Le président Joseph Kabila qui a été proclamé vainqueur de la présidentielle du 28 novembre a été investi hier à Kinshasa en présence des chefs d’Etat du Zimbabwe, du Congo, d’Angola et d’Ouganda. Seuls quatre chefs d’Etat, presque tous en provenance des pays limitrophes ont pris part à cette investiture sans panache née d’une élection unanimement jugée dépourvue de crédibilité. Au plan intérieur, même l’Eglise catholique a eu à reconnaître que de nombreuses irrégularités ont marqué la réélection du président sortant. Tous les autres chefs d’Etat invités se sont fait représenter soit par le chef du gouvernement, soit par le ministre des Affaires étrangères. La France, la Belgique et le Burundi ont été représentés par leurs ambassadeurs en poste à Kinshasa. Jamais élection en RDC n’aura été aussi décriée et contestée tant de l’intérieur que de l’extérieur.
Quant au principal adversaire de Kabila, Etienne Tshisékédi, galvanisé par la position presque unanime des observateurs qui mettent en cause la crédibilité du scrutin du 28 novembre 2011 et par les prises de position de certaines puissances occidentales, il se montre intraitable, ne reconnaissant pas la réélection de son adversaire. Il n’a pas hésité à le traiter de fauteur en eau trouble et demander qu’on l’arrête et le lui amène ligoté. Le leader de l’opposition a déjà fait part de son intention de faire sa propre investiture ce vendredi au stade des martyrs de Kinshasa, convaincu que Kabila n’a pas gagné les élections. Cette situation rappelle à n’en pas douter, celle qui s’était produite il y a un an en Côte d’Ivoire où, à partir d’une seule élection, il s’était dégagé deux présidents élus : l’un proclamé vainqueur par le Conseil constitutionnel de Paul Yao N’Dré et l’autre par la Commission électorale indépendante de Youssouf Bakayoko.
Le bras de fer qui s’en est suivi, tout le monde sait comment il s’était terminé. Il sera difficile d’imaginer qu’il pourra se produire le même renversement de situation pour le cas de la RDC. La raison est toute simple : la Communauté internationale ne s’est mobilisée que du bout des lèvres en faveur de l’opposition, en dénonçant de nombreuses irrégularités, pendant que la force publique est restée du côté du Pouvoir pour le cas congolais. En dépit de la promesse faite par la Communauté internationale, notamment par les autorités françaises, il y a un an bientôt, rien n’a été entrepris pour parvenir à la vérité des urnes et prétendre pouvoir aider le peuple congolais à récupérer la victoire qui lui a été volée. N’oublions pas que la France avait annoncé que désormais il ne sera plus possible de priver les peuples africains de leurs votes.
Avec toute sa capacité de nuisance, Kabila soutenue par une police et une armée aux ordres et au service d’un individu et non d’un peuple, ne ratera pas l’occasion de démontrer que pour l’heure, il est le président, le seul maître à bord. A moins que Tshisékédi n’ait des soutiens de taille insoupçonnés, sa résistance risque d’être un feu de paille. Dans un cas comme dans l’autre, c’est encore des vies humaines qui risquent d’être sacrifiées sur l’autel de l’irresponsabilité des hommes politiques africains de tous bords. Ce qui est cocasse dans cette affaire d’élection congolaise, c’est le silence et l’inaction de la moribonde Union Africaine et de son cher président de la Commission, Jean Ping dont tout le monde aura vu les limites et le peu de sérieux dans les dernières crises ivoirienne et surtout libyenne.
Quant au président Kabila que d’aucuns considèrent comme étranger, donc non congolais, il n’aura réussi à rassembler autour de lui pour son investiture que des chefs d’Etat impopulaires et souvent mal élus dans leur propre pays, qui se sont maintenus dans leur fauteuil grâce aux mêmes méthodes antidémocratiques que leur hôte. Une chose surprend, c’est l’absence des deux membres actuels du syndicat des fils à papa à cette investiture. Ils ont pour noms Ali Ben Bongo et Faure Gnassingbé. Si d’autres chefs d’Etat peuvent manquer à ce rendez-vous, sans qu’on crie gare, ce n’est en tout cas pas ces deux-là.
Alain SIMOUBA
source : liberté hebdo Togo