Depuis le lundi 13 janvier 2020, les agences de Lumen sont prises d’assaut par les épargnants. Ils veulent rentrer en possession de leurs avoirs auprès de la structure. Selon eux, la microfinance aurait fait faillite. Des doutes que confirme l’enquête que nous avons menée. Aussi avons-nous voulu savoir davantage sur ce qui a conduit à cette banqueroute que les clients n’ont visiblement pas vu venir alors que les signaux étaient au rouge depuis deux (02) ans. Gestion catastrophique et illégalité en sont les principales causes.

Plus les jours passent, plus les déposants se rendent comptent d’une évidence. Il leur sera difficile voire impossible de rentrer dans leurs fonds. Comme une dame que nous avons rencontrée mardi 14 janvier dernier (soit le 2ème jour de la rumeur sur l’éventuelle faillite de Lumen) à l’agence du quartier Gbadago. Ne tenant plus sur ses deux pieds, elle s’assit et fondit en larmes. A quelques mètres d’elle, un homme au milieu d’un attroupement, les yeux injectés de sang, tempêtait et menaçait les forces de l’ordre imperturbables devant les portes closes de la microfinance. Les craintes des épargnants dont certaines sont inconsolables, sont légitimes. La microfinance Lumen laisse une ardoise estimée à plus de 500 millions FCFA. Comment cette situation a-t-elle pu en arriver là ?

En 2018, les agents de la Cas-Imec ont effectué un contrôle interne à Lumen. Ils ont décelé un trou de 300 millions et formulé des recommandations aux responsables de la microfinance afin qu’ils redressent la barre. Août 2019. Un second contrôle révèle que le trou ne s’est pas refermé ; au contraire, il s’est agrandi à 500 millions. Une situation qui s’est encore aggravée en décembre 2019. En cause, un personnel incompétent, des bénéficiaires qui ne sont pas membres de la microfinance, entre autres. Autrement, une gestion catastrophique de la structure a conduit ses clients dans la situation actuelle.

Signes avant-coureurs

Le milieu des systèmes financiers décentralisés au Togo est truffé, voire infesté de brebis galeuses à l’instar de Lumen et de la quarantaine autres microfinances interdites récemment. Lumen, avec tout ce qui est engendré comme cris de désolation des épargnants, a pendant longtemps surfé sur un laxisme de la part des autorités. En effet, en remontant à la genèse de cette microfinance, on s’aperçoit qu’elle a fermé ses portes en 2014 et rouvert curieusement et sans agrément. En réalité, Lumen opère dans l’illégalité en brassant des millions de ses clients. Elle a cessé d’exister légalement depuis. La société avait établi un contrat de cession avec une autre du nom de « Sitsofé ». Autrement, Lumen a cédé son agrément à « Sitsofé » qui, elle aussi, selon des informations, est dans l’illégalité. La microfinance Lumen a donc fait du faux et usage du faux, en toute…impunité ! Ces irrégularités ont été constatées par la nouvelle équipe de la Cellule d’appui et de suivi des institutions mutualistes ou coopératives (CAS-IMEC) qui a pris fonction en 2016. En remontant à la genèse, les agents de la CAS-IMEC se rendent comptent également que Lumen appartenait à l’Union des caisses d’épargne et de crédit du Togo. Un réseau qui a fait fermer ses portes depuis. Ces détails montrent que Lumen était mal ficelé depuis, mais a continué à travailler dans une certaine indifférence des autorités.

Laxisme de la CAS-IMEC ?

La Cellule d’appui et de suivi des institutions de mutualistes ou coopératives est la structure de veille et de contrôle des systèmes financiers décentralisés du Togo. Elle est comme une gendarme. Mais, tout semble indiquer qu’elle n’a pas véritablement les pouvoirs de sa mission ou pèche par une indifférence aux désordres qui règnent dans le secteur des informations. Contactée, CASIMEC apporte des éclaircissements. « Pour arriver à fermer une microfinance, ça prend du temps. C’est un processus de vérification et de contre-vérification », avance-t-on. « Nous sommes dans l’assainissement du secteur », dit notre source. Très simpliste. La situation de Lumen aurait, selon des indiscrétions, amené le ministre de l’Economie à ordonner que ses avoirs soient bloqués. Le but, dit-on, « est d’arrêter l’hémorragie ». Selon des informations, la structure ne dispose actuellement en banque que de 12 millions francs CFA comme avoirs. L’argument avancé par ses responsables et selon lequel un problème informatique aurait occasionné cette situation est difficilement recevable. D’où la question : où est parti l’argent ? Cette situation est sans doute le fruit des détournements et des crédits octroyés gré à gré. Pendant ce temps, le ministre pourrait-il engager un liquidateur pour statuer sur le sort de Lumen ? Les jours à venir nous situeront. Nous y reviendrons.

Source : L’Alternative

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