La République de Dahomey devenu République du Bénin en 1972 a été l’un des pays les plus instables en Afrique de l’Ouest. De 1963 à 1972, cinq coups d’Etat militaires, six régimes et onze présidents. Hubert Koutoukou Maga, Christophe Soglo, Sourou Migan Apithy, Tahirou Congacou, Lieutenant-Colonel Alphonse Alley, Dr Emile Derlin Zinsou, Dr Paul Emile de Souza, le triumvirat Hubert Maga, Justin Tomètin Ahomadégbé, Sourou Migan Apithy puis Mathieu Kérékou se sont succédé dans des conditions troubles à la tête de ce pays en neuf ans. Le Colonel Kérékou a régné jusqu’en 1990 avec la Conférence nationale qui a débouché sur l’élection de Nicéphore Dieudonné Soglo.

Ce détour juste pour montrer comment le pays de Béhanzin avait souffert avant de retrouver la stabilité politique. Depuis la conférence nationale, le Bénin est cité comme un exemple de démocratie hormis quelques soubresauts autour de l’élection présidentielle de 2011 marquant le second mandat de Yayi Boni. Malheureusement, la démocratie béninoise a volé en éclat avec l’avènement de Patrice Talon.

Les élections législatives du 28 avril dernier sans l’opposition met le pays sur des braises ardentes. Les principaux responsables de l’opposition deviennent de plus en plus menaçants au sortir du scrutin. «Le peuple a infligé à Talon un démenti cinglant, impitoyable. Je voudrais que le président de la République comprenne que s’il ne veut pas écourter son mandat, il est indispensable que l’on ait de vraies élections. La balle est dans son camp. Si Talon continue comme ça, il ne finira pas son mandat », a lancé Nicéphore Soglo. « Il faut que monsieur Patrice Talon tire toutes les conséquences du rejet à plus de 96% de son projet néfaste, dictatorial, de nomination des députés à l’Assemblée nationale, qu’il renoue le dialogue avec l’ensemble de la classe politique à l’effet de trouver des solutions consensuelles pour la tenue effective des élections législatives, transparentes et crédibles dans un climat démocratique apaisé, dans l’unité, la paix et la cohésion nationale », a-t-il ajouté.

L’ancien président Thomas Boni Yayi a lui estimé que le Bénin traversait «une crise profonde » et que la solution se trouvait entre « les mains du chef de l’État et du peuple ». « Le président possède tout l’arsenal juridique pour mettre fin à ce processus qui a réussi à diviser le Bénin et prendre le chemin de la voie consensuelle. S’il ne s’exécute pas, nous appelons le peuple à prendre toutes ses responsabilités. Talon marchera sur notre corps pour installer ses députés », a déclaré Yayi, évoquant des taux de participation oscillant « entre 5 et 10% ». Dans un communiqué diffusé lundi 29 avril, l’ambassade des États-Unis au Bénin avait déploré « l’impossibilité pour les partis d’opposition de participer aux élections législatives », menant à des « élections ni entièrement compétitives, ni inclusives, et qui ne reflètent pas le Bénin que nous connaissons ». L’ambassade américaine a également regretté « le blocage des réseaux sociaux et de l’Internet le jour des élections », créant selon elle un « environnement contraire aux performances de longue date » du pays en matière de « liberté de parole et d’expression ».

De son côté, Wilfried Houngbedji, le porte-parole de la présidence estime que « le processus électoral s’est déroulé conformément à la loi, il ira à son terme. Ceux qui parlent d’ultimatum, qui menacent un président légitimement élu, sont les seuls responsables de leurs actes», a-t-il déclaré.

Au regard des violences et dégâts constatés lors de ce scrutin, le Bénin est plus qu’en danger. A preuve, hier mercredi 1er mai, la résidence de l’ancien président Yayi Boni à Cotonou a été encerclée par des forces de sécurité. Des échanges de pierres et de gaz lacrymogènes entre les hommes en uniforme et ses partisans ont duré des heures. Des pneus ont été brûlés rendant cette partie de la ville méconnaissable. Plusieurs véhicules incendiés. Le prédécesseur de Talon a reçu le soutien de Nicephore Soglo et son épouse Rosine ainsi que de Candide Azannai.

Peu avant, la Commission Électorale Nationale Autonome (CENA) a diffusé des tendances du scrutin de la honte et le taux de participation qui oscille autour de 22,99%. La CENA indique aussi que le scrutin n’a pu s’organiser dans 39 circonscriptions pour des raisons sécuritaires. Une situation qui confirme le grand recul démocratique au Bénin qui se met désormais en compétition avec son voisin repoussant, le Togo. Le Togo, une menace pour la sous-région La plupart des observateurs sur la crise politique béninoise indiquent que Patrice Talon s’est inspiré du scrutin législatif du 20 décembre 2018 au Togo.

Faure Gnassingbé sous le regard complice de la CEDEAO a organisé une parodie électorale qui a consacré l’exception nuisible qu’il incarne dans la sous-région. «Le Togo, cet îlot de dictature ouest africain est une menace pour les jeunes démocraties des pays limitrophes. Des pays qui jusqu’ici étaient considérés comme des modèles démocratiques sont en pleine régression parce que copiant le cancre de la classe, le Togo qui, malgré ses piètres résultats n’est jamais punit. Alors les bons élèves aussi croient qu’ils peuvent faire comme le Togo dans l’indifférence de la communauté internationale.

Ainsi donc des coupures de connexion le jour des élections, le déploiement des chars pendant la campagne électorale, les élections non inclusives …qui sont des recettes togolaises sont exportées chez nos voisins. Si la jeunesse africaine n’y prend garde, ces timides avancées démocratiques constatées ici et là sur le continent seront remises en cause par ces potentats qui se sont vêtus d’oripeaux d’agneau », a insinué un confrère. Aujourd’hui, Alassane Dramane Ouattara en Côte d’Ivoire et Alpha Condé en Guinée entretiennent la confusion et multiplient des manœuvres pour un 3ème mandat pourtant proscrit par leur constitution respective. Au lieu de faire croire aux gens que la véritable menace de déstabilisation de la sous-région reste les attaques djihadistes, le Togo demeure le seul et véritable danger de la zone.

Doit-on le rappeler, les multiples coups d’Etat des années 1960 au Bénin se sont inspirés du tout premier coup d’Etat en Afrique et ce fut le Togo avec l’assassinat de son premier président Sylvanus Olympio.

Il importe dès lors que la lutte pour la liberté, l’Etat de droit et la démocratie devienne collective pour éradiquer toutes les poches de dictature en Afrique de l’ouest notamment. Le seul mauvais exemple togolais est une gangrène qui pourrait consacrer le retour des vieux démons des dictateurs dans cette zone marquée depuis plus de deux décennies par de noble espoir de renouveau en matière de démocratie et de la bonne gouvernance.

 
Source : Le Correcteur
 

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