Au lendemain de la violente et sanglante présidentielle du 24 avril 2005 suite à la mystérieuse disparition du général président, le dialogue inter togolais a connu son épilogue avec la signature de l’Accord politique global (Apg) qui a consacré le bradage de la victoire de l’opposition. Les réformes constitutionnelles et institutionnelles exigées dans ce document signé depuis le 20 Août 2006, semblent ne jamais se concrétiser au regard du dilatoire érigé en règle au sommet de l’Etat.
En effet, les violences post électorales d’avril 2005 qui ont aggravé la crise sociopolitique que traverse le Togo depuis l’enclenchement du processus démocratique au Togo en 1990, ont poussé les différents protagonistes à se retrouver autour d’une table de négociation en vue de lénifier les tensions et trouver des voies de sortie pacifique de crise pour sauver le pays du chaos.
Dans ce document politique, il était notamment question de la tenue des législatives anticipées et des réformes institutionnelles et constitutionnelles pour redonner vie à la nation togolaise. Hormis la tenue des législatives anticipées en octobre 2007, ce, nonobstant la nouvelle configuration de l’Assemblée nationale, pour ce qui concerne les réformes à opérer, jusque-là, il n’en est absolument rien. La chose semble ne pas réellement préoccuper le chef de l’Etat qui doit déclencher le mécanisme de ces réformes.
Alors, pourquoi le sommet de l’Etat n’avait pas oscillé à organiser les législatives anticipées et que pour les réformes, on éprouve des difficultés et on fait preuve de criardes tergiversations vraiment extraordinaires ?
Dans ce cas de figure, nombre d’observateurs de la vie politique nationale s’accordent sur le fait que les vraies réformes, si le régime en place venait à les concrétiser, cela n’arrangerait guère Faure Gnassingbé dans la mesure où celui-ci verra son pouvoir limité et qu’il ne va plus se confondre à l’Etat. Car, il aura à gouverner cette fois-ci avec des contre-pouvoirs et le peuple aura son droit de regard dans la gestion des affaires de la cité.
Aussi, ces réformes toucheront le mandat présidentiel qui, lorsqu’il sera limité à deux, signera la fin du règne chaotique de Faure Gnassingbé et donc du régime dont il est la parfaite incarnation. La question du code et du redécoupage électoraux ne seront pas non plus du reste. Dans tous les cas, tous les indicateurs ayant trait à ces réformes tant institutionnelles que constitutionnelles militent en défaveur de Faure Gnassingbé qui, au regard des délices et de son goût démesuré du pouvoir, de la volupté qui règne au sein du palais royal, de tous les honneurs et de toutes les considérations dont il fait objet dans l’exercice de ses fonctions, de la sarabande des griots et autres barons du régime sous son regard amusé, des accueils chaleureux qu’on lui réserve lors de ses interminables voyages, etc.., aura du mal à vivre hors du pouvoir. La culture de vivre sans le pouvoir n’étant donc pas encore rentrée dans les mœurs.
Dans le même contexte politique, la modernisation de la justice aidera à consolider la démocratie et à renforcer l’Etat de droit. Elle rapprochera la justice des justiciables et la rendra effectivement indépendante. Cela doit se traduire donc par une réforme totale de tout l’appareil judiciaire depuis la formation des professionnels de la justice en passant par les réformes institutionnelles et l’amélioration des conditions de travail. Les textes actuellement en vigueur doivent être revisités et les différentes juridictions renforcées dans leur rôle. L’objectif sera donc d’arriver à une justice accessible pour tous les citoyens, moderne et diligente. Dans cette optique, la justice togolaise ne peut plus rester aux ordres du prince. Ce que Faure ne peut supporter connaissant les habitudes de la maison.
Pour ainsi jouer au dilatoire, Faure et son régime autocratique veulent passer l’éponge sur les vraies réformes à opérer pour se contenter d’une révision unilatérale de la constitution pour croire flouer le peuple.
Or, la constitution d’un Etat est perçue comme une charte de la démocratie politique, économique, sociale et culturelle. Elle est le dogme des droits et devoirs dans le pays. Elle pose les assises de la société et les règles de son fonctionnement. Elle distingue nettement les trois pouvoirs : l’exécutif, le législatif et le judiciaire. C’est un contrat social qui garantit aux citoyens une égalité non seulement en droits mais aussi en jouissances et prescrit les devoirs des uns et des autres. Elle évolue avec la société et épouse ses réalités.
Ainsi, toute constitution prévoit la manière de procéder à sa révision. La manière la plus légitime est le référendum. La souveraineté appartenant donc au peuple, il lui revient de décider des changements à apporter à sa loi fondamentale. Sa modification doit porter remède aux déficits constatés, suite à l’évolution de la société et aux réalités nouvelles. Cette modification ne doit pas servir les intérêts d’une catégorie sociale ou d’un homme. Même si les dispositions de l’article 144 de la Constitution réservent des prérogatives à l’Assemblée nationale et au président de la république pour initier une quelconque révision de la constitution, le dernier mot revient tout de même au peuple qui doit accompagner l’action du président.
Tout compte fait, cette manière de vouloir faire les choses de façon unilatérale au détriment des vraies réformes à opérer en vue d’ouvrir le pays à d’autres horizons pour la construction d’une nation civilisée n’est pas de nature à contribuer au règlement pacifique de la crise pour un Togo prospère et réconcilié.
Peter S.
source:triangledesenjeux.com