rapport et les recommandations ainsi que sur leurs contributions pour le suivi des travaux de la Commission », explique la Représentante résidente du Hcdh, Mme Olatokunbo Ige. Le même exercice est censé avoir lieu plus tard à Kpalimé et à Kara.
 
Sept mois pour commencer la divulgation
 
Le Hcdh fait-il juste « quelque chose » pour ne pas donner l’impression de ne rien faire par rapport aux recommandations de la Cvjr ? En tout cas, l’initiative semble souffrir de légitimité, au regard du timing et de l’urgence du moment. Le rapport de synthèse ainsi que les recommandations dont l’application est censée booster la réconciliation, ont été rendus publics le 3 avril 2012. C’est peut-être une prérogative du gouvernement ; mais comment comprendre que Mme Olatokunbo Ige et son institution, les yeux des Nations Unies en matière de droits de l’Homme au Togo, attendent sept (07) bons mois pour organiser la divulgation de ces recommandations ? Après l’atelier de Lomé, il faudrait sans doute compter plusieurs semaines voire des mois pour voir organiser l’étape de Kpalimé, puis de Kara. Et à ce rythme, on pourrait peut-être voir passer un an.
 
A quand la mise en œuvre des recommandations ?
 
De tout le processus, l’application des recommandations formulées constitue sans doute l’étape la plus importance. C’est d’elle que dépendra la réconciliation tant chantée et quémandée par Faure Gnassingbé. Elle constitue même l’urgence de l’heure. Mais de toute vraisemblance, les Togolais ne devront pas l’attendre de si tôt. Car les décideurs ont d’abord la tête à la divulgation des recommandations. Et pourtant, il y en a dont l’application urge, en rapport avec les échéances électorales en vue.
 
Ce sont en tout soixante-huit (68) recommandations concernant des domaines variés qui ont été faites par la Cvjr et qui se résument au respect des droits de l’Homme. Il y en a qui concernent le respect du droit à la vie, la sécurité et la liberté, d’autres les réformes politiques, du système judiciaire, et d’autres encore les réformes foncières. De toutes, il y en a qui sont pressantes, et ce sont celles relatives à l’organisation des prochaines échéances électorales. Par exemple les réformes constitutionnelles et institutionnelles recommandées par l’Accord politique global (Apg) du 20 août 2006 et qui devront concerner le mode de scrutin, le mandat présidentiel, les conditions de transparence des élections, entre autres. Depuis plus de six (06) ans et l’insistance de la Cvjr, ces réformes essentielles ne sont pas mises en œuvre, alors que les élections législatives sont à nos portes. A cette allure, on risque tout simplement d’y aller sans matérialisation de ces recommandations.
 
L’impossible réconciliation
 
Les recommandations audacieuses pourront-elles être mises en œuvre ? La réconciliation est-elle possible au Togo ? Pas sûr que le Hcdh et Mme Olatokunbo Ige eux-mêmes y croient trop. La Représentante résidente elle-même a éprouvé le degré de sincérité (sic) de Faure Gnassingbé et s’est sans doute fait une belle opinion de la personne, dans le cadre de l’affaire Pascal Bodjona.
 
Mme Ige était en effet aux côtés de Mgr Nicodème Barrigah, dans les tractations visant à trouver une solution à l’amiable au différend entre Faure Gnassingbé et son ancien homme à tout faire, après l’arrestation de ce dernier le 1er septembre. Leur démarche était légitime vu la légèreté de l’accusation portée contre Pascal Bodjona, et ils pensaient pouvoir compter sur la bonne foi de Faure Gnassingbé. C’est cette démarche de conciliation qui a prévalu au prolongement du délai de garde à vue à la Gendarmerie de l’ancien ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et des Collectivités locales. Mais ils seront désillusionnés. Celui qui chante le pardon et la réconciliation sur tous les toits, n’a pas été capable de donner le bon exemple et pardonner son ancien bouclier politique (pour ce qu’il n’a pas fait), celui qui lui a rendu tant de services inestimables. Comment peut-il alors le faire pour les autres ?
 
Cette réalité, Mme Olatokunbo Ige en est bien consciente. La réconciliation au Togo n’est qu’un vain mot. Et cette agitation qui consiste à divulguer les recommandations a des allures d’une simple diversion pour donner l’impression de faire « quelque chose ».
 
Tino Kossi
 
liberte-togo
 

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