Monsieur le Président,
 

je vous ai connu en tant que Président d’un Parti Politique quelques semaines avant le 19 Août 2017. J’avais appris en ce moment qu’on vous avait interdit un meeting à Kara et à Mango où je suis. J’avais poussé ma curiosité en tapant votre nom dans le moteur de recherche Google. J’ai pu télécharger une vidéo où vous aviez donné une interview à un togolais depuis une terre étrangère. Le 17 Août, par le canal des réseaux sociaux, je vous ai longuement écouté au micro du journaliste Joachin AGBETIM.
 
Vous m’aviez convaincu. A l’époque je bouclais mon premier livre, « Le salut du peuple » où je proposais une réorganisation de la jeunesse à travers les étudiants afin d’aboutir à la « naissance d’un autre pouvoir », celui de l’étudiant. Ils ne devraient pas considérer leur sort comme une résultante du fatalisme mais comme le résultat d’une mal gouvernance qu’ils payent chers en se levant la nuit profonde pour aller se tailler une place à l’Amphi, en attendant le cours de dix heures le lendemain.
Puis arriva le 19 Août 2017. Contre toute attente. La naissance de la C14 qui ne tarda pas. Ce qui m’a le plus marqué, c’est votre prédiction qu’un schéma d’un énième dialogue aboutirait à un échec. Et les élections, non-sens, des législatives du 20 Décembre 2018, démontrèrent ce que vous aviez révélé plus tôt. Votre calcul a été juste. Cela traduit vos capacités à anticiper les événements. Et un homme politique se doit d’anticiper les faits afin d’y remédier. Malheureusement, vous aviez laissé le courant du dialogue vous emporter. A la dernière marche à laquelle vous aviez participée, en tout cas au point de chute, j’étais là. Je vous ai vu monter le bus. J’étais avec une vieille qui me demandait de lui montrer « Tikpi » C’était émouvant. Le bruit du groupe électrogène nous avait empêché de bien vous écouter. Mais le seul fait de vous avoir vu, en chair et en os, nous avait procuré un grand plaisir.
 
Ce qui m’emmène à m’adresser à vous ce matin, c’est le sentiment d’incertitude qui s’accapare insidieusement de votre peuple majoritaire, qui voit l’avenir obscurci. Je suis certain qu’on peut repousser ce brouillard en un seul jour si et si seulement ce peuple qui vous porte dans son cœur se lève comme un seul homme pour changer la donne. Et ce qui l’empêche d’y arriver, c’est le manque de courage. La peur le paralyse. Il se voit alors céder un peu de « liberté » pour un peu de « sécurité. » Il préfère vivoter dans l’indignité la plus totale, mais en vie quand même, que de lutter pour atteindre un salut collectif pour les générations futures.
 
Monsieur le Président, je n’ai pas la prétention de vous donner une quelconque leçon, mais je voudrais bien vous faire observer qu’on ne peut jamais arriver au bout de cette lutte, si nous ne nous élevons pas à la hauteur des enjeux. Le camp d’en face ne nous laisse d’ailleurs pas le choix. Les issues sont bouchées. Soit nous nous enfermons dans notre pusillanimité et nous en avons pour longtemps ou soit nous décidons de nous en libérer pour créer le Changement. Et ce dernier cas est fort réalisable si, étant le seul Capitaine à bord, vous donnez le ton. Un ancien auteur chinois, Sun Tsu, enseigne à un Général : « La doctrine fait naître l’unité de penser; elle nous inspire une même manière de vivre et de mourir, et nous rend intrépides et inébranlables dans les malheurs et dans la mort. »
 
Monsieur le Président, vous devez rentrer au pays pour conclure la lutte. Le peuple verra par-là votre bravoure, votre dépassement de soi et inspirera davantage les togolais. Imaginer un Général de l’Armée qui fuit la guerre… Que restera-t-il de ses bataillons ? Je fais partie de ces bataillons, sans faire partie de votre parti politique. Mais qui suis-je ? par rapport au Général ? Lorsque que la poudre des adversaires m’atteindra, alors je rejoindrai des milliers de concitoyens anonymes qui ont péri au cours de ce combat qui n’a que trop duré. Contrairement à vous, tout le peuple entier frémira lorsqu’un seul de vos cheveux vous sera arraché par le camp adverse. Soyez rassuré mon Général, dans une lutte de cette taille, où l’avenir de tout un peuple est confisqué dans les mains d’une oligarchie, il faudrait mieux avoir des leaders de cran qui font abstraction de leur personne pour faire toute la différence. Ils doivent être conduits par leur idéal qui, d’ailleurs, les révèle. Si ce combat pour le changement n’a toujours pas abouti, c’est parce que nous avions été trop dociles pour que finalement le bourreau et ses complices de la Communauté Internationale nous prennent, nous togolais, pour des idiots. Pourtant nous sommes une Nation Intelligente ! Poussés jusqu’à nos derniers retranchements, nous ne devons plus suivre l’ornière pré-tracée qui ne nous a conduit qu’à l’échec. D’ailleurs, que respectons-nous si le camp d’en face, garant de la Justice et du Droit, fait fi de tout, déployant tous les moyens utiles à la conservation de son pouvoir ?
 
C’est vrai que l’iceberg cache une base invisible très importante et peut paraître si mystérieuse. Mais le long silence d’un Général peut prêter confusion voire démobiliser les troupes. Nous sommes à la croisée des Chemins où, tous ceux qui portent les revendications légitimes du peuple sont obligés d’user de toutes les prérogatives pour conduire à bon port la lutte. Le peuple est usé psychologiquement. Que cette lutte reste la dernière, salvatrice. Aucun sacrifice n’est trop grand quand il s’agit de son pays. Vous devez être à la hauteur des ambitions que vous portez pour ce pays. Sortir de vos silences et de vos inactions devient impératif. En tant que leader, le peuple a plus que besoin de vous, en ce moment crucial de son histoire. Il se perd et s’enfonce de plus en plus dans le désespoir. Alors, à votre boussole !
Mango, le 01 mars 2019

 
ATTIOGBE Agbémégnan Dodji
Citoyen du TOGO et du Monde
 

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