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Yark Daméhame : « Il n’y a pas assez d’encre pour faire des photocopies des copies anonymes des candidats en cause »
 
Suite aux parutions de votre quotidien LIBERTE la semaine dernière au sujet des magouilles qui ont émaillé le dernier concours de recrutement dans la Police nationale, les ministres Yark Daméhame de la Sécurité et de la Protection civile et Gourdigou Kolani de la Fonction Publique ont effectué hier une sortie médiatique pour tenter d’expliquer ce qui se serait passé. Et le moins qu’on puisse dire est que les deux ministres se sont défendus à travers des « explications » sans pour autant convaincre grand monde. « Liste d’attente », « relevés de notes des candidats incriminés » ont été servis aux médias présents.
 
Après avoir retracé les conditions de l’organisation du concours, le ministre a situé le nœud du problème. « Le concours s’est déroulé sous l’autorité de la Direction des examens et concours et les techniciens sont choisis par le ministère de l’Enseignement Supérieur et celui des Enseignements Primaire et Secondaire. Après la liste des admissibles qui a été publiée dans Togo-Presse, des candidats devraient passer la visite médicale. Il y avait deux pôles de visite, le camp d’Adidogomé à Lomé et le camp du Gal Améyi à Kara. Comme vous le savez pour tous les concours, il y a une liste qui est publiée, mais il y aussi la liste d’attente au cas où il y a des désistements. Donc après la visite, il y a un constat qui a été fait : des absents au niveau de la visite médicale. Ainsi il y avait 11 absents au niveau des commissaires à Lomé, 46 à Kara, 22 officiers de police à Lomé et 6 à Kara, 184 gardiens de la paix à Lomé et 18 à Kara. Donc il y avait un total de 247 absents de gens qui avaient postulé. Nous avons décidé de prendre des gens qui étaient sur la liste d’attente », a-t-il expliqué.
 
Le ministre Yark est ensuite revenu sur la capacité du Centre national d’instruction qui ne dépasse pas 1500 places et les raisons qui ont expliqué le retard pris dans la publication de la liste définitive. Il a aussi assuré qu’on ne peut jamais prendre quelqu’un qui n’a même pas fait acte de candidature pour le proclamer admis. Le ministre Yark s’est dit « désolé » pour la liste des 43 faux admis et a brandi ce qu’il considère comme étant les copies des 43 personnes ayant fait acte de candidature comme les autres candidats et composé, sans les avoir fait voir de près aux journalistes. Il rassure qu’ils ont passé la visite médicale avant d’être déclarés admis.
 
Les ministres Yark et Gourdigou avec leur fameuse "liste d'attente"
 
M. Yark a donné d’autres détails qui concernent des candidats ne remplissant pas certains critères et qui ont dû être reversés dans des catégories inférieures conformément aux exigences des postes à pourvoir. Comme par exemple la détention d’un Bac +4 ou le cumul de 180 crédits pour le poste de commissaire. Enfin, M. Yark Daméhame a pris soin de faire distribuer à tous les journalistes une copie de la liste des 43 faux admis publiés par LIBERTE tout en prenant soin d’expliquer qu’« il n’y a pas assez d’encre pour faire des photocopies des copies anonymes des candidats en cause » !
 
Malgré les questions des journalistes pour amener les deux ministres à aller en profondeur dans leurs explications, la quasi-totalité est restée sur sa faim, du moins ceux qui ont bien voulu s’intéresser au sujet du jour. « De quelle liste d’attente M. Yark Daméhame veut-il parler ? », a demandé un autre journaliste. Le ministre a aussi précisé que c’est suite à leur plaidoyer que la demande initialement arrêtée de 300 fonctionnaires de police a été revue à un millier.
 
M. Yark Daméhame a, par la suite énuméré des noms qui, après contrôle des copies, seraient déclarés admissibles. Un autre journaliste a demandé au ministre comment, rien qu’en agitant les supposées copies des candidats sous le nez des médias, les journalistes pourraient savoir si ces copies ne sont pas rentrées dans le circuit après la publication des articles de LIBERTE. « Oh lala, vous avez la liste, vous avez les noms, et puis c’est anonymé et vous avez les noms des correcteurs… », a répondu le ministre. Celui-ci a renvoyé les journalistes vers la liste de tous les candidats ayant concouru pour vérifier si les noms incriminés ne figurent pas là-dessus. Un autre journaliste a demandé si le journal LIBERTE a menti alors qu’il s’est basé sur les résultats publiés par le quotidien national Togo-Presse. Pour le ministre Yark, la liste remise à Togo-Presse a été intégralement publiée ; seulement, le ministère a gardé à son niveau une liste d’attente. Et pourtant, il estime que LIBERTE a menti et a suggéré aux candidats dont les noms sont publiés de porter plainte.
 
S’agissant de cette liste d’attente, le ministre Kolani Gourdigou a relaté son expérience selon laquelle il aurait été seul à passer un concours dans une discipline, mais à la proclamation des résultats, il était recalé. « Nous sommes au Togo », a-t-il lancé.
 
Parallèlement au thème de discussions, il a été soulevé l’imposition du test de dépistage du VIH aux admissibles alors que selon le journaliste qui a soulevé le problème, des textes interdisent cette façon de faire lors des concours de la fonction publique. Mais le ministre, au lieu de prendre acte et promettre une vérification, a tenté de justifier ce fait proscrit par les textes internationaux.
 
Commentaires
 
A l’analyse des explications, si initialement, il était prévu selon les propos du ministre de la Sécurité et de la Protection civile, que ce soient seulement 300 candidats qui soient retenus et suite à leur plaidoyer, l’effectif a été revu à la hausse jusqu’à un millier, comment peut-il parler de liste d’attente suite à la publication des admissibles ? Cette question mérite qu’on s’y attarde puisqu’au final, ce sont 1032 candidats qui sont retenus et donc, qu’il y ait 247 absents parmi les admissibles lors de la visite médicale selon toujours les mots du ministre, ou qu’il y ait 1.000 absents lors de cette fameuse visite médicale sur un total de 2.588 admissibles, cela ne devrait entacher en rien les résultats définitifs. Parce qu’en cas d’absence de 1.000 admissibles lors de la visite, il restera 1.588 à passer cette visite et n’ayant besoin que d’un millier, il n’y a aucune raison qu’on parle de « liste d’attente ». Aussi, y a-t-il lieu de se demander pourquoi cette fameuse « liste d’attente » n’a pas été rendue publique dans aucune parution de « Togo-Presse ».
 
S’agissant de la procédure que devrait adopter l’auteur de l’article suite à la découverte de la forfaiture, M. Yark s’est adonné à un cours magistral en journalisme d’investigation aux hommes de médias ; il les a invités à consulter la liste générale de tous les candidats pour voir si les noms des faux admis n’y figurent pas. Comme pour dire qu’une fois qu’un candidat a son nom sur cette fameuse liste de tous les candidats ayant pris part au concours, il n’est pas possible qu’il échoue et que par enchantement, son nom se retrouve sur la liste définitive, comme c’est le cas actuellement des 43 noms à problème.
 
Pour rappel, l’article a donné lieu à des réactions sur les réseaux sociaux et des appels téléphoniques au sein des hauts-gradés faisant étant de ce que cette pratique ne date pas d’hier. Bref, beaucoup de citoyens ont loué le travail de recherche que le journal LIBERTE ne cesse d’abattre pour réduire les situations d’inégalité dans le pays. La plainte que M. Yark Daméhame invite les faux admis à porter contre LIBERTE ressemble plus à un procédé d’intimidation du journal qu’à une volonté de voir « lavé l’honneur » de citoyens dont les noms ne figurent pas dans les admissibles publiés par Togo-Presse, mais qui se retrouvent par enchantement sur la liste définitive.
 
Au-delà de la rencontre d’hier qui est loin d’avoir clos le débat sur la situation des 43 candidats qui figureraient sur une supposée liste d’attente que les autorités n’ont jugé dévoiler qu’à la 25ème heure, il devient impérieux que le chef du gouvernement et partant, le chef de l’Etat s’impliquent dans ce dossier pour situer les responsabilités. Et ensuite qu’ils prennent les décisions qui s’imposent dans ce cas, peu importe si les admis sont déjà en formation au CNI ou non. Car si le redressement des inégalités doit commencer quelque part, autant qu’il commence par le rétablissement de la vérité des résultats du concours national de la Police togolaise. Les députés, même en congé, ne peuvent aussi passer ce dossier par pertes et profits s’ils veulent vraiment être considérés comme des représentants du peuple, toutes tendances confondues.
 
Godson K.
 
Liberté Togo
 

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