L’îlot démocratique qu’est le Ghana en Afrique de l’Ouest semble avoir un avenir incertain. Pour cause, l’ancien chef d’Etat Jerry John Rawlings s’active pour faire élire à la présidentielle de 2012 sa femme, Nana Konadu Agyeman Rawlings. L’ex-première dame s’est officiellement déclarée candidate aux primaires pour la présidentielle sous les couleurs du parti au pouvoir, le National Democratic Congress (NDC).
 
La rumeur se confirme
 
Elle courait les rues de Kumassi, Accra ou de Takoradi. La rumeur de la candidature depuis quelques mois de Mme Rawlings a été confirmée le mardi 03 mai dernier.
 
C’est devant une foule de supporters, de personnalités et compagnons de lutte de son mari et ancien président de la République du Ghana que Mme Nana Konadu Rawlings s’est présentée au siège du NDC, le parti au pouvoir, pour officiellement faire acte de candidature aux primaires en vue de la présidentielle de 2012. Après s’être acquittée des frais d’inscription qui s’élèvent à 10 000 cedis, soit 6 700 dollars, Mme Nana Konadu Rawlings a déclaré dans un bref message : « En allant chercher ces formulaires de candidature aujourd’hui, je marque le début du chemin qui conduira le Ghana où il convient qu’il aille ». Déjà de nombreux observateurs affirment que la démocratie ghanéenne devra connaître des jours sombres si l’ex-Capitaine d’Aviation Jerry John Rawlings ne revoie pas sa copie en évitant de diviser le NDC.
 
Des incompréhensions qui aboutissent au clash
 
De nombreux Ghanéens ne comprennent pas ce qui divise l’actuel président de la République John Atta Mills et son ancien mentor Jerry John Rawlings. C’est bien Rawlings, Président du Ghana pendant 19 ans, qui a amené à la politique l’actuel président. Alors qu’il achevait son deuxième mandat à la tête du pays, Rawlings avait désigné Mills comme son successeur. Avec sa bénédiction, il a affronté sans succès en 2000 et en 2004 l’ex-président John Kuffor. C’est finalement en 2008 que M. Mills est parvenu à remporter la présidentielle devant son challenger et candidat du NPP, le parti de John Kuffor. Pour beaucoup d’observateurs, au vu de son combat pour l’élection de son fils spirituel, son aura et le mythe qu’il symbolise, Jerry John Rawlings serait incontournable dans l’appareil politique du nouveau pouvoir. Mais très vite, les brouilles ont surgi et Rawlings a pris ses distances.
 
La première illustration du divorce entre Mills et Rawlings a été faite en fevrier 2010. Un incendie avait ravagé la propriété des Rawlings à Accra et le gouvernement avait promis mettre à leur disposition un immeuble. Mais l’attente a duré des mois et rien ne leur a été donné. Par la suite, l’ex-président est monté au créneau pour fustiger la politique socio-économique du pouvoir en place. Bien qu’étant membre du NDC au pouvoir, Rawlings ne ménageait pas du tout son ancien disciple qui selon lui a délaissé les idéaux du parti pour suivre les ordres d’une classe d’oligarques locaux manipulés par « l’internationale capitaliste ». De nombreuses tentatives des ténors du parti pour réconcilier les deux protagonistes ont été vaines. En vieux briscard de la politique, Rawlings a alors mis sur orbite son épouse pour la présidentielle de 2012.
 
Candidature de Mme Rawlings ou le début d’un fiasco démocratique au Ghana
 
Les faits ne trompent plus. L’ex-président Rawlings veut faire son retour au pouvoir. Et il use de tous les moyens à sa disposition pour y parvenir. Pour camoufler cette envie qui serait mal perçue par l’opinion nationale et internationale, l’ex ami de Thomas Sankara a mis au devant de la scène sa femme. Le principal parti d’opposition, le NPP de Nana Akuffor Addo, se frotte les mains. Le président Rawlings jouit d’une renommée pour son intégrité et son dévouement pour la cause de son peuple qu’il a servi pendant environ deux décennies. En 2000, il a, par opposition à plusieurs de ses pairs qui se sont incrustés au pouvoir, renoncé à briguer un troisième mandat et c’est l’opposition qui a dirigé le pays pendant huit ans.
 
Grâce à lui, le Ghana est cité en exemple en matière de démocratie, de gestion efficiente et transparente des ressources étatiques sur le contient africain. Le président américain Barack Obama, pour saluer les Ghanéens, a fait sa première visite en terre africaine après son investiture au Ghana et a salué les Ghanéens pour la démocratie dans le pays.
 
Le président Rawlings, dans cette lutte pour le pouvoir provoquerait la scission au sein du parti au cas où sa femme n’est pas élue aux primaires. Personne ne peut deviner ce que ce combat fratricide engendrerait quand on connaît le pouvoir de nuisance de l’ex-capitaine d’Aviation qui semble prêt à tout pour revenir aux affaires. Si le Ghana tombait dans les troubles socio-politiques, les esprits malins jubileraient et affirmeraient tel Jacques Chirac que « l’Afrique n’est pas encore mûre pour la démocratie »
 
Sam Gagnon

 
source: Le Correcteur 251

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