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Le Togo organise du 25 au 28 mars prochains la semaine nationale de l’évaluation des politiques publiques et de gestion axée sur les résultats de développement au Togo. Qu’est-ce que c’est que cette semaine et quel est l’objectif assigné à cette rencontre où les acteurs du développement au Togo de tous les domaines se retrouveront pour discuter.

 

Pour répondre à ces questions, l’Agence de presse Afreepress a interrogé le professeur Kako Nubukpo, qui dirige depuis quelques mois le département de la Prospective et de l’Evaluation des Politiques Publiques, un jeune ministère dont la mission est de réaliser « de façon participative » la vision Togo 2030 et de faire l’évaluation des politiques publiques axées sur les résultats.

 

Dans cet entretien, l’ancien directeur exécutif du Centre Autonome d’Etudes et de Renforcement de Capacités pour le Développement au Togo (CADERDT), a révélé que la semaine nationale de l’évaluation a pour mission, de faire le point des résultats auxquels le Togo a abouti « du fait de l’évaluation des politiques publiques », dans un souci de « redevabilité », de «meilleure gestion » et d’« aide à la décision ».

 

« Le Togo ne va pas réinventer la roue », a-t-il rassuré. Pour cela, pendant cette semaine, les participants à cette première édition de cet événement qui se veut annuel selon le ministre, vont bénéficier de l’appui technique du département de l’évaluation de la Banque Africaine de Développement (BAD) et de l’expérience des pays voisins du Togo, notamment le Bénin et le Sénégal dont les ministres en charge de l’évaluation seront présents.

 

Dans un souci de placer l’évaluation des politiques dans une dynamique « participative », une politique nationale de l’évaluation sera mise en place.

 

« Mais pour donner un cadre global à cette activité, il faut élaborer une politique nationale de l’évaluation. Et c’est ce processus d’élaboration qui doit être le plus participatif possible afin que, et les collègues du gouvernement et les acteurs de la société civile, les acteurs du secteur privé, puissent avoir leur mot à dire, afin que nous ayons un document qui soit le fruit d’un consensus national », a-t-il expliqué.

 

L’implication de la population va passer par une prochaine tournée nationale pour recueillir ses « aspirations ».

 

Afreepress.info : professeur Kako Nubukpo, bonjour. Vous êtes ministre auprès du président de la République, chargé de la Prospective et de l’Evaluation des Politiques Publiques. Ce ministère créé récemment en 2013 n’est pas tout à fait connu des populations. Dites-nous en bref, que faites-vous dans ce gouvernement ?

 

Kako Nubukpo : Merci beaucoup. Comme vous venez de le dire, le ministère a deux volets, la prospective d’une part et l’évaluation des politiques publiques d’autre part. S’agissant de la prospective, l’idée, c’est de réaliser de façon participative la vision Togo 2030, c’est-à-dire pour les 15 années à venir, comment les Togolais et les Togolaises voient l’avenir de leur pays, quelles sont les aspirations et comment nous pouvons aider à réaliser ces aspirations ?

 

Le second volet du ministère qui consiste plutôt à évaluer les politiques publiques, est fondé sur l’idée de la bonne gouvernance et de la gestion axée sur les résultats.

 

Nous avons deux volets qui sont complémentaires, d’une part la vision que nous avons pour le pays, et d’autre part, la manière dont nous pouvons réaliser de manière la plus rationnelle possible cette vision.

 

Afreepress.info : Monsieur le ministre, on sait que vous partez de la tête du Centre Autonome d’Etudes et de Renforcement de Capacités pour le Développement au Togo (CADERDT) pour devenir ministre à ce poste et beaucoup ont eu à dire qu’en vous nommant à ce poste, on vide le CADERDT de son essence. Selon eux, on vous ramène à un poste ministériel, donc politique pour reprendre ce que le CADERDT fait. Quelle est votre appréciation ?

 

Kako Nubukpo : La philosophie du CADERDT, c’est comment renforcer les capacités de l’ensemble des citoyens des secteurs public et privé, de la société civile, afin qu’ils puissent contribuer du mieux possible au développement de notre pays. La création de ce ministère, c’est quelque part une montée en grade de ce que fait le CADERDT pour que la légitimité politique qui peut être nécessaire quelques fois pour impulser ce processus indispensable de renforcement de capacités, puisse être effective. Et donc, dans la nouvelle architecture, le CADERDT a comme présidence du comité de pilotage, le ministère chargé de la prospective et d’évaluation des politiques publiques. Nous allons plus vers une grande complémentarité.

 

Afreepress.info : Autrement dit, vous dirigez toujours le CADERDT ?

 

Kako Nubukpo : Non, le principe du CADERDT, c’est l’autonomie vis-à-vis des responsables politiques et c’est d’ailleurs pour cela que j’ai dû démissionner du CADERDT dès l’annonce de mon entrée au gouvernement. Nous tenons beaucoup à l’indépendance du CADERDT parce que c’est au prix de cette indépendance que la crédibilité du CADERDT peut être assise.

 

Afreepress.info : Dans les actions que votre ministère aura à mener, la toute première de votre existence, du 25 au 28 mars prochains, vous l’appelez la Semaine de l’évaluation des politiques publiques et de gestion axée sur les résultats de développement au Togo. Quelle est l’intérêt de cette semaine et qu’est-ce qui sera fait ?

 

Kako Nubukpo : Comme nous sommes dans une nouvelle philosophie du développement marquée par le passage d’une logique de moyens et de résultats, il est important que tous les Togolais, en tout cas la plupart soit mise au courant des enjeux de ce basculement. Nous voulons insister sur le fait que l’évaluation des politiques publiques a trois enjeux qu’il faut mettre à disposition du public.

 

Le premier enjeu, c’est l’enjeu démocratique. Dans une démocratie, il y a lieu de rendre compte, c’est la redevabilité. C’est pour ça que nous évaluons les politiques publiques afin que chacun sache ce qui se passe au niveau de ces politiques.

 

Le deuxième enjeu, c’est l’enjeu de gestion. Nos ressources sont rares, donc elles doivent être allouées de façon optimale, c’est-à-dire que là où les politiques ne donnent pas leurs résultats escomptés il faut les réviser parce que sinon on parlerait de gaspillage. Là où les politiques donnent leurs résultats, il faut peut-être les encourager, sinon les amplifier. Et là où les politiques ne sont vraiment pas efficaces et efficientes avec des objectifs qui ne sont pas clairs, il faut peut-être les abandonner. Le 2ème enjeu, c’est un enjeu de gestion.

 

Le troisième enjeu, c’est l’enjeu de l’aide à la décision pour le gouvernement, c’est-à-dire que la différence entre ce que nous faisons, l’évaluation d’impact et que d’autres font en termes d’audit ou de contrôle, c’est que nous devons, du fait de nos résultats, aider le gouvernement à améliorer l’action publique.

 

Ces trois objectifs, la redevabilité, une meilleure gestion et l’aide à la décision doivent être connus et partagés, c’est pour ça que la semaine nationale de l’évaluation a comme principal objectif de mobiliser l’ensemble des Togolais à un exercice qui va être un exercice de plus longue durée, c’est-à-dire l’élaboration de la politique nationale de l’évaluation des politiques publiques.

 

Afreepress.info : Est-ce à dire que vous êtes dans la dynamique d’un événement annuel ou si vous voulez qui va se répéter dans le temps ?

 

Kako Nubukpo : Chaque année nous aurons la semaine nationale de l’évaluation pour faire le point des résultats auxquels nous aurons abouti du fait de l’évaluation des politiques. Mais pour donner un cadre global à cette activité, il faut élaborer une politique nationale de l’évaluation. Et c’est ce processus d’élaboration qui doit être le plus participatif possible afin que, et les collègues du gouvernement et les acteurs de la société civile, les acteurs du secteur privé, puissent avoir leur mot à dire, afin que nous ayons un document qui soit le fruit d’un consensus national.

 

Afreepress.info : Mais quelle sera la participation de la population même dans ce processus ? Est-ce qu’une semaine d’activités suffira-t-elle pour permettre à la population de participer ou même de demander des comptes ?

 

Kako Nubukpo : La population sera bien entendu associée. De deux, déjà, nous allons faire le tour du pays. Et ça, c’est un exercice que nous allons faire à la fois pour la prospective pour avoir la vision des Togolais mais aussi pour l’évaluation pour comprendre les enjeux et les aspirations des populations. Mais en dehors de ce travail de terrain que nous allons faire, il y a ce qu’on appelle les corps constitués, les représentants des ONG, le patronat, la chambre de commerce. Avec ces corps constitués, ces représentants dont la légitimité est quand même avérée, nous pouvons engager dès la semaine prochaine, dès le mardi 25 mars ce processus de discussions en vue de l’élaboration de la politique nationale de l’évaluation.

 

Afreepress.info : L’initiative de cette semaine de l’évaluation des politiques publiques et de gestion axée sur les résultats du développement au Togo vient de votre département mais il y a également la collaboration de la session togolaise de la Communauté Africaine des Praticiens et le Réseau Togolais des Evaluateurs avec l’appui technique et financier de la Banque Africaine de Développement (BAD). Quel sera l’apport de chacun de ces partenaires au cours de cette semaine ?

 

Kako Nubukpo : L’apport que nous escomptons est très grand parce que le contrôle citoyen de l’action publique est au cœur de la création de ces deux instances que vous venez de citer, l’AFCOM et le RETEVA. Nous avons vraiment besoin de dialoguer, d’échanger, de mettre tous les problèmes sur la table afin que de façon participative, nous essayons de trouver des avances de solution.

 

Il y a un élément que je voudrais souligner, c’est l’appui technique et financier de la BAD qui, dès la création de notre ministère, n’a ménagé aucun effort pour nous accompagner. Et comme vous le savez, le département de l’évaluation de la BAD a une riche expérience en matière d’évaluation des politiques, programmes et projets partout en Afrique. Cette expérience, la BAD accepte de la mettre à notre disposition, afin que nous ne réinventions pas la roue, afin que nous puissions déjà nous inspirer de ce qui est par ailleurs dans d’autres pays. Et c’est aussi le sens de l’invitation des ministres béninois et sénégalais en charge de l’évaluation des politiques publiques pour que nous puissions partager ensemble les expériences croisées.

 

Propos recueillis par Olivier Adja

 

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