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La tension politique a beau s’exacerber, l’attelage RPT/UNIR/UFC et son prolongement la CENI, n’en ont cure. Mais alors pas du tout. La CENI annonce la période d’enregistrement des candidatures entre le 03 et le 10 juin, alors que l’incertitude plane toujours sur la date exacte du scrutin. Evidemment, cette annonce est diversement accueillie. Au Collectif « Sauvons le Togo » et à la Coalition Arc-en-ciel, on crie haro. Du côté du pouvoir et de ses ailes marchantes réduites à leur portion congrue, on se met d’ores et déjà en ordre de bataille.
 
Top ! C’est le départ. La CENI a annoncé que le dépôt des dossiers de candidature au prochain scrutin législatif s’effectue du 03 au 10 juin. Soit une semaine accordée aux aspirants à un siège dans la prochaine Assemblée nationale de déposer leurs dossiers. Après quoi, c’est à la Cour constitutionnelle qu’il reviendra de valider définitivement les dossiers enregistrés. Et ce sera l’avant-dernière étape dans ce long processus amorcé il y a des lustres et toujours sur fond de tensions politiques.
 
Cependant, l’annonce de la période de dépôt des candidatures dans le contexte actuel de crise profonde entre la classe politique togolaise est très mal perçue du côté de l’opposition incarnée par le CST et la Coalition Arc-en-ciel.
 
D’abord parce que la date du scrutin demeure à ce jour un mystère, quoique la CENI l’ait annoncé pour la première semaine du mois de juillet. Sans aucune forme de précision. En effet, c’est une situation surréaliste et inédite que déplore l’opposition dans son ensemble. Car, jamais dans l’histoire d’une Commission chargée d’organiser des élections, l’on n’a ouvert la période de dépôt des candidatures alors que la date des élections demeure inconnue et que le décret convoquant le corps électoral n’est pas édicté. Me Zeus Ajavon, Coordinateur du Collectif « Sauvons le Togo » et ancien membre de la Céni, ne décolère d’ailleurs pas : « Ce que fait la Céni est nul et de nul effet ». Et ensuite, parce que les règles devant prévaloir à l’organisation du scrutin législatif portent jusqu’à ce jour le sceau de l’unilatéralisme du pouvoir RPT/UNIR/UFC alors qu’au regard du Protocole additionnel de la CEDEAO, de l’Accord Politique Global (APG), elles devraient être consensuelles.
 
Selon Brigitte Adjamagbo, présidente de la Coalition Arc-en-ciel et Secrétaire générale de la Convention Démocratique des Peuples Africains (CDPA), l’opposition jouera son va-tout pour déjouer les plans obscurs du pouvoir : « Il n’est pas question de boycotter ces élections, nous userons de tous les moyens légaux pour la tenue d’élections consensuelles et transparentes ». Même son de cloche chez Jean Kissi, Secrétaire national du Comité d’Action pour le Renouveau (CAR) et membre de la Coalition Arc-en-ciel qui avertit que l’opposition ne frayera pas de boulevard au pouvoir en place dans son dessein inique d’installer une assemblée monocolore, par un boycott des élections : « nous sommes en train de nous organiser. Nous avons une réunion de crise. Nous avons des éléments, des stratégies, c’est à nous de nous organiser. L’essentiel pour nous, c’est qu’on ne leur laissera pas une assemblée monocolore, comme ils le veulent ».
 
Quant à l’Alliance nationale pour le changement (ANC), elle déclare, par la voix de son premier Vice-président Patrick Lawson, qu’elle ne se pliera pas à ce communiqué de la CENI faisant obligation aux potentiels candidats de déposer leurs dossiers de candidature dans cette période. Bref, au cours de cette période, la CENI n’enregistrera pas, sauf coup de théâtre, une quelconque candidature de l’ANC. « Nous ne déposerons aucune candidature. Nous attendons une chose et une seule chose : le dialogue politique pour régler les problèmes. Ce que nous avons demandé, c’est ce que la communauté internationale a demandé également à travers le communiqué conjoint de l’UE et de la CEDEAO, parce que le Togo est cité aujourd’hui parmi les pays à risque et il vaut mieux prévenir que guérir. Patrick Lawson remet au goût du jour, la nécessité d’un dialogue en vue d’une approche consensuelle entre les acteurs politiques, comme le recommandent l’Union Européenne, la CEDEAO, et divers autres instruments nationaux : « Nous réitérons notre demande de sagesse qui est l’organisation d’un dialogue avant les élections ». Mais il lève l’équivoque : il ne s’agit pas d’un boycott : « Nous ne disons pas que nous boycottons les élections ».
 
Cette ambiance pour le moins délétère qui prévaut au sein des Etats-majors des partis de l’opposition contraste fortement avec celle qui règne du côté du pouvoir et de ses ailes marchantes. D’ailleurs, dans ce camp, l’on n’a pas attendu que le processus atteigne cette étape avant de se lancer dans une campagne. Les médias d’Etat sont inondés d’articles qui font la publicité politique du RPT/UNIR et de l’UFC. Difficile de suivre le journal télévisé de 20h00 sur la Télévision Togolaise sans voir un élément sur l’UNIR et, dans une moindre mesure, l’UFC.
 
Selon les informations reçues, les candidatures d’UNIR ont été collectées pendant le week-end ; et un comité mis en place devra incessamment assurer un arbitrage avant le dépôt des candidatures dans le délai fixé par la CENI, révèle le confrère en ligne Koaci. Et ce, en dépit de l’illégalité qui entoure jusqu’à ce jour, l’existence de ce parti. Pour rappel, le congrès constitutif, maintes fois programmé, n’a pas encore eu lieu. Une arlésienne ? En tout cas, c’est avec un bureau provisoire que ce parti a obtenu son récépissé. Du côté de l’UFC également, on multiplie les meetings de sensibilisation. Les fruits porteront-ils la promesse des fleurs ?
 
Fait tout à fait anecdotique, la Convergence Patriotique Panafricaine (CPP), un has been, trouve aussi le moyen de se réjouir de cette annonce par la CENI de la période de dépôt des candidatures et de dire que tous les débats tournant autour des réformes devront être faits dans la prochaine Assemblée nationale. Pas surprenant d’autant plus que quelques jours plus tôt, l’un de ses responsables claironnait à travers les colonnes d’un journal que dans un pays comme le nôtre, il est difficile de réunir toutes les conditions avant d’aller au scrutin. Raisonnement tout à fait farfelu car si les problèmes politiques existants ne sont pas réglés avant le scrutin, celui-ci ne viendra que les amplifier. Des élections sur fond de tensions seraient-elles le moyen pour régler la crise qui mine profondément le Togo ? En tout cas, c’est l’opinion de Francis Eckon et ses collaborateurs. Soit dit en passant, ce parti réduit à sa portion congrue, compte-t-il avoir au moins un siège lors des prochaines législatives ? Il semble que là, on essaie juste de faire des clins d’œil au pouvoir RPT/UNIR/UFC, dans l’espoir d’une suite favorable lors de la formation du prochain gouvernement. Et ne faisant pas les choses à moitié, ce parti annonce déjà qu’il sera au rendez-vous. De quoi doper le moral à ce pouvoir qui, visiblement, semble décidé à foncer droit dans le mur par un passage en force électoral.
 
Quelle image le Togo présentera-t-il au sortir de ce scrutin ? C’est la question qui triture les méninges.
 
Magnanus FREEMAN
 
Liberté Togo