Le Rassemblement du Peuple Togolais (RPT, le parti au pouvoir) et l’Union des Forces de Changement (UFC), le principal parti d’opposition de Gilchrist Olympio ont signé en mai dernier, un accord de partage de pouvoir. Environ six mois après la signature de ce document, certains responsables de parti politique tentent de faire le bilan. L’Agence Savoir News s’est rapprochée de Me Isabelle Améganvi, deuxième vice-présidente de l’Alliance Nationale pour le Changement, parti créé en octobre dernier par d’anciens responsables de l’UFC. Outre ce sujet, Me Améganvi a abordé d’autres questions liées à l’actualité nationale dont le dossier « députés ANC » et l’incident survenu jeudi dernier à l’Assemblée nationale.
 
Savoir News: Quel bilan faites-vous de l’accord RPT-UFC, environ 6 mois après sa signature ?
Me Isabelle Améganvi: Un bilan est à tout point de vue négatif. Sur le plan socio économique, la misère dans laquelle croupissent les populations togolaises n’a jamais été aussi endémique. Les infrastructures routières, comme si elles ne voulaient pas être du reste, ont complètement rendu l’âme.
 
Quant au climat politique il reste plus tendu qu’avant la signature du fameux accord. La méfiance, le manque de confiance, l’exclusion, le sectarisme, la provocation, l’humiliation, la persécution, la répression, l’arbitraire, la violation systématique de la constitution, des Lois de la République et des droits de l’homme sont devenus le sport favori des autorités politiques de notre pays.
 
Avec une rare méchanceté, une haine implacable et un esprit de vengeance à nul autre pareil, Monsieur Gilchrist Olympio tire les royalties de cet accord en réglant, avec les appuis multiformes du RPT, des comptes à tous ceux qui, crime de lèse majesté, ont eu « l’audace » non seulement de refuser de le suivre dans son aventure mais encore ont contribué à la création de l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC).
 
Il ne lui reste plus aujourd’hui qu’à arracher de force la conscience, le libre arbitre et pourquoi pas l’âme de tous ceux qui ne pensent pas comme lui et dès lors l’objectif après lequel il semble courir si désespérément sera atteint.
 
Dans l’euphorie d’avoir réussi à faire rendre gorge à son principal opposant, le RPT gratifie M.Olympio de toutes ses largesses en lui offrant comme cadeau de sa soumission et pour service rendu, le parti UFC, son siège, ses biens, son groupe parlementaire, ce, à coups de gaz lacrymogène, de répression systématique et autres arrestations de manifestants, de confiscation de motos, de violation de la constitution, des Lois de la République, du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale, des statuts et du règlement intérieur de l’UFC d’avant le 12 Août 2010.
 
En s’assurant, ce faisant, une forte majorité à l’Assemblée Nationale lui permettant de tripatouiller à sa guise la Constitution pour se perpétuer au pouvoir, le RPT pense pouvoir ainsi régler les problèmes de notre pays.
 
En moins de 6 mois, cet accord a permis à Monsieur Gilchrist Olympio de détruire complètement l’UFC, ainsi que le Gouvernement, l’Assemblée Nationale et la Cour Constitutionnelle qui n’ont aujourd’hui pour institution de la République Togolaise que le nom. Comme dirait l’autre, cet accord a fait reculer notre pays cent ans en arrière !!!
 
Savoir News: Ce document a été signé par M. Gilchrist OLYMPIO, président de votre ancien parti. Comment percevez-vous aujourd’hui l’homme ? A-t il beaucoup changé ?
 
Me Isabelle Améganvi: M. Gilchrist OLYMPIO a plus que changé, il s’est mué en une boule de rage morbide, de méchanceté incompréhensible et de haine implacable. Il a définitivement proscrit de son comportement la crainte de Dieu, la mesure, la tolérance, la pitié, l’amour de l’autre, le pardon, le souvenir des sacrifices incomparables consentis ensemble pour lui par les togolais au prix de leur vie, sacrifiant sur l’autel d’un égoïsme démesuré les maigres acquis conquis de haute lutte par tout un peuple.
 
Savoir News: L’ANC vient à peine de naître. Est-ce la même philosophie que celle d’hier, car ce parti est fortement dirigé par d’anciens responsables de l’UFC ?
 
Me Isabelle Améganvi: Comme je l’avais souligné précédemment, l’UFC a été arrachée des mains de ses vrais fondateurs et militants et offerte comme trophée de chasse à Monsieur Gilchrist OLYMPIO.
 
Devant une telle situation et pour éviter des conflits inutiles qui n’ont pour seul et réel objectif que de les détourner des véritables enjeux de leur lutte, ceux qui sont restés fidèles à la ligne du parti, telle que redéfinie lors des deux derniers congrès des 18 – 19 Juillet 2008 et du 10 Août 2010, ont choisi de créer l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC). La philosophie, tirée des idéaux et de la lutte menée par les pères fondateurs de l’Ablodé, reste la même.
 
Cependant, tirant leçons de la crise qui a abouti à l’éclatement de l’UFC, les membres fondateurs de l’ANC ont pris sur eux de changer quelque peu les structures du parti, de renforcer la discipline en son sein, d’instaurer des principes plus démocratiques de prise de décisions, de renforcer entre les membres la solidarité et le respect de l’opinion de l’autre, et enfin, la propension à suivre un homme a fait place à l’engagement plus renforcé de défendre et de préserver plutôt les valeurs démocratiques et les idéaux du parti.
 
Savoir News: Des responsables de l’UFC, notamment son premier responsable, demandent aux députés proches de l’ANC de renoncer à leur mandat, conformément à un engagement signé peu avant les législatives de 2007. Dans quelles conditions avez -vous signé cet engagement ?
 
Me Isabelle Améganvi: Ces documents avaient été signés courant Août 2007 lors de la cérémonie d’investiture des candidats de l’UFC aux législatives du 14 Octobre 2007. Ils constituent un pacte d’adhésion aux valeurs de l’UFC d’antan et des conditions générales de candidatures, lesquels proscrivent la transhumance politique vers le RPT comme cela avait été le cas lors des législatures passées notamment, pour ce qui concerne les sieurs ALLAGBE, AGOUDA Moumouni et AKPAMOU pour ne citer que ceux là qui avaient quitter avec armes et bagages leur parti respectif pour immigrer vers le RPT.
 
De valeur hautement morale, cet engagement avait pour objectif de contraindre les futurs députés, que nous avions espéré majoritaires à l’Assemblée Nationale, de rester fidèles à la ligne du parti et à ne pas trahir la confiance des électeurs afin de permettre au parti de réaliser les grands chantiers qu’il s’est donné pour opérer le changement dans notre pays.
 
Pour ce faire, il était apparu nécessaire pour les responsables de faire préserver, par cet engagement, la cohésion au sein des députés à l’Assemblée Nationale en leur faisant prêter serment de proscrire, s’ils étaient élus, la transhumance politique.
Il est incontestable que jusqu’au 05 Octobre 2010, date officielle de leur démission du parti UFC, les Vingt députés de l’ANC étaient restés fidèles à la ligne de l’UFC originelle telle que réaffirmée lors des deux derniers congrès de 2008 et du 10 Août 2010.
 
C’est M. Olympio et ses comparses AGO qui se sont rendus coupables de transhumance politique en signant l’accord sus mentionné avec le RPT et en rentrant au gouvernement au mépris de la position clairement exprimée à maintes reprises par le parti, mettant ainsi fin à leur appartenance à la famille politique de l’opposition démocratique.
 
Savoir News: Vous êtes une juriste de haut niveau. Dans quelle situation un tel document peut il contraindre les élus du peuple à renoncer à leur mandat ?
 
Me Isabelle Améganvi: Il est clair qu’un tel document n’ayant aucune valeur juridique, ne peut aucunement contraindre les élus du peuple à renoncer à leur mandat parlementaire issu du suffrage universel.
 
Il s’agit d’un engagement unilatéral sous seing privé qui ne saurait avoir préséance sur les dispositions contenues dans la constitution qui est la Loi fondamentale de notre pays ou sur le règlement intérieur de l’Assemblée Nationale qui organise la gestion et le fonctionnement internes de l’Assemblée Nationale.
 
L’Article 52 de la Constitution interdisant « le mandat impératif », il est clair qu’un tel engagement, signé par des candidats d’un parti politique qui n’étaient même pas encore « députés régulièrement élus », ne saurait valoir démission au sens de l’article 6 du règlement intérieur de l’Assemblée.
 
Savoir News: De grands débats agitent depuis quelques jours la classe politique au sujet de la formation du groupe parlementaire ANC à l’Assemblée Nationale. Certains constitutionnalistes estiment qu’aucun groupe parlementaire ne peut encore porter le nom d’un parti politique en dehors de trois (RPT, UFC, CAR) dont les députés ont été élus par le peuple en 2007. Pour d’autres, la seule possibilité réservée aux députés ANC est de se constituer comme des « non inscrits ». Qu’en dites-vous ?
 
Me Isabelle Améganvi: Cette position est celle de Monsieur Abass BONFOH, Président de l’Assemblée Nationale qui n’est point un constitutionnaliste, loin s’en faut.
 
La formation ou la constitution des groupes parlementaires au sens du règlement intérieur de l’Assemblée Nationale obéit à six (6) conditions limitatives :
 
1 – un regroupement par affinité politique,
 
2 – un quorum de 1/25 des députés soit quatre (4) membres,
 
3 – un nom donné au groupe,
 
4 – la désignation par les députés concernés d’un Président et d’un Vice Président,
 
5 – la notification au bureau de l’Assemblée Nationale de la création du groupe
 
6 – la publication au journal officiel par le bureau de l’Assemblée du Groupe
 
Monsieur Abass BONFOH n’est point recevable à feindre d’ignorer la pertinence ce cette affirmation. En effet, lorsque M. Olympio, dans ses dérives, avait cru devoir, du haut de son piédestal, mettre irrégulièrement fin au mandat de Monsieur Jean Pierre FABRE en sa qualité de Président du Groupe Parlementaire UFC et nommé en ses lieu et place Monsieur AHOLOU, transposant ainsi de manière intempestive à l’Assemblée Nationale la crise qu’il a créé de toute pièce au sein de l’UFC, Monsieur Abass BONFOH avait clairement, à haute et intelligible voix, déclaré lors d’une séance plénière de l’Assemblée Nationale, qu’il ne voyait pour seule solution à la résolution de cette crise que la création d’un quatrième Groupe Parlementaire  !
 
D’où lui vient-il alors aujourd’hui, « constitutionnaliste de son état », de croire que la seule possibilité réservée aux députés ANC est de se constituer comme des « non inscrits » ? Cette curieuse nouvelle position provient assurément de la participation volontaire, agissante et délibérée de Monsieur Abass BONFOH au complot ourdi par M. Gilchrist OLYMPIO et ses comparses en collaboration avec ses nouveaux alliés.
 
Savoir News: Le parlement a été le théâtre la dernière fois d’une scène insolite. Quelle appréciation faites – vous de cette situation ? Ne pensez-vous pas que le comportement du député est un peu déplacé ?
 
Me Isabelle Améganvi: Déplacé le comportement du député OURO-AKPOH Tchagnao! Que dire alors de celui de Monsieur Abass BONFOH, Président de l’Assemblée Nationale de son état qui :
 
– au mépris du règlement intérieur, dirige le Parlement Togolais au gré de ses humeurs, exécutant au pied levé les ordres, autorisant les intrusions abracadabrantes de M. Gilchrist OLYMPIO dans le fonctionnement interne de l’Assemblée Nationale, aux motifs qu’il aurait signé avec le RPT la paix des braves !
 
– convoque une conférence des Présidents au cours de laquelle il exclut unilatéralement certains présidents de groupe parlementaire et de commissions, pour cause de leur appartenance à l’ANC !
 
– raconte des contre vérités à la plénière en affirmant avoir passé des annonces sur les médias pour convoquer ladite conférence des présidents et qu’il ne peut pas mettre la corde au cou audits membres pour les obliger à assister à la réunion !
 
– organise irrégulièrement une séance plénière sur un ordre du jour déterminé par une conférence des présidents amputée d’une grande partie de ses membres avec la participation d’un député qui n’y est point autorisé !
 
– évoque une information aussi capitale que celle relative à la démission de certains députés dans le point « divers » de l’ordre du jour !
 
– fait droit à de prétendues et fausses démissions non datées à lui transmises non pas par les intéressés eux mêmes mais par un député en pleine crise de complexe et en mal de sensation !
 
– croit pouvoir faire transmettre à la cour constitutionnelle par l’entremise du député complexé en question la démission d’une personne ne siégeant pas à l’Assemblée Nationale en l’occurrence Monsieur LAWSON Adjri Latévi !
 
– évoque la démission de leur mandat de députés de certains membres de l’Assemblée Nationale pourtant bien présents et siégeant à la séance plénière de la honte du jeudi 18 novembre 2010, Démission présentée par le nouveau prétendu Président du Groupe parlementaire UFC alors et surtout que les personnes « démissionnaires » dont il s’agit avaient au préalable pris le soin des semaines plus tôt de lui notifier leur démission dudit groupe parlementaire UFC et la création par leur entremise du nouveau groupe parlementaire ANC !
 
– refuse de faire établir, depuis près de Six (6) mois au député OURO AKPO Tchagnao, le passeport diplomatique et la plaque nominative ausquels il a légalement droit !
 
– donne au mandat parlementaire un caractère impératif en violation de la constitution en acceptant l’intrusion intempestive de M. Gilchrist OLYMPIO dans le fonctionnement interne de l’Assemblée Nationale.
 
– au mépris des discours politiques prônant le pardon et la réconciliation nationale avec la création à la clé d’un Comité Vérité Justice et Réconciliation, provoque l’indignation de l’ensemble des togolais en faisant des déclarations provocatrices et négationnistes sur les douloureux événements survenus en 2005 alors qu’il était Président de la République par intérim ! Et j’en passe.
 
Si ces agissements susmentionnés de Monsieur Abass BONFOH étaient conformes à la Constitution, aux Lois de la République Togolaise, au règlement intérieur de l’Assemblée Nationale et à la bonne morale le député OURO – AKPOH Tchagnao, aurait il réagi ?
 
Si Monsieur Abass BONFOH n’avait pas en outre délibérément organisé une plénière « honteuse » au cours de laquelle il a choisi délibérément de provoquer inutilement le député OURO-AKPOH Tchagnao, ce dernier aurait il réagi de la sorte ?
 
C’est cela deux bonnes questions auxquelles il convient d’inviter Monsieur Abass BONFOH à répondre en son âme et conscience.
 
Propos recueillis par Junior AUREL / Lambert ATISSO
 
source: Savoir News

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