Ukraine, Poutine finira sans doute par emporter les opérations militaires, mais il a déjà perdu trois batailles importantes. Comme d’habitude, je donne mon avis sur une guerre qui accapare mon attention de par la foison des informations. Pour le militaire politicien que je suis, mon intérêt est exacerbé.

Parler d’une guerre qui se déroule sur fond de relations géopolitiques sur les réseaux sociaux est complexe tant le public concerné est multiforme. Je le ferai donc plutôt en version cours magistral. Comprendra qui pourra. Mais je précise, c’est mon opinion.

D’entrée de jeu, il faut reconnaître que les Russes se retiennent un peu, contrairement à ce qu’ils ont pu faire comme opérations militaires en Tchétchénie ou en Syrie. Même si des villes comme Marioupol ou Kharkiv subissent d’intenses bombardements, ils sont encore loin des carpet bombing habituels de l’armée russe. Les pertes civiles, au-delà de leur horreur, sont sans commune mesure avec celles d’Alep, à titre de comparaison.

Il faut aussi retenir que l’Ukraine, ancien état soviétique, dispose de beaucoup d’abris souterrains qui protègent les populations civiles.

20 jours après l’invasion de l’Ukraine, les lignes sont presque figées et ne bougent pas véritablement. La région de Kherson est entièrement occupée et les autres régions résistent, y compris dans le Donbass. Personnellement, je crois que les forces russes vont se réorganiser, changer peut être de tactique et contourner les kessels que constituent les villes encerclées et envahir le reste du territoire. A terme, Poutine finira par gagner la guerre mais maintenir la domination sur le pays sera plus difficile, j’en parlerai vers la fin.

Mais Poutine a déjà perdu 3 batailles.

La première concerne la surpuissance de l’armée russe. Presque tout le monde pensait que la campagne ukrainienne durerait 3 jours. Nous sommes à 20 jours et les avancées restent faibles. Certains pensent que je ne consulte que des sites européens. Non. Il y’a trois informations venant des autorités russes elles-mêmes, qui montrent que les choses ne vont pas comme prévues.

Une semaine après le début du conflit, les russes reconnaissaient 500 morts et environs pour 1500 blessés. Tout le monde sait que les vraies pertes amies sont toujours sous-évaluées. Mais 500 morts en une semaine, c’est trois fois plus de pertes qu’en 7 ans de guerre en Syrie.

Ensuite, alors que le président poutine avait nié que les conscrits soient engagés dans la guerre, son chef d’Etat-major l’a reconnu. Non seulement c’est interdit par la loi russe, mais on fait appel aux conscrits que quand on y est obligé. Donc ça ne va pas bien.

Pour finir, le président a admis officiellement qu’il n’était pas opposé à l’intervention de volontaires, en dehors de l’armée régulière. C’est le signe que ça ne va pas comme prévu.

Le 14 mars dernier, pour la première fois depuis le début de l’invasion en Ukraine, la Russie a même reconnu publiquement que son attaque menée contre l’Ukraine ne se déroulait pas comme espéré. En effet, « tout ne va pas aussi vite que nous l’espérions », a indiqué dimanche soir Viktor Zolotov, le chef de la garde nationale russe.

La guerre d’Ukraine a malheureusement révélé les failles de l’armée russes, et c’est la première bataille perdue.

La seconde est l’unité de la nation ukrainienne retrouvée. Avant la guerre, on avait du mal à imaginer une Ukraine fonctionnant comme une nation, avec d’un côté les russophones à l’est et les pro-occidentaux à l’ouest. L’invasion de la Russie a soudé la nation derrière un leader surprenant. J’entends des gens se moquer de Zelensky, ce comédien qui aurait induit les ukrainiens en erreur. Mais comme d’habitude, on ne va pas suffisamment aux informations. Zelensky est russophone, et a été élu sur un programme de paix avec la Russie. Mais quand il est élu en 2019, le conflit au Donbass faisait déjà 5 ans. Pour moi, après Churchill, Zelensky sera probablement l’un des meilleurs présidents d’un pays en guerre. Son talent d’acteur, son courage et sa parfaite maîtrise de la communication ont réussi non seulement à souder les populations du pays, mais à susciter à travers le monde une empathie pour l’Ukraine.. Voilà pourquoi ce conflit est particulier. La résistance du peuple ukrainien uni est la seconde bataille perdue de Poutine. Ses armées étaient supposées libérer un peuple, mais elles font face à un peuple uni, combatif, debout, sans peur.

Troisième bataille perdue, le réveil de l’Europe des armées. Pendant longtemps, l’Europe s’est appuyée sur la puissance américaine au sein de l’otan, laissant la Russie être la seule puissance militaire sur le continent. L’Europe vient de découvrir qu’elle n’est pas aussi protégée et que la guerre conventionnelle frappe à sa porte. Non seulement l’invasion ukrainienne a renforcé l’Europe politique, mais elle sonne le tocsin d’une Europe qui va se réarmer. Jusqu’ici, une Europe faible militairement permettait à Poutine de la traiter avec dédain. Les choses vont changer. Troisième bataille perdue

Voilà les trois batailles perdues à mon sens.

Comme je l’ai dit au début, les Russes vont certainement finir par envahir complètement l’Ukraine. Mais il n’y à aucun scénario où ils peuvent soumettre ou annexer le pays. J’entends certaines personnes dire que poutine peut raser toute l’Ukraine s’il le veut, oui, avec des bombes atomiques. Avec des armes conventionnelles, c’est beaucoup plus compliqué. Le pays dispose de beaucoup trop de villes de plus de 60 milles habitants. Et même en le faisant, il les transformera en autant de Stalingrad difficile à prendre. Mais comme je le dis, il faut connaître l’histoire militaire. Par ailleurs, le pays fait plus de 600 mille km2 pour 44 millions d’habitants dont la moitié deviendra des résistants. Il faudra au minimum 2 millions de soldats pur y maintenir une certaine sécurité, mais la guérilla rendra cette occupation impossible. La seule issue à ce conflit passera par les négociations. L’Ukraine retrouvera ses frontières, ca durera le temps que ça durera, mais qui va ressusciter toutes ces victimes?

Voilà pourquoi je suis contre cette guerre, comme je le suis toujours contre toute guerre d’agression.

Cessez le feu et négociez en Ukraine.

Gerry

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