L’enlisement de l’équipe nationale de football dans les méandres chaotiques des éliminatoires de la CAN 2023 et l’horizon couvert d’épais nuages ont le don de nourrir colère, indignation, et frustration des Togolais. La peur d’enchaîner une 3è absence à la CAN après 2019 et 2022 tenaille tous. En conséquence, le vol à très basse altitude des Eperviers lors des deux premières journées des éliminatoires soulève un tollé général et nourrit passionnément les débats. La question ne laisse indifférent personne, et le patron de la Fédération togolaise de football, Guy Akpovy, affiche sa très grande préoccupation. C’est pourquoi, en valeureux soldat, il lance l’opération «Sauvez l’Epervier», renvoyant l’image d’une situation de guerre qui impose une stratégie offensive de toute urgence. « Sauvez l’Epervier » se veut donc une thérapie spéciale pour penser et panser le mal qui plombe les ailes des Eperviers empêchant leur envol. Il s’agira de mobiliser tous les acteurs pour reconstituer un bloc uni et unifié autour de l’équipe nationale. Ces derniers jours, des citoyens, à visage découvert, ont versé aux débats dans l’espace public les injustices et les frustrations subies pour la cause des Eperviers, après d’énormes sacrifices engagés pour la cause nationale, mais non reconnus à leur juste valeur. Des révélations les plus terribles et terrifiantes ont été faites, avec un accent mis sur la dimension mystique que les uns tentent obstinément de négliger. A tort. Car indéniablement, le football est conçu en Afrique comme la mixture du rationnel et de l’irrationnel. Parenthèse fermée. Après avoir rétabli les donnes de l’irrationnel, il faut s’assurer que le rationnel est géré avec efficacité. Ici, il faut trouver une bonne approche pour casser la disharmonie qui caractérise la relation de certaines anciennes gloires avec la sélection nationale, en vue de créer une bulle positive dans laquelle loger désormais les Eperviers. Et que dire du volet technique ? Les places en sélection ces dernières années sont purement bradées, c’est un constat. Dans une complaisance notoire, Paulo Duarte se permet de convoquer des joueurs sans compétition dans les jambes et les titularise dans des matches de haut niveau continental. La sélection est envahie de joueurs binationaux aux pieds nickelés, à la fibre patriotique fébrile, incapables de mouiller le maillot et de mourir sur le terrain pour la cause nationale.

Carrément dans le pilotage à vue, il est mis en place un 4-3-3 à l’animation défaillante, avec des joueurs qui éprouvent des difficultés à intégrer le dispositif tactique, qui manifestement manquent d’intelligence pour s’adapter aux réalités du jeu et qui passent tout le temps sur la pelouse à errer comme des âmes en peine. La gestion de match se révèle le véritable talon d’Achille de Duarte qui, face à l’adversité, perd toute sérénité et lucidité, ou alors commet des fautes tactiques suspectées de délibérées et qui portent atteinte aux résultats attendus. L’alchimie mise en place pour réaliser les belles performances lors de la préparation de ces éliminatoires a été dynamitée par Paulo Duarte lui-même. Il s’ensuit que le sélectionneur a ainsi trahi délibérément la mission que ses employeurs officiels, et le peuple togolais tout entier lui ont confiée. Le manager Serge Akakpo non plus, n’a été d’une grande aide pour le Togo. Sa nomination même à ce poste a généré de la polémique qui se poursuit. Nouvelle parenthèse fermée. La sélection des joueurs en équipe nationale A doit répondre à un cadre réglementaire strict qui priorise, normalement, une ascension par des sélections de catégories inférieures. Pour les cas d’exception, il doit être mis en place une commission comprenant le sélectionneur national et le directeur technique entre autres, qui siège pour trancher. Il n’est nullement admissible de laisser toutes les commandes au sélectionneur national qui, en outre, est un étranger, à qui toutes nos réalités socio-culturelles échappent. L’opération «Sauvez l’Epervier » doit, en plus de prôner le dialogue, régler les problèmes techniques, l’approche mystique et casser tous les mythes aux fins de libérer le ciel et faciliter l’envol des Eperviers. Une double confrontation attend le Togo face au Burkina au mois de septembre prochain. Le temps d’arranger la maison et de reconstituer le nid des Eperviers avec des matériaux de la gagne paraît si court que toutes les dispositions nécessaires doivent être prises à temps. « Opération Sauvez l’Epervier », vivement !

La Symphonie 204 du 16 juin 2022