Le mercredi 29 février 2012, le gouvernement a fait publier des mesures prises en conseil de Ministres relatives à la mise en application des recommandations contenues dans le rapport de la CNDH sur les cas de tortures et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants infligés aux personnes mises en cause dans l’affaire de complot contre la sûreté intérieure de l’Etat.
Tout en prenant acte de ses mesures, la LTDH s’étonne que certaines recommandations ne soient pas prises en compte et les quelques mesures prises ne contribuent pas à une mise en œuvre réelle et sérieuse des recommandations de la CNDN.
EN EFFET :
1- Aucune mesure n’est annoncée en vue de faciliter l’accès et la visite des lieux de détention ou d’exécution des peines et autres sanctions disciplinaires par la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH) et les Organisations de Défense des Droits de l’Homme (ODDH) ;
2- Le rapport de la CNDH recommande entre autres, une juste réparation des victimes, ce qui signifie, la réparation des préjudices subis par ces dernières. Or, la juste réparation suppose la fixation du quantum des dommages-intérêts par une juridiction digne de ce nom, ce qui implique l’exigence d’une poursuite judiciaire contre les auteurs de ces traitements inhumains et dégradants. De telles poursuites trouvent leur fondement dans une lecture combinée des dispositions de l’article 50 de la Constitution togolaise qui fait entrer dans l’ordonnancement juridique togolais, la Convention des Nations-Unies contre la torture et les autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984, ratifiée par le Togo le 18 novembre 1987, et de l’article 17 du Code Pénal togolais qui prévoit les peines applicables en matière de crime (la réclusion à perpétuité ou la réclusion à temps allant de 05 à 20 ans).
Malheureusement, le gouvernement s’est limité à de simples mesures disciplinaires et donc semble n’envisager aucune poursuite judiciaire contre ces tortionnaires.
C’est également le lieu pour la LTDH de rappeler que le principe de la légalité criminelle qui induit celui de l’interprétation stricte de la loi pénale s’oppose non seulement à l’interprétation analogique (qui consiste à étendre une règle de droit d’une situation prévue par elle à une situation voisine), mais aussi et surtout à l’interprétation restrictive afin de ne plus faire échapper à la loi pénale des cas définis et punis par le législateur.
3- Même pour ce qui concerne les mesures disciplinaires annoncées, il est curieux de remarquer que le gouvernement se contente d’instruire « le commandement militaire » pour cette fin alors que le Chef d’Etat Major des Forces Armées Togolaises est lui-même mis en cause par le rapport de la CNDH et la seule autorité compétente à prendre de telles mesures se trouve donc être le Chef de l’Etat lui-même, en sa double qualité de Ministre de la Défense et des Anciens Combattants et de Chef suprême des armées.
D’ailleurs, la composition du Haut Commandement Militaire (le Chef de l’Etat, le Chef d’Etat Major Général des FAT, les Chefs d’Etat Major des armées de terre, de l’air et de la marine, le Directeur Général de la Gendarmerie Nationale et le patron des Renseignements) laisse transparaître clairement que de telles mesures sont difficilement prenables dans la mesure où on ne peut être juge et partie.
4- Parlant « des équipes de spécialistes par examiner de façon urgente les personnes qui ont été indexées comme ayant fait l’objet de traitements inhumains, dégradant dans les locaux de l’ANR », le gouvernement a semblé envisager une contre expertise dans le but de vouloir confirmer ou non l’existence réelle de préjudice, or on ne saurait parler de torture sans préjudice : cette mesure du gouvernement risque donc de remettre en cause la thèse de torture telle que cela résulte du rapport de la CNDH.
5- En outre, le gouvernement ne s’est nullement prononcé sur les conditions et les auteurs de l’altération et de la falsification du rapport de la CNDH alors que des telles actes qui relèvent d’une certaines gravité, exigent une clarification certaine en vue de situer l’opinion nationale et internationale sur les responsabilités des uns et des autres.
De toutes ces observations, la LTDH constate que ces mesures prises par le gouvernement ne sont que du saupoudrage, un véritable trompe l’œil destiné à berner le peuple, car ne reflétant nullement une volonté réelle de mettre en œuvre les recommandations de la CNDH contenues dans le rapport sur la torture à l’ANR.
Par conséquent, la LTDH renouvelle les exigences exprimées au sein de la synergie des ODDH relativement à la démission pure et simple du gouvernement pour s’être décrédibilisé en publiant un faux rapport.
La LTDH pense qu’au-delà des recommandations contenues dans le rapport de la CNDH, la justice togolaise doit tirer toutes les conséquences liées aux procédures et procès de toutes les personnes ayant fait l’objet de torture et autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants à l’ANR et notamment en procédant comme de droit.
Fait à Lomé, le 07 mars 2012
Pour le Bureau Exécutif,
Le Président,
Me Raphaël N. KPANDE-ADZARE

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