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« …Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester », Martin Niemöller.

Si le parlement du Togo n’a pas encore entériné un quelconque projet de loi qui voudrait que désormais, toutes les décisions rendues par les tribunaux d’instance devront être exécutoires et qu’il n’y a plus besoin pour la partie qui s’estime lésée de se pourvoir en appel, cela veut dire qu’il y a une injustice dont a fait preuve l’institution chargée de réguler le secteur médiatique, et que la justice togolaise –du moins ceux qui disent l’incarner- observe sans lever le petit doigt.

Sans vouloir donner quelque nom que ce soit, et sans prétendre défendre quelque média que ce soit, les Togolais ont écouté il y a quelques semaines un communiqué sur la télévision togolaise qui « retirait » le récépissé à un confrère de la presse écrite. L’institution avait-elle raison ? Le journal et son responsable étaient-ils fautifs ? Là n’est plus la question. Car au-delà des médias, il s’agit d’un procès entre deux parties.

Après que le Tribunal de Première Instance de Première classe de Lomé a rendu sa décision en accédant à la demande de l’institution, le journal et son conseil ont introduit un pourvoi en appel contre la décision du premier juge. Comme cela se fait partout dans le monde, au cas où la partie vaincue s’estime lésée. Et dans le cas présent, la Cour d’Appel a accédé à la demande du conseil du journal et programmé une audience sur le mois de mai prochain.

Mais alors, au nom de quels textes de loi la justice togolaise permet-elle à cette institution de produire une décision qui retire le récépissé au journal et son directeur nonobstant le recours devant la Cour d’Appel? Cet acte que d’autres peuvent brandir à titre de jurisprudence revient à dire que désormais, toute décision des tribunaux de première instance a la primauté sur les actes d’appel et les pourvois en cassation, quelle que soit leur nature. La justice togolaise serait-elle tombée aussi bas ?

Au commencement était la radio X-Solaire ; ensuite a suivi radio Légende ; City Fm et la télévision LCF ont emboité le pas. Aujourd’hui, c’est le tour de la presse écrite. Et demain les presses en ligne ? Une chose est de vouloir décapiter un média critique, mais une autre est de savoir le faire dans les règles de l’art. L’un après l’autre, des médias disparaissent lentement, mais sûrement, devant un silence inquiétant. Pourvu que les propos du Pasteur Martin Niemöller ne nous rattrapent point : « Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste. Quand ils ont enfermé les sociaux-démocrates, je n’ai rien dit, je n’étais pas social-démocrate. Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste. Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester ».

Mais le risque est grand que pour la énième fois, le Togo se retrouve devant des instances supranationales pour carence en droit. On ne le souhaite pas pour ce pays déjà éprouvé par trop de condamnations.

Godson K.

 
Source : Liberté N°2904 du Jeudi 18 Avril 2019
 

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