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L’actualité sociopolitique tendue fait que les gouvernants togolais ont le feu au c…et sont sur toutes les tribunes pour tenter de se justifier et nier la crise pourtant réelle. La dernière, c’est le Premier ministre par défaut qui intervenait hier sur Radio France International (Rfi).

On le connaissait très suffisant, prenant ses interlocuteurs de haut, hyper méprisant à la limite de l’incivilité à l’égard des journalistes lors de ses interviews, accro de la politique de l’autruche et commère comme une femme d’une cour commune. Et Arthème Ahoomey-Zunu n’a pas manqué à sa réputation. Renvoyant par moments dans les cordes son interlocuteur du jour, le très apprécié Christophe Boisbouvier.

Grève des enseignants et manifestations d’élèves



Les élèves ont été manipulés par leurs enseignants pour descendre dans la rue. Voilà une argutie avancée au sein du sérail et qu’on envoie les griots de la 25e heure développer sur les ondes. On pensait sincèrement à un raisonnement initié par des individus et on ne s’attendait pas à voir un des porte-voix officiels du pouvoir le récupérer sur une tribune aussi sérieuse que Rfi, tant la logique professe une petitesse d’esprit. C’est ce que Son Excellence Arthème Ahoomey-Zunu a malheureusement tenté de reprendre à son compte. « Certains ont voulu utiliser les élèves pour faire des réclamations qui ne sont pas les leurs », a-t-il dardé, faisant sans doute allusion aux enseignants. Il récupère au profit du gouvernement la trêve de 48 heures décrétée par les travailleurs, parle d’apaisement et envoie une pique à ceux –ci : « …Vous verrez bien que ceux qui souhaitent que les choses s’enveniment n’en seront qu’à leurs frais».

altLes travailleurs qui débraient aussi sérieusement, poussant les élèves dans la rue pour réclamer leurs professeurs, des manifestations accompagnées de mort d’écoliers, c’est une première sous Faure Gnassingbé. Et au regard de leurs déclamations d’hostilité au gouvernement – « miabe doukplola, honviwo, honviwo woélekplomia ? » (Est-ce des idiots qui nous gouvernent ?), chantaient-ils dans les rues de Lomé – et de la tension dans leurs rangs – mise à sac du commissariat, de la mairie et autres à Dapaong -, on peut légitimement voir en ces manifestations l’expression d’un ras-le-bol général de la population. Crime de lèse Ahoomey-Zunu. Pour Son Excellence Monsieur le Premier ministre du Togo, cette vue des choses ressemble seulement à « ceux qui veulent exagérer ».

S’agissant des réclamations des enseignants, et particulièrement de l’augmentation des salaires requises, tout fier comme Méka dans ses accoutrements, l’invité s’offusqua contre les allégations faisant état du manque d’augmentation substantielle des salaires, et avance les hausses (sic) de 5 % en 2007, 3 % en 2008 et 10 % en 2012, comme pour dire que le gouvernement en a fait assez pour permettre aux travailleurs de vivre décemment.

Croisade contre les opposants dans l’affaire des incendies



C’est constant que l’affaire des incendies sert de prétexte à Faure Gnassingbé pour décapiter son opposition véritable, entendez le Collectif « Sauvons le Togo » dont plusieurs leaders et militants sont arrêtés et détenus ou inculpés, accusés d’être à l’origine des sinistres qui ont ravagé les deux grands marchés du Togo. Tout a été basé sur les déclarations des jeunes présumés pyromanes, et particulièrement d’un certain Mohamed Loum alias Toussaint Tométy. Et c’est un secret de Polichinelle, sauf pour Ahoomey-Zunu. « Qui peut dire que c’est sur la foi de ces aveux qu’ils sont inculpés ? », a-t-il répliqué à Christophe Boisbouvier, sans aucun pincement au cœur, évoquant la boutade d’indépendance de la Justice togolaise qui faisait sereinement son travail.

« Le jeune manipulé qui crache des noms » a changé de langage depuis quelques semaines et fait de sérieuses révélations dans le dossier. Il a dit dans un courrier adressé à Jean-Pierre Fabre le 16 mars dernier et devant le doyen des juges d’instruction, avoir été torturé, manipulé et corrompu pour charger les responsables du Cst. Cela devrait suffire sous d’autres cieux pour changer le cours des enquêtes et pousser à relâcher les personnes injustement détenues et abandonner les poursuites. Au lendemain de ces révélations, le pouvoir a essayé de minimiser leur portée, par le biais de ses griots. Ahoomey-Zunu vient de confirmer le sort que le régime compte leur réserver : la poubelle. « Qu’est-ce qui peut prouver que ce que ce monsieur dit aujourd’hui est beaucoup plus vrai que ce qu’il a dit hier ?», a rétorqué Ahoomey-Zunu au confrère de Rfi. En clair, ces aveux ne sont pas de nature à changer le cours des choses.

Isolement de Faure Gnassingbé, découpage inéquitable



« Depuis l’arrivée de François Hollande à Paris, Faure Gnassingbé est l’un des rares chefs d’Etat francophones qu’il n’a pas rencontré. N’est-ce pas mauvais signe ? ». C’est la question que Christophe Boisbouvier a commis l’imprudence de poser à Ahoomey-Zunu. « C’est plutôt le signe de respect mutuel », a dardé l’invité du jour, comme pour blaguer. Est-il sérieux, vous demandez-vous ? Les auditeurs n’étaient pas au bout de leur surprise. C’est un Ahoomey-Zunu dans toute sa plénitude que l’on rencontrera par la suite, lorsque le confrère a commis l’imprudence (sic) de rappeler le communiqué du Parti Socialiste intitulé « Togo : démocratie bafouée » qui fâche. Comme piqué au vif, il assène : « Vous ne trouvez pas que nos amis socialistes ont suffisamment de problèmes aujourd’hui pour qu’ils en rajoutent ?…Nous ne souhaitons pas en rajouter aux problèmes qu’ils ont aujourd’hui», évoquant l’affaire Cahuzac et autres qui éclaboussent le pouvoir français. En clair, le PS « n’a qu’à s’occuper de ce qui le regarde ». Réponse du berger à la bergère, dira-t-on.

Constamment sur la défensive, le locataire de la Primature réfute même les évidences. Comme l’iniquité du découpage électoral et les écarts qui persistent entre le Nord et le Sud du pays relevés par Boisbouvier. « Ces genres de choses sont de nature à envenimer la situation dans notre pays », a craché M. Ahoomey-Zunu. Comme pour faire croire que c’est son interlocuteur qui invente les problèmes et veut mettre le feu aux poudres. Et pourtant ces inégalités bien réelles ont été relevées par la mission d’observation de l’Union européenne en 2007, et recommandations avaient été faites de les corriger.

La situation sociopolitique tendue que vit actuellement le Togo devrait contraindre les gouvernants togolais à l’humilité, au langage d’apaisement ; en tout cas, l’orgueil devrait être banni. Mais Ahoomey-Zunu lui, n’a pas été capable de faire ce sacrifice. Comme on le connaît, il a été de toute l’interview direct, assez commère comme les dames dans les sketchs ivoiriens, parfois à la limite de l’incivilité, rappelant fort bien son récent passage sur Africa N°1 et l’entretien accordé au confrère Francis Laloupo. En lieu et place d’une interview, c’est plutôt un débat contradictoire que Son Excellence Monsieur le Premier ministre a fait à Christophe Boisbouvier. Et pour qui connaît Ahoomey-Zunu, rien d’étonnant.

Tino Kossi

Liberté Togo

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