DECLARATION DE L’ANC
Sur le procès engagé contre le député Kpatcha Gnassingbé et ses coaccusés devant la chambre judiciaire de la Cour Suprême
Le Mardi 06 Septembre 2011 s’est finalement ouvert au Palais de Justice de Lomé devant la chambre judiciaire de la Cour Suprême, le procès du député KPATCHA GNASSINGBE et de ses coaccusés, poursuivis d’infractions d’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat, de groupement de malfaiteurs, de rébellion etc.
On se souviendra que le 14 Avril 2009, l’Ambassade des États-Unis au TOGO, sous la garantie donnée par les autorités togolaises que le député KPATCHA GNASSINGBE et ses co-accusés bénéficieront d’un procès équitable et que les droits constitutionnels inaliénables du député seraient respectés, a refusé l’asile ou le refuge au sein de l’Ambassade, à celui qui avait échappé dans la nuit du 12 au 13 Avril à une tentative d’assassinat perpétré par un commando de la FIR (Force d’Intervention rapide) sous les ordres de son beau frère le Colonel Félix KADANGA.
Après plus de deux ans de détention préventive illégale de Mr KPATCHA GNASSINGBE et de ses coaccusés à l’ANR (Agence Nationale de Renseignements), et sans que l’immunité du député KPATCHA GNASSINGBE ait été levée, le pouvoir a enfin décidé de faire comparaitre les accusés non pas devant la Cour d’assises comme la loi l’y oblige, s’agissant d’accusations de crimes, mais devant la chambre judiciaire de la Cour suprême.
A l’ouverture du procès, les avocats de la défense ont successivement soulevé, entre autres, deux questions préjudicielles liées, d’une part à l’incompétence de la chambre judiciaire à juger au fond les accusés en raison de la limitation stricte de la compétence de la chambre judiciaire par l’article 124 de la Constitution, limitation reprise à l’identique par l’article 11 de la loi organique N°9705 du 06 Mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour suprême et d’autre part, à la non levée de l’immunité parlementaire du député KPATCHA qui au terme de l’article 53 de la Constitution bénéficie de l’immunité parlementaire empêchant qu’il puisse être arrêté, détenu ou jugé sans une levée préalable de son immunité par la procédure appropriée prévue par le règlement intérieur de l’Assemblée Nationale.
Il est important de préciser que l’article 447 du Code de Procédure Pénale qui date de 1983, est un texte de loi inférieur à la Constitution et à la loi organique. Il attribue compétence à la chambre judiciaire de la Cour suprême lorsqu’il s’agit de juger certains fonctionnaires comme les officiers de police judiciaire (02). Mais avec l’adoption de la Constitution du 14 octobre 1992, ce texte est devenu inconstitutionnel ou à tout le moins a été abrogé par l’article 45 de la loi organique du 6 Mars 1997 sur la Cour suprême.
Il y a lieu de rappeler qu’aux termes de l’article 104 alinéa 6 de la Constitution « au cours d’une instance judiciaire, toute personne physique ou morale peut, in limine litis, devant les cours et tribunaux, soulever l’exception d’inconstitutionnalité d’une loi. Dans ce cas, la juridiction (en l’espèce, la Cour suprême) sursoit à statuer et saisit la Cour Constitutionnelle.
La Cour Constitutionnelle doit statuer dans le délai d’un mois, mais ce délai peut être réduit à huit (08) jours en cas d’urgence. Un texte déclaré inconstitutionnel ne peut être promulgué.
S’il a été déjà mis en application, il doit être retiré de l’ordonnancement juridique ».
Comme on peut le constater, l’article 104, alinéa 6, ne laisse aucune marge de manœuvre à la chambre judiciaire de la Cour suprême, pour apprécier elle-même, le bien fondé ou non de l’exception d’inconstitutionnalité soulevée au cours de l’instance.
En décidant de continuer le procès sans requérir la décision de la Cour Constitutionnelle sur l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par les accusés, la Chambre judiciaire de la Cour Suprême, la plus haute juridiction de l’Etat en matière judiciaire viole lamentablement la Constitution, et ses membres commettent un abus de pouvoir, une forfaiture. Ce faisant, ils mènent le procès sur le chemin d’une justice inéquitable.
Le pouvoir RPT et les institutions qui lui sont inféodées viennent, une fois encore, d’apporter la preuve de leur opposition fondamentale à l’instauration d’un véritable Etat de droit et d’une Justice indépendante et impartiale au TOGO.
En effet, c’est le droit absolu et constitutionnel de tout togolais accusé de crimes d’être jugé, par le Juge de droit commun qui est la Cour d’assises composée de Jurés populaires et non par une chambre judiciaire de la Cour suprême, composée spécialement de juges aux ordres ou à la solde du pouvoir en place.
L’ANC, soucieuse de sortir la justice de notre pays de son abominable état de délabrement, et respectueuse de la loi fondamentale, se sent parfaitement à l’aise pour défendre avec détermination et fermeté, les principes de l’Etat de droit, applicables à tous les citoyens y compris au député KPATCHA GNASSINGBE et ses coaccusés qui, au demeurant, ne sont pas de son bord politique.
La justice que l’ANC veut instaurer au TOGO, est celle qui garantit à tout citoyen, quelle que soit son appartenance politique ou ethnique, le respect de ses droits constitutionnels, qui sont, le droit à un procès équitable avec ses corollaires : la présomption d’innocence, une justice indépendante et impartiale, le respect des droits de la défense.
L’ANC demande la démission du juge PETCHELEBIA Abalo coupable d’abus de pouvoir et de forfaiture. Son attitude bafoue l’intelligence et le sens de la Justice des Togolais.
Fait à Lomé le 08 Septembre 2011
Le Président National de l’ANC
Monsieur Jean-Pierre FABRE