Le chef de l’État a annoncé qu’il ne briguerait pas un second mandat pour ne pas être facteur de division. Une issue inédite à un quinquennat douloureux.
Par Charlotte Chaffanjon
François Hollande avait à cœur de rester dans l’histoire. Il confiait aux journalistes qui le rencontraient régulièrement au cours de son quinquennat qu’il espérait que celle-ci le « réhabiliterait ». Réhabiliterait son image, si peu respectée, mais son action aussi, perpétuellement décriée. Il pensait que les résultats économiques qui tardaient finiraient par prouver aux Français qu’il avait raison.
Il s’est offert ce jeudi soir sa part d’histoire, par un départ inédit. Un simple « au revoir » à cinq mois de la fin d’un premier mandat, un « au revoir » qui avait des allures de « basta ! », un bilan, assumé, égrené la voix blanche, un « bon courage » à ceux qui lui succéderont dans ce marasme, mais qu’il ne nommera pas. « S’il pense qu’il a face à lui la gauche la plus conne du monde et qu’elle ne comprend pas que, pour éviter un deuxième tour entre Fillon et Le Pen, il faut se rassembler, alors il pourra renoncer », nous disait, lundi, l’un des plus proches du président.
Hollande n’a pas dit autre chose ce jeudi 1er décembre. Il l’a simplement dit autrement. « Pour ma part, je ne suis animé que par l’intérêt supérieur du pays », a soufflé le président. « Je suis conscient des risques que ferait courir une démarche qui ne rassemblerait pas largement. J’ai décidé de ne pas être candidat au renouvellement de mon mandat. »
« Aucun président sortant n’a été réélu quand il était aux responsabilités »
Avant de partir en fermant la porte derrière lui, François Hollande a pris soin d’énumérer ses fiertés. Lutte contre le réchauffement climatique, école, progression des libertés, lutte contre les discriminations, démocratie modernisée, réforme territoriale, fin du cumul des mandats, transparence, la cohésion nationale maintenue sous la menace terroriste, etc. Et cette baisse du chômage à laquelle il avait conditionné sa candidature.
De fait, la tendance à la baisse du nombre de chômeurs sur la fin de son mandat n’aura pas suffi. François Hollande ne reconnaît qu’un seul « regret » : « C’est d’avoir proposé la déchéance de nationalité parce que je pensais qu’elle pouvait nous unir, alors qu’elle nous a divisés. »
Le chef de l’État connaît par cœur l’histoire politique de la Ve République. Voilà ce qu’il nous confiait en plein milieu de son quinquennat : « Aucun président sortant n’a été réélu quand il était aux responsabilités. » Il mettait de côté Charles de Gaulle en 1965, car « il n’avait pas été élu au suffrage universel la première fois », et François Mitterrand et Jacques Chirac en 1988 et 1995, car « ils étaient en cohabitation, ce qui leur a permis paradoxalement d’être les candidats de l’alternance ». Sans compter qu’il était obsédé par le souvenir traumatisant de 2002.
« Face aux épreuves, j’ai pu avoir une capacité de résistance inépuisable »
Il y a quelques mois, un très proche de François Hollande nous promettait « une campagne Blitzkrieg ». Il n’en sera rien. Un quinquennat émaillé de petites et de grandes crises, des plus futiles aux plus dramatiques, un quinquennat en forme d’ascenseur émotionnel aura eu raison de son ambition. Le tweet de Valérie Trierweiler, la crise de la zone euro amplifiée par la situation de la Grèce, la une de Closer, les attentats terroristes, les affaires Cahuzac, Morelle et compagnie, l’émergence d’Emmanuel Macron, le livre de son ancienne compagne, la déchéance de nationalité, la loi travail, la révolte des frondeurs, les démissions et les limogeages de ministres en série…
Tout cela compilé dans un Un président ne devrait pas dire ça…, un livre à la fois instructif et affolant, un ovni de confessions, 672 pages au cours desquelles François Hollande confie tout et n’importe quoi. « Face aux épreuves, j’ai pu avoir une capacité de résistance inépuisable. »
Le 31 mars 2011, François Hollande se déclarait candidat à la présidentielle 2012 via la primaire de la gauche depuis sa ville de Tulle, au cœur de l’hôtel du département qu’il venait de remporter. « J’estime qu’il n’y a plus de temps à perdre, il y a même urgence : j’ai décidé de présenter ma candidature à l’élection présidentielle. Il faut être capable de donner à la France la fierté qu’elle mérite et aux Français la confiance qu’ils attendent. » C’est à peu près ce qu’a dit le président de la République ce soir
source : Le Point