Beaucoup de Togolais se posent la question de savoir pourquoi leur pays n’avance pas sur le plan de la démocratisation, de la bonne gouvernance, du développement économique et social. La réponse est toute simple : le Togo n’est pas une République. L’appellation « République togolaise » n’est qu’un leurre. Ce petit pays étiré entre le Ghana et le Bénin est plutôt un royaume à l’état primitif, non loin de ceux existant en Afrique avant la pénétration européenne.
 
Selon le dictionnaire Hachette, une République désigne « un Etat gouverné par des représentants élus pour un temps et responsables devant la nation ». Pour Le Petit Robert, elle signifie une « forme de gouvernement où le chef de l’Etat (président) n’est pas seul à détenir le pouvoir qui n’est pas héréditaire ». Comme on le voit, ces deux définitions accordent une place de choix au peuple qui fait et défait les gouvernants selon ses besoins. Cette force conférée au peuple induit une séparation des trois pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire et un bon fonctionnement des institutions. Mais ce n’est pas le cas au Togo après la parenthèse Olympio-Grunitzky-Dadjo.
 
Depuis la prise du pouvoir de feu Gnassingbé Eyadema, le Togo est comme un royaume traditionnel où tous les pouvoirs sont concentrés entre les mains du seul Eyadema pris pour un roi. Aucun citoyen ou institution ne pouvait rien faire face à ce roi tout puissant qui contrôle aussi les deux autres pouvoirs. L’armée était le socle de ce royaume et agissait selon la volonté du roi, la justice était sous ses ordres et le parlement créé n’existait que de nom. Ainsi, les plus hautes instances judiciaires ne lisaient le droit qu’en faveur d’Eyadema et de son clan. La manière dont  la Cour constitutionnelle proclame les résultats des élections et traite les recours introduits par les différents candidats, en est l’illustration parfaite. Eyadema était la justice, et la justice était Eyadema.
 
Aujourd’hui, la situation s’est même empirée avec l’arrivée de Faure Gnassingbé au « trône royal ». On se souvient de cette image cocasse du 5 février 2005 où un quarteron d’officiers lui a fait allégeance. Ce qui signifie que le « Leader nouveau » n’est ni un démocrate, ni un républicain. S’il reconnaissait que dans une République, le pouvoir appartient au peuple, il n’allait pas accepter cette allégeance. De plus, l’armée togolaise qui s’est prêtée à cette cérémonie éhontée, n’est pas une armée républicaine. Mêmes les fameuses réformes faites dans le cadre de l’Accord politique global (APG) ne sont que du saupoudrage. L’armée reste toujours au service de la seule « famille royale ». Ainsi, en février 2005, l’armée, l’Assemblée nationale et la Cour constitutionnelle ont montré leur mépris pour la République et la population pour faire monter Faure Gnassingbé au pinacle.
 
En dépit des discours qui ont suivi  arrivée de Faure au pouvoir, rien n’a changé dans la gestion des affaires. Les différentes institutions (Assemblée nationale, Armée, Justice, Cour des comptes …) sont toutes aux mains du prince héritier, sa famille et son clan. C’est dans cette même dynamique que toutes les richesses du Togo sont détournées par le clan sans que personne ne bronche. Et c’est dans une opacité totale que toutes les sociétés d’Etat sont gérées. La plupart de ses directeurs sont de l’entourage immédiat de Faure Gnassingbé : Bikassam, Bidamon, Walla, Ingrid Awadé, Pekemsi … A partir du moment où le prince accepte qu’on utilise les fonds publics pour lui construire des résidences à travers tout le pays, tous les abus sont permis. Ne dit-on pas que qui sert, doit aussi se servir ?
 
Mais il convient de souligner qu’en 38 ans de règne, le général Eyadema n’a pas construit autant de villas à travers le pays. Quant à son fils, il a, en six ans, plusieurs résidences qu’il ne visite même pas. Selon les informations en notre possession actuellement, c’est le château Vial à Kpalimé qui serait en train d’être rénové pour le compte du « fils de la nation ». Les travaux seraient naturellement confiés à CENTRO, cette société très liée à la patronne des Impôts et qui exécute toujours ces genres de travaux sans appel d’offre. Cette rénovation pourrait engloutir trois milliards de FCFA. « Les résidences construites pour le chef de l’Etat coûtent chacune entre 2 et 3 milliards FCFA », affirme un expert en bâtiment. On laisse le soin aux Togolais d’évaluer ce qu’ont coûté les nombreuses résidences du chef de l’Etat : les villas de la Cité OUA, Agou, Blitta, Cacavéli, Défalé, Dapaong et le château Vial en rénovation. Sans oublier ses nombreuses voitures de luxe dont deux Maybach que n’utilisent même pas les dirigeants des pays les plus huppés.
 
Dans cette chienlit, chaque directeur de société fait ce que bon lui semble. Il y a des dépenses qui sont faites sans qu’elles ne soient budgétisées. Rien n’est planifié. C’est ainsi qu’on peut se lever un matin et demander au DG de Togotélécom d’aménager le monument de l’indépendance. Et lui aussi en profite pour se mettre plein la poche. Tout comme la DG des Impôts qui aurait dépensé 8 milliards FCFA dans la construction du siège de la DGI.
 
En outre, il existe des entreprises qui gravitent autour du « trône royal » et qui ont souvent des marchés. Soit ce sont des sociétés écrans des nouveaux milliardaires de la République, soit elles sont créées par leurs proches : Centro, CIB, GER … Des magouilles qui ne disent rien à la Cour des comptes truffée des barons du système.
 
Nonobstant la mauvaise gestion avérée de ces directeurs de société, ils sont maintenus à leur poste alors que des ministres et hauts fonctionnaires sont démis de leur fonction et traités comme des moins que rien. Ils sont tout simplement humiliés. Tout dépend des sautes d’humeur du prince qui n’a que faire de l’avis du peuple et qui continue de prendre le Togo pour un royaume. C’est dans cette optique qu’il a également envoyé au gnouf ses frères de sang (Kpatcha, Essolizam, Julien, Bagoubadi, Esso) aux fins d’être le seul maître à bord.
 
Si on était vraiment dans une République où on tient au respect de la personne humaine, le chef de l’Etat n’allait pas décorer le Colonel Massina Yotroféi de l’ANR accusé de torture. Si on était dans une République, certaines femmes n’allaient pas se proclamer femmes du président et faire la loi dans tous les secteurs du pays. Aujourd’hui, c’est une certaine Rebecca qui se colle le label de femme du président et qui a le monopole de publicité de Togocellulaire. Il en est de même de la dame Julie Béguédou qui contrôle plusieurs secteurs : exploitation du riz, huile, engrais, exploitation du bois … On s’en souvient, c’est elle qui a fait partir le ministre Kokou Gozan.
 
Bientôt les Evala, la fête traditionnelle des Kabyè, l’ethnie du « roi ». Toutes les sociétés d’Etat vont financer à coup de millions ces manifestations alors qu’elles sont bruyamment absentes lors des fêtes traditionnelles des autres peuples du Togo.
 
Coco Tchak
 
 
source: liberté hebdo togo

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