Les autorités togolaises ont-elles pris des mesures suite au rapport d’analyse de l’impact des politiques fiscales et de protection sociale sur les inégalités et la pauvreté au Togo publié par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ? En septembre 2018, un document d’orientation de l’organisation sur le développement a dépeint la situation fiscale au Togo en même temps qu’il l’a assorti de deux constats : si la politique fiscale réduit les inégalités, elle augmente par contre la pauvreté.

Lorsqu’on se rappelle qu’il y a quelques jours seulement, le chef de l’Etat bombait le torse au motif que le Togo aurait le taux de pauvreté le plus faible en Afrique de l’Ouest, ce document ne doit pas être bien vu au sein du gouvernement de Selom Komi Klassou et son mentor. Et pourtant, le constat est là ; mais plutôt que de s’en saisir pour rectifier le tir, on préfère saouler les populations avec des artifices à travers une interview dans un journal d’audience panafricaine.  

Résumé

Le gouvernement togolais a entrepris des réformes importantes après la crise des années 90 dans le but d’améliorer les conditions de vie de la population grâce à des politiques publiques adaptées, notamment à travers la Stratégie de croissance accélérée et de promotion de l’emploi (SCAPE) 2013-17. Malgré des améliorations du niveau d’éducation et une augmentation de l’espérance de vie, les défis en termes de pauvreté et d’inégalités restent très importants. Cette étude estime l’impact redistributif des revenus fiscaux (les impôts) et des dépenses fiscales à travers les transferts monétaires, non monétaires, et les subventions, sur les revenus des ménages et les inégalités. Deux conclusions ressortent de cette analyse : la politique fiscale réduit les inégalités au Togo, mais appauvrit les ménages les plus pauvres.

La politique fiscale réduit les inégalités

Les inégalités seraient plus importantes au Togo sans les éléments de politique fiscale pris en compte dans cette étude. Le coefficient de Gini est réduit d’environ 5 points de pourcentage en comparant le revenu pré-fiscal au revenu final. Les instruments de politique fiscale les plus influents dans la réduction des inégalités sont les impôts directs et les transferts non monétaires, en particulier dans les domaines de la santé et de l’éducation. En prenant en compte les subventions en électricité et en engrais pour l’agriculture, et en soustrayant les impôts indirects, on observe un impact sur les inégalités de revenus au niveau national et dans les zones urbaines, mais cet impact est faible dans les zones rurales.

La politique fiscale augmente la pauvreté

Les subventions reçues par les ménages pauvres et vulnérables sont plus faibles que la TVA payée, ils sont donc des payeurs nets dans le système fiscal togolais, contribuant plus aux recettes publiques qu’ils ne bénéficient des dépenses publiques. Le Togo n’a pas à ce jour de programme de transferts monétaires de taille suffisante (il couvre moins de 0.5 % de la population) pour protéger les ménages les plus vulnérables. Une politique fiscale incluant une proportion plus large d’impôts directs ainsi que des transferts monétaires de plus grande ampleur pourrait permettre d’éviter un effet appauvrissant sur les ménages les plus vulnérables.

Limites de la méthodologie : les transferts non monétaires à travers les services sont importants

L’éducation et les services de santé sont des avantages sociaux importants, en particulier pour les ménages les plus pauvres. Ces derniers sont en moyenne plus grands et profitent donc proportionnellement plus des avantages sociaux que les ménages les plus riches.

L’accès à l’éducation et aux services de santé publique ne bénéficie cependant pas seulement aux individus en termes monétaires, et le coût de la mise à disposition de ces services n’est pas nécessairement un bon indicateur de la valeur du bénéfice reçu par les utilisateurs des services. Au Togo l’éducation est le poste de dépenses le plus important, et se traduit également par la réduction la plus importante des inégalités tout en bénéficiant aux enfants et étudiants scolarisés à travers une accumulation de capital humain.

Cette étude présente des limitations dues aux choix d’hypothèses sur lesquels elle se base. De plus, bien qu’elle prenne en compte plusieurs aspects de la politique fiscale, tant dans les transferts que dans la taxation des ménages, la méthodologie utilisée présente deslimites concernant les services couverts. Il n’est pas possible d’y inclure la dimension de l’accès et de la consommation d’eau au Togo, par exemple. Cette dimension est pourtant importante car le taux d’accès à l’eau est très bas (63 % des ménages en moyenne, dont 13 % à travers des branchements privés en 2015). L’État fixe le tarif moyen de l’eau afin d’assurer l’équilibre financier du secteur. Dans un but d’équité et d’accès universel à l’eau, l’État peut mettre en place des subventions pour aider les populations défavorisées. La fiscalité appliquée au secteur de l’eau est actuellement concentrée sur la TVA, avec un taux unique de 18 % s’appliquant aux redevances excédant 10 mètres cubes (m3) par mois (les dépenses jusqu’à cette limite sont exonérées). La tarification du secteur de l’eau n’a pas évolué depuis 2001. Une étude récente montre cependant qu’outre la taxation et le maintien de cette première tranche sociale exemptée, des bénéfices en termes d’équité ainsi qu’en termes d’équilibre financier pourraient être obtenus avec la mise en place d’une grille de tarification de l’eau plus graduelle. De plus, la disponibilité des branchements étant particulièrement problématique pour des raisons de coûts, une subvention pour ces deniers permettrait un accès à l’eau plus large aux ménages les plus vulnérables.

Ocde.org

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