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Alors que le dialogue annoncé et les réformes à faire à l’Assemblée Nationale ou ailleurs n’ont pas tranché le sujet ni produit de consensus sur quoi que ce soit, Faure Gnassingbé se fait proclamer candidat naturel à la présidentielle de 2015. Instrument de la manœuvre : la Nouvelle Jeunesse pour le Soutien au Président Faure (NJSPF), l’association-satellite du parti présidentiel qu’on finance avec l’argent du contribuable. C’est malheureux.
 
Curieux anniversaire
 
La liberté d’association est sacrée au Togo, la constitution du 14 octobre 1992 la consacre et la protège certes, mais il est des associations dans ce pays dont le fonctionnement justifie toutes sortes de suspicions et de lectures. La NJSPF en substance étonne par les gros moyens qu’elle déploie, financiers, humains et matériels. Au-delà des actions sociales qu’elle fait en faveur des couches défavorisées, son volet politique est le lieu de bien d’interrogations. On peut gager que si une pareille association roulait à visage découvert pour l’ANC ou pour la Coalition Arc-en-ciel, il y a bien longtemps que ses responsables auraient été mis en difficulté, accusés de tous les péchés et punis pour des crimes imaginés et imaginaires. Si d’aventure ils étaient des hommes d’affaires, le fisc les aurait déjà mis à genoux. La NJSPF par contre fait ostentatoirement étalage de moyens aux origines douteuses, mais personne ne s’en émeut ; la cour des comptes qui existe juste pour figurer dans le budget national ne s’embarrasse pas de tant de prodigalités étonnantes.
 
Qu’importe. Pour son cinquième anniversaire, l’association a organisé différentes activités. Dans la ville de Lomé notamment, on peut constater la présence de panneaux publicitaires géants saluant qui la gouvernance de Faure Gnassingbé, qui les « exploits » réalisés. D’autres encore annoncent péremptoirement que Faure Gnassingbé est le candidat naturel des populations togolaises pour la présidentielle de 2015. De la documentation a été distribuée à la presse qui indique clairement que Faure Gnassingbé sera candidat l’année prochaine. Les observateurs en montrent gêne et stupéfaction.
 
Affaire signalée
 
Nul n’ignore que l’opposition togolaise dans son ensemble, hormis sans doute l’UFC qui accepte dorénavant tout depuis le 26 mai 2010, n’admet pas la possibilité d’une nouvelle candidature du fils d’Eyadèma en 2015. Il y a bien longtemps que tous tant qu’ils sont réclament les réformes avec en point d’orgue la limitation du mandat présidentiel avec effet immédiat. Cela renferme que pour les adversaires politiques du président d’UNIR, le second mandat de Faure Gnassingbé qui finit en mars 2015 doit être le dernier. Ils supposent qu’il a déjà fait deux mandats comme le permettait la constitution et que, par bon sens et par volonté d’apaisement, le président d’UNIR devrait se retirer.
 
C’est un secret de Polichinelle que le premier concerné n’a pas la même compréhension et perception des choses. Si lui-même ne dit jamais rien, ses ministres et ses agitateurs de sympathisants ou d’ « amis » dans la presse parlent pour lui. Robert Dussey, ministre des Affaires Etrangères, l’a laissé entendre en affirmant qu’il ne « trouve pas d’inconvénients que Faure Gnassingbé soit candidat ». L’élan de la NJSPF ne fait que confirmer les intentions toujours voilées mais faciles à lire de Faure Gnassingbé et de son camp politique. Il y a quelque chose d’immoral à cela puisque, même si Faure Gnassingbé peut dire que la NJSPF ne lui montre pas préalablement ce qu’elle veut faire, il ne peut pas prouver qu’il était tout à fait ignorant de leur volonté de le déclarer candidat naturel pour 2015. Si, malgré tout, il ne le savait pas, ne peut-il pas les inviter gentiment à retirer la documentation et les affiches géantes qui parlent de sa candidature évidente ?
 
Pour ne l’avoir pas fait, il ouvre la porte à toutes les supputations et à toutes les accusations. Vis-à-vis de ses adversaires politiques, Faure Gnassingbé apparaît une fois encore comme un partenaire insincère qui a toujours un coup fourré dans son sac. Dans tous les cas, l’affaire est déjà signalée et il revient auxdits adversaires politiques d’en tirer les bonnes conséquences.
 
Une nouvelle candidature pour rien !
 
Faure Gnassingbé tient à continuer à diriger le Togo au-delà de 2015. Si cela se fait, ce sera un nouveau mandat pour rien. Parce que sensément, au bout de dix ans, il a déjà montré ce dont il est capable. Au bout de ces années, il appartient au registre du « déjà vu ». Il ne peut plus rien faire qui mette les Togolais en transe.
Une vérité est que, durant ces dix années, il a suffisamment apporté la preuve que son système n’est différent de celui de son père que parce que lui s’appelle Faure et que son père s’appelait Eyadèma. Le reste, c’est gros Jean comme devant. La mauvaise gouvernance, l’enrichissement illicite, les dépenses folles, les détournements de l’argent public, l’opacité dans la gouvernance financière, les tracasseries politiques à l’égard des adversaires, le verrouillage institutionnel, les élections truquées, violations permanentes des droits de l’homme (on a encore torturé au Togo au vingtunième siècle sous Faure Gnassingbé !) etc., voilà la substance des deux gouvernances. Malgré les promesses de rupture et de modernité, il n’y a de liberté qu’en apparence : ceux qui ne chantent pas la geste de Faure Gnassingbé ont toujours la vie dure dans le pays, qu’ils soient journalistes, opérateurs économiques ou hommes politiques. Rien ne prouve ni ne saurait garantir que le troisième mandat sera différent. D’ailleurs, le goût pour un troisième mandat est l’expression de la volonté de patrimonialisation du pouvoir d’Etat. Cela est tout sauf une preuve de démocratie ou d’Etat de droit. Tout est permis mais tout n’est pas utile, c’est la Bible qui l’enseigne.
 
Nima Zara
 
Correcteur
 

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