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Les militaires viennent de mettre fin à une transition politique au Burkina-Faso alors que le pays se trouve à la veille des élections présidentielles et législatives. Cette intrusion de l’armée dans l’arène politique, selon les putchistes, serait due à la politique d’exclusion menée par le régime de transition qui a tout fait pour mettre hors jeu les ténors du régime Compaoré. Me Jean Dégli, ancien ministre de la transition au Togo, a fait le parallèle entre la situation qui prévaut actuellement au Burkina-Faso et celle que le Togo a vécue en 1991, où l’opposition avait voulu dissoudre le parti au pouvoir le Rassemblement du Peuple Togolais (RPT) alors qu’elle pouvait profiter de sa fragilité pour le battre à plate couture dans les urnes. C’était chez nos confrères de Nana hier dans l’émission 12-13.
 
Pour le plus jeune ministre que le Togo ait connu, chercher à exclure les tenants d’un régime, et les empêcher de prendre part au processus électoral est une erreur grave que les opposants ne devraient jamais commettre. En le faisant, a-t-il indiqué, on fait d’eux des victimes et des martyrs. La solution pour les écarter en douce du pouvoir est très simple ; leur permettre d’aller à l’élection et le peuple livrera la sentence. « Je ne crois pas qu’il y a lieu d’écarter ces gens de la manière dont on le fait. Je crois que la meilleure manière de les écarter c’est de leur permettre de venir dans des élections et de se faire battre et surtout de se faire battre à plate couture », a-t-il conseillé, avant d’ajouter, « la plupart du temps, ces gens qui ont côtoyé les régimes dictatoriaux, les populations leur en veulent même si elles ne disent rien ».
 
Revenant sur le cas du Togo, qui a connu aussi une transition en 1991, qui malheureusement, s’était soldée par un échec, l’avocat trouve que cet échec est imputable à l’opposition, qui n’ a pas su faire bon usage de la popularité dont elle jouissait à l’époque face à un RPT moribond et en mal de légitimité. La plus grave des erreurs que les opposants togolais avaient commises à l’époque était de chercher à dissoudre le parti au pouvoir. « En 1991, je n’avais pas apporté mon soutien à ce processus », a rappelé le ministre, avant d’ajouter, « Je trouvais que c’était bête et idiot que de vouloir faire ça. Le RPT, à l’époque, était tellement impopulaire, qu’il valait mieux le maintenir ainsi et aller aux élections », a-t-il fait savoir, avant de rappeler, « Le RPT, à l’époque, selon le sondage que les Français avaient fait au Togo, ne représentait pas, avec le Général Eyadema plus de 10% de l’électorat. Je ne vois pas pourquoi on voulait dissoudre le RPT. Je n’avais pas compris. Je me suis dit qu’il y avait des gens qui avaient envie de s’amuser avec le feu, qui se sont amusés avec le feu pendant la conférence nationale en disant qu’on va destituer le Général Eyadema. Cela a crée tous les problèmes que ça nous a crées et puis quand ils sont sortis, ils sont restés toujours dans cette idée là. Une fois qu’ils ont posé le problème de la dissolution du RPT, et que cela leur a crée des ennuis, la plupart d’entre eux ont fui. Ils se sont déguisés en femme pour traverser la frontière », s’est rappelé le ministre, avant de se demander « S’ils étaient aussi forts pour dissoudre le RPT, pourquoi ils ne sont pas restés ». Selon lui, l’opposition avait toutes les cartes en main, mais l’égoïsme et le one-man show des uns et des autres ont fait perdre au peuple une chance historique de s’emparer du pouvoir. Jeune militant de l’opposition qu’il était à l’époque, n’avait pas donné son onction à une telle aventure qui risquait de mener l’opposition droit dans les murs. C’est cette erreur qui a permis à Eyadema de retrouver la plénitude de son pouvoir et de l’exercer librement jusqu’au 5 février 2005 où il est mort de sa plus belle mort. « Je n’ai jamais soutenu ça, je trouvais ça anormal complètement irréaliste et à la limite complètement idiot, parce que l’avantage que l’opposition tirait du nom RPT à l’époque est un avantage énorme. Il fallait laisser le RPT aller aux élections et ce parti serait battu à plate couture. On a commis une erreur grave, une erreur stratégique qui a permis malheureusement à ce que notre transition soit définitivement enterrée et que nous ayons le truc mi-figue mi-raisin que nous avons finalement eu avec le Général Eyadema qui est encore revenu au pouvoir en 1993 », a regretté l’avocat.
 
Cependant, il reste et demeure convaincu, à l’instar de l’ancien ministre transfuge de l’Union des Forces de Changement (UFC) Djimon Oré, qu’une transition est encore possible au Togo. « J’ai toujours pensé que le Togo avait besoin d’une transition et que cette transition pourrait être faite par ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui. Nous avons raté notre transition et le fait d’avoir raté cette transition a fait que le Togo est revenu à la case départ », a-t-il indiqué avant de proposer « Il y a lieu de créer une situation qui permette véritablement de régler les problèmes du passé et de préparer le terrain pour rentrer dans un avenir qui sera beaucoup plus radieux. Faure Gnassingbé peut faire cette transition, il peut balancer le Togo progressivement vers une véritable démocratie, un véritable Etat de droit ». Mais alors, la question que se pose l’opinion est de savoir si UNIR, avec sa majorité au parlement et la popularité dont il jouit sur le terrain est prêt à s’engager dans une quelconque transition.
Kiwi A.-W. / F.S
 
source : Télégramme 228

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