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Les Togolais connaitront-ils les causes réelles des incendies, les véritables pyromanes et leurs commanditaires ? Les conclusions des recherches des experts français seront-elles rendues publiques un jour ? Il faut craindre que non. Le rapport qui éclaire un tant soit peu les lanternes sur les origines et donne des orientations majeures sur les auteurs de ces sinistres qui ont ravagé les deux grands marchés du Togo, bien transmis aux autorités togolaises, est mis sous embargo.

Embargo sur le rapport



Attendu fin février, le rapport relatant les conclusions des recherches des deux experts en feu a été bien transmis aux autorités togolaises par le biais du ministère des Affaires étrangères. L’information a révélée par la presse à la mi-mars. Une fois réceptionné, ce rapport devait être rendu public sans formalités. On en est à une dizaine de jours de la fin du mois d’avril, mais l’opinion publique n’a pas encore connaissance du contenu. Le rapport n’est donc pas encore officiellement publié. Et de toute vraisemblance, sa publication n’est pas pour demain, car les indiscrétions font état d’un embargo en règle décrété là-dessus par le pouvoir de Lomé.

Il nous revient que des tentatives de certains organes pour l’avoir auprès des autorités françaises mêmes se sont heurtées au refus de ces dernières qui évoquent un certain respect de l’engagement pris, à savoir que c’est au pouvoir togolais de rendre publiques les conclusions, mais aussi un souci de sauvegarde des civilités diplomatiques. Peut-être qu’avec le temps, une possible fuite pourrait être organisée. Mais en attendant, tout est fait au niveau de Lomé pour que les conclusions des recherches des experts ne soient pas mises sur la place publique.

Le kérosène, le nœud central



A peine arrivés le samedi 12 janvier 2013 suite à l’appel au secours à eux adressé par les autorités togolaises, les sapeurs pompiers ghanéens n’ont pas hésité à évoquer des pistes concernant la substance qui a été éventuellement utilisée pour commettre l’incendie. Considérant l’ampleur des dégâts au grand marché de Lomé et la vitesse à laquelle le feu a pris l’immeuble et tout consumé, ils ont tout de suite laissé entendre que le sinistre aurait été causé par l’usage du kérosène, un combustible hautement inflammable. Et ils avaient vu juste, sans doute grâce à leurs expériences, puisque ces hypothèses seront confirmées par le rapport.

En effet selon les indiscrétions, après analyses des débris retrouvés sur les lieux des sinistres des deux grands marchés, les experts auraient découvert que c’est le kérosène qui a été utilisé par les pyromanes pour commettre leur forfait. Un paramètre fondamental qui devrait éclairer sur l’identité des vrais auteurs de ces incendies. Car ce combustible utilisé par les avions ne se trouve pas sur le marché ; et donc pas à la portée de tout le monde. Et selon les informations, le dépôt de kérosène est gardé méticuleusement par les militaires à l’aéroport de Lomé et c’est toute une rigueur qui entoure sa livraison. On ne peut donc y accéder que lorsqu’on se trouve dans un cercle fermé. Il n’en fallait pas plus pour que les observateurs voient les pyromanes et leurs commanditaires dans les arcanes du pouvoir. Et ici justement, on entreprend des manœuvres pour brouiller les pistes.

La manœuvre consiste à faire croire que ce carburant hautement protégé, se retrouve aujourd’hui sur le marché et est accessible comme le pétrole ou l’essence. Et les livreurs sont tout trouvés : les trafiquants du carburant de contrebande, le « boudè ». Une façon donc de désorienter les regards du pouvoir et d’élargir le champ des personnes pouvant y accéder. Le confrère « L’Alternative » révélait justement dans une de ses récentes parutions ces manœuvres du pouvoir, pour expliquer la non publication du rapport malgré sa remise aux gouvernants depuis bientôt deux mois. Et comme pour confirmer ces allégations, un ministre à la langue pendue ( suivez nos regards) s’est épanché dans ce sens la semaine dernière au cours d’un entretien sur une chaine de radio panafricaine.

L’étau se resserre autour du pouvoir



Pourquoi un embargo du pouvoir sur la publication des conclusions des recherches des experts français ? Et pourtant Faure Gnassingbé avait donné l’impression de vouloir connaître TOUTE LA VERITE sur les incendies dès les premiers instants de leur survenue. A peine les dernières braises avaient-elles été maitrisées (sic) au grand marché de Lomé par les sapeurs pompiers qu’on annonça la mise en place d’une « commission d’enquête, composée d’officiers de police et de gendarmerie, sous l’autorité du Procureur, pour faire toute la lumière sur les drames que notre pays vient de subir ». Connaissant les limites des services de son pays en matière d’enquête de ce genre, le Prince requit également auprès de François Hollande, l’assistance de la France qui dépêcha deux de ses experts au chevet du Togo pour la recherche. A l’époque, nous avions loué cette démarche. Le commun des Togolais croyait à une volonté sincère de sa part de connaitre les causes et les auteurs de ces sinistres. Mais c’était visiblement de la mise en scène.

En tout cas, c’est bien drôle que le rapport qui éclaire un pan énorme de cette affaire soit remis aux autorités et qu’elles se retiennent de le rendre public. « Ne cherchez pas loin. Les conclusions ne les arrangent tout simplement pas », glose un concitoyen, en guise d’explication de cet embargo. Et ce n’est pas farfelu. Publier le rapport qui conclue à l’usage du kérosène, c’est casser tout le montage officiel élaboré et qui a permis de mettre la main sur les opposants « emmerdeurs » du Collectif « Sauvons le Togo ». On se rappelle surtout la conférence de presse organisée en fin janvier par le ministre de la Sécurité et de la Protection civile, le Col Yark Daméhame, rencontre au cours de laquelle il avait présenté comme corps du délit un bidon d’essence, des boîtes d’allumettes, des bouteilles cassées prises pour des cocktails Molotov et des préparations mystiques, des matériels déterrés au siège de l’Alliance nationale pour le changement (Anc). Il avait été raconté que c’est avec l’essence que le feu a été répandu dans le bâtiment du marché d’Adawlato, avec un dispositif de mise à feu à distance. De toutes ses sorties organisées dans l’instruction de cette affaire, le Procureur de la République, Essolissam Poyodi a abondé dans le même sens, et les enquêtes n’ont été orientées que vers le Cst. Une chose est tout de même certaine, si le rapport des experts français était conforme à la thèse avancée et donc accablant pour l’opposition, le pouvoir l’aurait publié dès les premières minutes de sa réception et déployé ses « VENTREnalistes » sur les médias pour diaboliser davantage les leaders du Cst. S’il ne le fait pas, c’est parce que les conclusions ne l’arrangent pas. Mais jusqu’à quand les Togolais devront-ils attendre la publication du rapport ?

Tino Kossi

Liberté Togo

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