Le Togo s’agite beaucoup ces derniers temps pour accéder, comme membre non-permanent, au Conseil de Sécurité de l’ONU. Le pouvoir s’appuie sur le bénéfice qu’il croit tirer de l’implication de ses soldats dans des opérations de maintien de la paix, se prévalant ainsi d’une longueur d’avance sur la Mauritanie, l’autre candidat. Ce critère paraît court. Surtout aux yeux des Togolais qui ont de quoi se demander si l’Organisation mondiale, après son silence sidérant sur les cinq cents morts qu’elle-même est allée compter lors de la présidentielle de 2005, est prête à accorder un siège au sein de son organe exécutif au régime de Lomé, champion toutes catégories en atteintes graves aux droits de l’homme.
Les Togolais, réduits au rang de sujets par leurs gouvernants font l’amère constat d’être en plus délaissés par la Communauté Internationale. Ils attendent toujours que l’ONU, “l’organisation des peuples”, selon ses fondateurs, exhume ce dossier des cinq cents morts qui ont servi de marchepieds à Faure Gnassingbé pour succéder à son illustre papa, dictateur qui venait de passer de vie à trépas. Au nom de la justice. A défaut de cela, accorder une place de prestige au gouvernement qu’il y a seulement six ans, l’ONU a accusé de massacres de populations civiles, s’apparente à une fâcheuse incohérence qui profane la dépouille et la mémoire des victimes à jamais pleurées par la grande majorité des Togolais. Ce qui aurait eu le triste mérite d’éloigner l’institution de son ambition première, “une ONU plus forte pour un monde meilleur.”
A bon vin point d’enseigne. Autrement dit, ce qui est bon ne se recommande pas, il se distingue par ses propres qualités. Lorsqu’un pays y va des pieds et des mains pour occuper le centre des décisions internationales, c’est sans doute qu’il cherche à peaufiner une image dégradée due à une situation interne horrible. On peut citer l’exemple digne de moquerie de la Guinée équatoriale. Ce pays a offert à l’UNESCO un prix de 3 millions de dollars portant le nom du président Obiang N’guéma et destiné à récompenser la recherche en sciences de la vie. L’organisation des sciences et de l’éducation hésite. La moralité et les actes du généreux donateur dans son propre pays sont jugés “incompatibles avec les valeurs de l’agence onusienne”.
Le pouvoir RPT a été sous Eyadéma et est resté sous son fils, dans cette logique du lobbying tous azimuts, de chasses onéreuses, très souvent infructueuses, à la bonne réputation, dont le fond et le tréfond ne sont plus un secret.
C’est connu, le régime du RPT est friand des honneurs à l’extérieur, mais rechigne à les mériter par ses actes à l’intérieur. Son passif en matière des droits de l’homme a pris du volume, récemment, à travers l’arrêt de la Cour de Justice de la CEDEAO qui l’a condamné pour la révocation illégale de neuf députés d’opposition de l’Assemblée Nationale. La bonne foi du pouvoir étant, à tous les coups, sujette à caution, plusieurs ONG et l’Union Européenne ont dû instamment demander au pouvoir de Lomé de se conformer au verdict de la CEDEAO.
A vrai dire, le Togo de nos jours, sous Faure Gnassingbé, n’a pas sa place au Conseil de sécurité de l’ONU. A moins que cette instance soit devenue un fourre-tout sans compartiment ni éthique où mêmes les pouvoirs les plus pervers qui cabalent contre les libertés des citoyens peuvent aller chercher respectabilité et noblesse. Le potentat togolais devrait être débouté dans sa démarche publicitaire si l’on sait qu’il n’a jamais ratifié le statut de Rome sur la Cour Pénale Internationale (CPI) et dit au Haut Commissariat des Droits de l’Homme de l’ONU où il en est avec l’épidémique mal de l’impunité dont souffre son pays. Anguille sous roche !
Autre aberration, Lomé, malgré son état délabré, son allure de cité poubelle, s’est aussi empressée de se porter candidate à l’organisation, en Novembre, de la 22ème Session de l’Assemblée Parlementaire ACP-UE. Pendant qu’il court de par le monde en quête de sommets à accueillir sur son sol, le Togo perd la trace des choses utiles à entreprendre et s’est nettement fait dépasser dans tous les domaines, économiques notamment, par ses voisins. John Atta-Mills, Yayi Boni et Blaise Compaoré ont, eux, d’autres chats à fouetter, mus par le souci du mieux-être de leurs administrés. Ils ont compris que la satisfaction du peuple vaut mieux qu’un siège, doré soit-il, à l’ONU.
Gagnez en popularité à l’intérieur et vous gagnerez le coeur de l’extérieur. C’est une exigence de notre temps. Le contraire, pour lequel le gouvernement togolais a un goût prononcé, s’appelle affabulation. Ça ne fait plus recette.
Kodjo Epou
Washington DC
USA