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© togoactualite – Les données 2014 de la Banque Mondiale sur les envois de fonds des migrants vers leur pays d’origine viennent d’être publiées et sans surprise les envois de la diaspora togolaise comme ceux des autres diasporas sont toujours tout aussi importants. Selon la Banque Mondiale 348 millions de dollars US (environ 182 milliards de Francs CFA) ont été transférés par la diaspora togolaise cette année contre 337 millions de dollars US les années précédentes. Cette somme représente 7,8% du PIB et consacre la diaspora togolaise comme l’une des plus généreuses d’Afrique.
 
Estimé à près de 2 millions de personnes, la diaspora togolaise envoie plus de fonds que les 4 millions de béninois et de ghanéens vivant hors de leur pays et dont les montants de transfert se chiffrent cette année respectivement à 182 et 147 millions de dollars US. Bien que les fonds transférés servent surtout à la consommation finale de leurs familles au pays, la diaspora constitue une source d’investissement social contribuant énormément au développement de l’immobilier et à la réduction de la pauvreté au Togo.
 
Dans le contexte togolais marqué par l’augmentation de l’endettement publique (1020 milliards de Francs CFA en 2013) les transferts de fonds de la diaspora représentent un apport significatif en termes de réserves de change et pour l’équilibre de la balance des paiements. Comme par le passé les apports de la diaspora restent supérieurs aux dons alloués à l’Etat togolais au titre de l’aide publique au développement qui se chiffraient en 2013 à 237,49 millions de dollars US soit 110 milliards de Francs CFA.
 
Et si le Togo misait réellement sur sa diaspora
 
Tout porte à croire que le gouvernement togolais est plus intéressé par les investisseurs étrangers que par le recours aux investissements productifs de la diaspora. La preuve en est, l’arsenal des mesures fiscales, juridiques et institutionnelles prises chaque année pour séduire les hommes d’affaires étrangers d’investir au Togo. Cependant alors que les envois de fonds de la diaspora caracolent à plus de 300 millions de dollars depuis 2008 les investissements directs étrangers sont en baisse passant de 124 millions de dollars US en 2010 à 84 millions de dollars US en 2013 avec en prime une évasion fiscale record.
 
Malgré les effets d’annonce et rhétoriques officielles sur les mesures prises pour faciliter l’apport de la diaspora à l’économie togolaise, la réalité sur le terrain est tout autre. Les assises de la diaspora togolaise, financées par la Banque Africaine de Développement et tenues à coup de fanfares au mois de mars 2014, peinent à voir leurs recommandations mises en œuvre. Nombreux sont ainsi les Togolais de l’extérieur ayant répondu à l’appel du gouvernement pour venir investir au Togo et confrontés aux blocages de leurs effets personnels et ceux de leur famille au port et à l’aéroport de Lomé. Difficile pour eux de contourner les lourdes taxes de douanes qui pèsent sur leurs mobiliers déménagés pour rentrer définitivement au pays. Pour ceux qui ont opté pour la création d’entreprise, les problèmes liés à l’importation et à l’installation des matériaux de production, ajoutés au peu de crédits accordés par les banques aux projets venant des membres de la diaspora au retour fragilisent le lancement de leurs initiatives. Interpellé sur cette situation le gouvernement se rabat sur les facilités offertes déjà avec la zone franche en priant la diaspora d’investir dans ce cadre.
 
Ainsi aucune mesure spécifique n’est prise par les autorités compétentes pour attirer réellement les investisseurs de la diaspora. Le code des investissements reste lettre morte à leur sujet tout comme bien d’autres lois civiques, économiques et sociales. Cela ne peut guère étonner quand on sait le flou qui reste encore quant à la définition du concept de la diaspora au Togo.
 
La double nationalité : Plus qu’un préalable
 
Qui peut être considéré comme un Togolais de la diaspora ? Cette délicate question a été soigneusement évitée lors des assises de la diaspora afin de ne pas amener à s’interroger sur le statut encore officieux des binationaux et des togolais ayant du renier leur nationalité sous la contrainte de leur pays d’accueil. Question extrêmement délicate avec des connotations politiques à la clef ce qui expliquerait que le gouvernement s’en tienne à une politique de l’autruche à ce sujet.
 
Le code nationalité en vigueur au Togo depuis les années 70 dénie implicitement dans ses articles le droit à tout Togolais de disposer d’une double nationalité. Ce code n’a pourtant pas empêché des milliers de Togolais vivant à l’étranger de se prévaloir de la nationalité de leur pays d’accueil. Cette situation les prive de leurs droits civiques et politiques et en particulier du droit de participer au choix politique et aux discussions sur la gouvernance dans le pays. En outre le flou juridique liée à cette situation empêche d’accorder à ces binationaux de fait les avantages qu’impliquent leur contribution économique par leur transfert de fonds.
 
Bien loin de reconnaitre officiellement la double nationalité par l’adoption d’un nouveau code de la nationalité, le gouvernement procède par tâtons en accordant d’abord l’exemption de visa aux Togolais de l’extérieur disposant d’un passeport étranger et d’une pièce d’identité togolaise. Cette décision a pour avantage de conserver le flou sur les binationaux leur accordant le droit au retour sans visa tout en les excluant de l’exercice de leurs droits politiques et civiques. Dans cette condition la diaspora voit à travers les initiatives étatiques plus un désir d’accaparer la manne financière qu’elle représente et non un souci de leur participation réelle dans la vie publique et dans la définition d’une vision émergente du pays.
 
Un forum et des institutions pour les Togolais de l’extérieur
 
Les assises de la diaspora devaient à terme déboucher sur un Forum des Togolais de l’Extérieur, espace d’échanges entre la diaspora et les autorités publiques afin de marquer leur participation nouvelle dans la construction d’un Togo émergent. Cette recommandation importante des assises ne semble pas constituer une priorité et le budget 2015 ne laisse guère apparaitre une volonté du gouvernement d’aller vers ce forum.
 
Autre recommandation phare des assises en latence, la création d’une agence autonome capable de gérer avec minutie les innombrables problèmes auxquels est confrontée la diaspora dans son désir d’investissement ou de retour au bercail. Le gouvernement opte plutôt pour le renforcement de la Direction des Togolais de l’Extérieur, un département du ministère des affaires étrangères chargé d’élaborer une politique nationale des Togolais de la diaspora.
 
Il ne reste plus à la diaspora d’espérer que l’Etat togolais concédera à remplir son devoir de protection envers tous ses citoyens où qu’ils se trouvent à travers ces ambassades. La création de nouvelles ambassades et la diplomatie du développement à laquelle s’attache actuellement le Togo ne peut en effet faire économie de l’installation dans chaque ambassade de structures spécifiques pour accompagner et mieux protéger les intérêts de sa diaspora.
 
lomévi (www.togoactualite.com)
 

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