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Les caisses de l’Etat sont à la peine. C’est ce qu’il faut comprendre du communiqué du dernier Conseil des ministres de mercredi dernier. Et naturellement, le pays a dû s’endetter, encore, pour faire face aux dépenses. Sans qu’on ne sache auprès de qui et dans quelles conditions.
 
Le budget du Togo pour l’année 2015 et qui était voté le 30 décembre 2014 a fixé les prévisions de dépenses à 815,9 milliards, avec un déficit de 271 milliards évalué à 11% du PIB. C’est-à-dire que pour ses dépenses, le Togo en dehors de ses propres ressources qu’il croyait pouvoir mobiliser, comptait aussi sur les appuis (aide) de ses partenaires pour espérer pouvoir financer ses dépenses prévues pour l’année.
 
Le Conseil des ministres de mercredi nous apprend que l’Etat n’est pas arrivé à mobiliser des ressources nécessaires pouvant atteindre le niveau de ses prévisions. « Parmi les changements qui justifient la rectification de la loi des finances, l’on peut citer entre autres l’impossibilité de réaliser certaines recettes fiscales extraordinaires telles que les commissions sur transfert. Il en va de même de certains appuis budgétaires attendus de certaines institutions financières internationales qui n’ont pu être mobilisés », a indiqué le mercredi dernier le ministre Guy Madjé Lorenzo, en charge de présenter les conclusions du Conseil.
 
Il faut donc comprendre les ressources attendues ne sont pas au rendez-vous. Malgré tout l’optimisme dont le gouvernement a toujours fait preuve, agitant par exemple la mise en oeuvre de l’Office togolais des Recette (OTR) comme la panacée aux soucis financiers du pays. Et ce fameux office n’a pas du tout été tendre envers les opérateurs économiques sur lesquels il exerce une pression constante, envoyant mise en demeure par-ci, redressement fiscal par-là, instituant facture normalisée par ailleurs.
 
Il faut aussi comprendre que le Togo, après avoir fait le dos rond en organisant la présidentielle sur fonds propres, voulant se présenter comme étant à même de se passer de certains appuis extérieurs, se retrouve aujourd’hui avec des difficultés. On se rappelle les vantardises de Gilbert Bawara sur les ondes d’une radio disant que le Togo n’est plus prêt à se faire infantiliser par une certaine Union européenne pour quelques centaines de millions. Aujourd’hui, le gouvernement dont il est toujours membre se retrouve à pleurnicher de l’absence des appuis extérieurs. Si on déplore la réticence manifeste des partenaires du pays, récemment encore accusés d’infantilisation, c’est que les autorités togolaises ne sont pas arrivées à répondre aux engagements pris devant eux. Conséquence, « allez-vous faire voir ailleurs » !
 
Dans son communiqué, le gouvernement dit que « par ailleurs, la prise en compte des dépenses d’organisation du prochain sommet de l’Union Africaine sur la Sécurité maritime et le développement, l’application de la nouvelle grille salariale à compter du 1er juillet 2015 et la revue de la masse salariale suite au redéploiement du personnel des ex directions générales des douanes et des impôts sont autant de facteurs qui ont imposé un réaménagement de la loi des finances exercice 2015 ».
 
Le gouvernement nous informe que, non seulement les ressources attendues ne sont pas arrivées comme on l’a rappelé plus haut, mais aussi les dépenses ont augmenté. Et parmi les nouvelles charges qui se sont ajoutées, on cite les dépenses liées à l’organisation de la fameuse conférence sur la sécurité maritime dite de « l’Union Africaine ». A L’Alternative, on se demandait encore récemment, dans un article, sur quelle ligne budgétaire sont engagées les dépenses liées à ladite conférence. C’est curieux que sans avoir prévu de telles dépenses, tout de même importantes, le gouvernement se mette à réaliser un projet d’une telle envergure. Voilà que le gouvernement lui-même vient reconnaître que les dépenses de cette conférence nécessitent qu’on revoie à la hausse le budget annuel.
 
Avec la nouvelle situation, le déficit budgétaire s’est probablement davantage creusé. Puisque les nouvelles prévisions en termes de dépenses ont connu une augmentation de 13, 8 milliards par rapport aux anciennes. Vu que les ressources ont baissé et que les dépenses ont augmenté, où le Togo trouvera-t-il les moyens pour financer ses projets ? Il n’y a pas mille solutions, l’endettement. Naturellement, le gouvernement s’est bien gardé d’évoquer les termes d’endettement ou d’emprunt. Cela risquerait de susciter des critiques vu que le débat sur l’endettement est déjà relativement vif dans le pays.
 
On sait que déjà, courant juillet de cette année, le gouvernement avait déjà emprunté de l’argent dans l’espace de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africain (UEMOA). Le gouvernement avait émis des « bons de trésor » pour lever de la liquidité. L’appel a permis de mobiliser 30 milliards. Peut-être plus. Visiblement, cette opération n’a pas permis au Togo de mobiliser assez de moyens pour répondre à ses besoins. Où donc le gouvernement a pu trouver de l’argent pour renflouer ses caisses ? Le gouvernement doit faire preuve de transparence et communiquer davantage sur ses opérations de levée de fonds.
 
Par ailleurs, l’Assemblée nationale doit enfin se résoudre à jouer son rôle de contrôleur de l’action de l’Exécutif. En l’absence d’un suivi parlementaire effectif et rigoureux de l’exécution budgétaire, le gouvernement se plait, en roue libre, à créer des dépenses comme il l’entend, à emprunter de l’argent comme il veut, et surtout ne rendre compte que quand cela lui plaît.
 
L’Assemblée, et particulièrement les élus du côté opposition, doit exiger par exemple qu’un rapport provisoire d’exécution budgétaire soit produit pour l’exercice en cours, avant qu’ils ne statuent sur le projet de loi de finances de l’exercice suivant. Celà permettrait entre autre de voir l’évolution des dépenses au niveau de chaque département, de faire un suivi rapproché, et de savoir quelles recommandations faire pour une réaffectation efficace des ressources pour l’année suivante. Autrement, à cette allure, le Togo va se réveiller un matin et constater que le niveau de la dette ne permet plus de payer les fonctionnaires, fournir des services sociaux (santé, éducation, eau potable…), faute d’un suivi rigoureux.
 
Maxime DOMEGNI
 
L’ALTERNATIVE – N°464 du 9 Octobre 2015
 

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