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Ce serait naïf de la part des partis politiques de l’opposition d’espérer gagner au Togo, des élections législatives organisées aux conditions du pouvoir en place.
 
Les résultats provisoires qu’a commencé à décréter la commission électorale nationale indépendante (CENI), en l’absence des procès-verbaux, indiquent clairement que l’Union pour la République (UNIR) est bien partie pour engranger la majorité absolue à la prochaine Assemblée Nationale avec environ 62 à 64 sièges sur un total de 91 qui sont prévus.
 
Qui dit mieux ? Faure Gnassingbé et son entourage ne pouvaient pas être aussi myopes au point d’enclencher un processus électoral sans avoir mis les verrous nécessaires pour le remporter.
 
Ce serait vraiment idiot de leur part de prendre un tel risque, de tout forcer, de gruger les maigres ressources de l’Etat pour initier un tel processus pour enfin le perdre. Ce serait vraiment mal connaître Faure Gnassingbé que de croire, un seul instant qu’il est de nature à perdre facilement les coups qu’il initie et conduit lui-même.
 
Ce qui est en train d’être présenté au peuple togolais comme résultats par la Commission Electorale Nationale Indépendante que préside Angèle Dola Aguigah, une éternelle activiste du régime en place, est donc logique et relève du bon sens.
 
Il faudrait juste rappeler au bon souvenir du peuple togolais que le pouvoir de Faure Gnassingbé avait raté, depuis octobre 2012, d’organiser dans les délais, les élections législatives qui devraient sanctionner la fin de la mandature de l’Assemblée Nationale sortante.
 
Ce manquement grave avait en réalité plongé le Togo dans un vide institutionnel malgré les artifices trouvés par la Cour Constitutionnelle pour proroger de force, le mandat de l’Assemblée sortante.
 
Le pouvoir à l’époque avait prétexté de ce qu’il voulait promouvoir le dialogue et le compromis politique avant d’organiser des élections acceptables par tous.
 
Au final l’on se rend bien compte que c’était juste une fuite en avant. Faure Gnassingbé avait en réalité besoin du temps pour monter un système adéquat de trucage des résultats avant de se résoudre à engager le processus.
 
La preuve, c’est qu’au bout de plus dix mois de tergiversations inutiles, aucun compromis politique n’a été réalisé, au contraire, le pouvoir a tout fait pour verrouiller toute la machine électorale, empêchant ainsi les partis politiques de l’opposition d’avoir l’œil sur les conditions d’organisation de ces élections.
 
La CENI est taillée sur mesure comprenant plus de 14 membres du pouvoir sur 17. Le découpage électoral est resté déséquilibré jusqu’au bout, de sorte que dans certaines régions du nord, les députés sont élus avec moins de 10 mille voix alors qu’au sud il faudrait au moins 60 à 70 mille voix pour obtenir un seul député.
 
Pire, le pouvoir de Lomé a gonflé exagérément le nombre de bureaux de vote à travers le pays. D’environ 6 mille en 2010 ils sont passés à plus de 7 mille en 2013 alors que pour cette dernière élection, il y a eu moins d’électeurs qu’en 2010.
 
Ce qui a fait penser à l’opposition que le pouvoir a érigé des bureaux de vote en doublon et d’autres fictifs pour pouvoir muter les vrais résultats qui sortiront des urnes. Mais ce n’est pas tout.
 
La précipitation saisissante avec laquelle la CENI a cru devoir proclamer les résultats partiels de ce scrutin avant d’avoir reçu les procès-verbaux des CELI, indique sans ambages que projet de dribble était muri depuis longtemps et les membres de la CENI, y compris les représentants de l’UFC étaient préparés en conséquence.
 
Il apparait évident que plongé dans une déconfiture totale, coincé de toute part par le front social, la crise politique, la crise morale et le dégoût qu’il suscitait au plan international, le pouvoir de Faure Gnassingbé n’avait d’autre choix que de se trouver, par tous les moyens, une voix détournée de résurrection.
 
Le régime se trouvait en réalité dans une situation du quitte ou double, de vie ou de mort. Il ne devrait donc rien rater au risque de consacrer son enlisement définitif dans l’abîme.
 
L’organisation de ces élections aux moyens exclusifs de l’Etat et aux conditions décrétées par le régime ne répondait donc qu’à ce besoin de survie politique du pouvoir en place.
 
Et il en a saisi l’occasion pour abattre politiquement son dernier allié, Gilchrist Olympio qui, jouissant du même statut d’héritier que Faure Gnassingbé, devenait gênant surtout avec son ambition d’hériter du fauteuil présidentiel en 2015.
 
Mais cela suffira-t-il à restaurer l’image écornée de l’héritier d’Eyadema sur le plan international et à lui garantir un renouvellement de mandat en 2015 ? Rien n’est moins sûr.
 
Car il faut le dire, la prétendue victoire de UNIR à ces élections n’effacera en rien la médiocrité, l’amateurisme, l’inhumanité, l’immoralité et l’arrogance dont ce régime s’est rendu coupable aux yeux des togolais et de la communauté internationale.
 
Ceux sont ces manquements et ces carences caractéristiques de ce pouvoir qui jouent en réalité contre Faure Gnassingbé, pas autre chose. C’est évident que l’on est encore revenu à la case départ, aucune réforme au Togo ne pourra être faite en marge des compromis politiques. C’est évident.
 
Qui peut honnêtement croire qu’avec le soulèvement de l’ensemble des travailleurs du Togo, les incendies des marchés, la tuerie des élèves à Dapaong, les répétitives répressions des forces de l’ordre, les problèmes du monde agricole dont le maïs pourri dans les magasins faute d’acheteur, le délabrement des infrastructures partout dans le pays, les règlements de comptes politiques, la précarité dans le pays, l’accaparement des richesses de l’Etat par une minorité à la tête du pays et les différentes condamnations dont le Togo fait l’objet auprès de la cour de justice de la CEDEAO…ce régime pourrait jouir de la confiance des togolais au point de gagner, à partir de leur choix, 62 députés sur 91 ?
 
Le régime est donc en train de dire qu’entre 2007 et 2013, il a tellement bien travaillé, tellement comblé les togolais qu’ils en ont été heureux et lui ont donné plus de voix qu’il n’en avait reçu d’eux en 2007. Quel analyste politique peut croire à une telle hypothèse ?
 
Pour dire vrai, cet attelage électoral que le pouvoir de Faure Gnassingbé vient de monter au Togo ressemble de près à ce que Ben Ali a fait en Tunisie ou Hosni Moubarack en Egypte pour être élu, à nouveau à la tête de leurs Etats respectifs.
 
Mais, cela n’a pas empêché que les deux présidents soient chassés par les mêmes peuples qui étaient supposés les avoir réélus quelques mois seulement auparavant.
 
Plus que jamais, l’opposition togolaise a l’impérieux devoir de se réorganiser afin d’impulser une nouvelle dynamique de lutte politique. Sa prestation actuelle ne rassure pas. On ne change pas un régime cinquantenaire par de simples dénonciations, de simples cris de détresse, de simples manifestations fragiles de rue.
 
Le Togo a besoin d’un meneur d’hommes, d’un leader « providentiel » capable de capitaliser les aspirations profondes du peuple à travers une stratégie idoine de pression et de lutte pour la conquête effective du pouvoir qui est resté longtemps confisqué entre les mains d’une seule famille.
 
togoinfos
 
 

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