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« Un Capitaine en charge de l’enquête déchira le procès-verbal d’audition en déclarant qu’il ne pouvait pas faire condamner un innocent et qu’il attendait des instructions pour le libérer »
 
Les arrestations arbitraires des leaders de l’opposition et leurs militants continuent de susciter des réactions. L’un des fils du Président de l’Organisation pour Bâtir dans l’Union un Togo Solidaire (OBUTS), Jean-François Kodjo a, à travers cette interview, voulu parler des conditions de détention et la parodie de procédure qui ont conduit à l’arrestation de son père Agbéyomé Kodjo. Lire plutôt !
 
Bonjour Jean-François Kodjo. Le 16 janvier dernier, votre père président de l’OBUTS a été arrêté à son domicile quelques heures après la levée de son immunité par l’Assemblée Nationale. Dites-nous comment avez-vous vécu cette épreuve ?
 
JFK : Un sentiment de frustration et d’injustice du fait de la récurrence de ces actes de violence et d’humiliation gratuite dont Agbéyomé Kodjo est victime depuis plusieurs années.
 
Depuis bientôt un mois, votre père est gardé à la Gendarmerie nationale. Quelles sont les conditions de sa détention et quel est son moral ?
 
JFK : Il est difficile d’avoir le moral lorsque vous êtes arbitrairement détenu et en proie à des actes d’acharnement et de barbaries injustifiées et délibérées. Comme tout le monde le sait, la tentative de levée de l’immunité parlementaire est un viol de notre Loi fondamentale en ses articles 10 et 11 et des dispositions prévues en l’espèce dans le règlement intérieur de l’Assemblée nationale en son article 79. L’interpellation et la détention d’Agbéyomé Kodjo ne répondent à aucun principe moral ni juridique. Les perquisitions de son domicile et du siège du parti ont été effectuées sans aucun mandat, de même d’ailleurs que son arrestation. Tous ces éléments, additionnés aux persécutions à répétition dont il fait l’objet, démontrent à suffisance que les réels arguments qui motivent sa détention sont ailleurs.
 

Nous avons appris qu’il a fait une crise et ce n’est que vers 19h qu’on a autorisé le médecin à le voir. Vous confirmez ?

 
JFK : Agbéyomé Kodjo est en effet victime d’une mise en danger de la part des autorités. Comment comprendre que le médecin traitant fut empêché pendant près de neuf heures de temps de lui administrer des soins d’urgence, alors que les gendarmes qui le surveillaient ont dès le déclenchement de sa crise, informé le Capitaine en poste ?
 
Quatre semaines après son interpellation, aucun élément n’établit son implication directe ou indirecte dans ces incendies. Les interrogatoires ainsi que les différentes confrontations organisées par le SRI prouvent son innocence. Nonobstant ces indications et en dépit de son état de santé, les autorités persistent à le maintenir dans des conditions hautement cruelles dans les locaux de la Gendarmerie.
 
Que lui reproche-t-on exactement ?
 
JFK : De façon officielle, il lui est reproché son implication dans les incendies qui ont frappé notre pays. La méthode malveillante et digne d’un autre âge utilisée pour tenter de le priver de son immunité parlementaire, la brutalité de son interpellation, les conditions assassines dans lesquelles il est détenu, les incendies qui continuent de frapper notre pays sans parler des graves incohérences et autres indices qui dévoilent que les vrais commanditaires de ces crimes sont ailleurs…Voici autant d’éléments qui démontrent l’arbitraire de la situation que le pouvoir en place impose à Agbéyomé Kodjo. Dans le même registre, le Vice-président du parti Gérard Adja s’est vu arrêté pour une affinité supposée avec une dame présumée receleuse de tissus volés au Grand-marché de Lomé, il sera accusé de recruter des jeunes pour incendier des stations d’essence, pour se voir enfin inculpé comme co-auteur des incendies des marchés de Lomé et de Kara. Des faits qui cachent mal les vraies intentions de ceux qui, de façon personnelle et déloyale, veulent régler des comptes aux hauts responsables de OBUTS. Pour preuve, quelques jours après l’interpellation d’Agbéyomé Kodjo, un Capitaine en charge de l’enquête déchira le procès-verbal d’audition en déclarant qu’il ne pouvait pas faire condamner un innocent et qu’il attendait des instructions pour le libérer. Il faut croire que les instructions qu’il a reçues ne sont pas allées dans le sens de la Justice et de la Vérité. Une situation qui rappelle étrangement les propos du Juge Sogoyou lors de la tentative de dissolution de OBUTS en 2010 : « Le procès étant politique, j’ai donc pris une décision politique » (sic).
 
Le Procureur de la République a déclaré que tous ceux qui ont été arrêtés sont inculpés et placés sous mandat de dépôt. Pourquoi votre père est-il toujours gardé à la Gendarmerie nationale ?
 
JFK : Il s’agit d’un flagrant délit de mensonge auquel il appartient aux autorités d’apporter des explications. Selon quelle logique peut-on arrêter des personnes avant même de chercher les éléments de preuves susceptibles de les incriminer ? Selon quelle logique une personne peut-elle être placée sous mandat de dépôt après que les Lois de la République ont été bafouées pour disposer de lui et après que toutes les indications obtenues par les enquêtes confirment son innocence ?
 
Quelles sont à ce jour les différentes actions que vous avez entamées sur le plan national et international en vue d’obtenir la libération de votre père.
 
JFK : Nous avons saisi l’ensemble du corps diplomatique qui est convaincu, à l’instar de l’immense majorité des Togolais et de la Communauté internationale, de l’innocence des hauts responsables de OBUTS. Les chancelleries tiennent informées leurs capitales respectives au fur et à mesure des éléments additionnels que nous leur communiquons. La France vient à cet effet de publier un communiqué pour dénoncer l’arbitraire de ces arrestations et exiger la libération de toutes les personnes abusivement détenues dans le cadre de cette affaire. Plusieurs personnalités de la sous-région sont également saisies de cette aberration dont se rendent coupables nos autorités. Un collectif d’avocats internationaux vient par ailleurs de se constituer pour dénoncer avec plus de vigueur cette obstination des autorités à vouloir bâillonner à tout prix un adversaire politique gênant.
 
Selon plusieurs observateurs, votre père serait victime d’un acharnement du pouvoir. Pensez-vous que Faure Gnassingbé a personnellement des comptes à régler à Monsieur Agbéyomé Kodjo ?
 
JFK : Le chronogramme des injustices dont Agbéyomé Kodjo est la cible est assez révélateur. Les soixante jours passés arbitrairement aux mains des bérets rouges du Camp Landja en 2005, le refus de lui payer les dépens judiciaires suite au procès, en violation de l’article 19 de la Constitution, la tentative d’assassinat dont il a fait l’objet la même année à Sotouboua, le refus de lui faire appliquer les statuts liés aux postes de responsabilités qu’il a occupés comme le prévoit la Constitution, les entraves à l’obtention de visas parfois pour raison de santé, les manœuvres tendant à l’empêcher de participer aux élections en 2010 et la tentative de dissolution de son parti dès le lendemain des élections présidentielles, l’interpellation musclée opérée en juin 2012 par les éléments du SRI, la tentative en décembre 2012 de lui faire porter la responsabilité d’un coup d’Etat visiblement inventé de toutes pièces dans les officines du pouvoir….Loin d’être intégral, ce listing confirme une volonté résolue d’étouffer par tous les moyens Agbéyomé Kodjo.
 
Avez-vous un appel à lancer aux Togolais et à la communauté internationale ?
 
JFK : L’histoire de notre pays est en train de s’écrire et il appartient à chaque Togolais d’y apporter sa participation en restant vigilant et mobilisé pour faire échec au cycle d’insécurité perpétuelle dans lequel nous vivons au Togo. Que nos braves sœurs et mères commerçantes demeurent dans l’espérance et la ferme conviction d’embrasser des perspectives plus heureuses.
 
Toute notre gratitude au Parti socialiste Français pour son engagement résolu à la cause de la démocratie, ainsi que l’ensemble de la Communauté internationale pour son soutien et les efforts déployés en vue d’obtenir la libération rapide d’Agbéyomé Kodjo et des autres détenus. Pour finir, j’invite nos autorités et plus particulièrement ceux qui s’entêtent à accabler les leaders d’OBUTS, à méditer cette célèbre maxime : « Lorsque l’opportunité t’est donnée de monter, aies un minimum d’égards pour ceux qui descendent, car inévitablement tu descendras toi aussi un jour ! ».
 
Propos recueillis par Ferdinand AYITE
 
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